Bruneau Laurette devient pasteur évangéliste
Eclairages
Par A. Bartleby
C’est avec un mélange de surprise et de scepticisme que nous avons appris cette semaine que Bruneau Laurette s’était fait ordonner pasteur dans une église évangéliste, àl’église « Joshua Generation Ministries » pour être plus précis.
Il s’agit d’une église évangéliste basée en Inde et dont l’objectif est de “touch the world with the Glory and Power of the Gospel of Jesus Christ”. En d’autres termes, il s’agit d’une église dont l’objectif est la conversion. Conversion des Catholiques et des Anglicans, mais aussi conversion des non-Chrétiens au dogme évangéliste.
Ces églises sont très particulières de ce point de vue et constituent une exception, pour ne pas dire une anomalie, dans le vaste paysage de la chrétienté. Elles sont, par exemple, extrêmement puissantes aux États-Unis et sont capables d’influencer les politiques publiques du pays. Tout le mouvement des néo-conservateurs, par exemple, s’appuie sur ces églises et leur capacité à rassembler et à faire pression sur les institutions. George W. Bush avait déjà besoin d’eux et avait pris appui sur leur soutien pour aller en guerre en Irak. Donald Trump, lui, a été élu grâce à leur influence et leur rejet massif de toute forme de progressisme que pouvait incarner Barack Obama.
Mais il existe une différence entre les évangélistes américains et indiens. Les objectifs politiques ne sont pas les mêmes. Mais la volonté d’influencer les politiques est bel est bien présente.
De ce fait, l’ordination de Bruneau Laurette relèverait d’une stratégie politique. Nous ne sommes pas ici dans le domaine de la spiritualité, de la croyance et de la foi, mais bel et bien dans une volonté politique de notre Bruneau national.
Après avoir interagi avec plusieurs mouvements politiques et après s’être associé à toutes les personnes qui voulaient bien de lui, Bruneau Laurette s’est retrouvé dans une situation complexe. Il a dû vite déchanter lorsqu’il s’est rendu compte qu’il avait brûlé toutes ses cartes politiques et que
le capital de crédibilité qu’il avait réussi à engranger était passé à la trappe. Son dernier “move” politique l’a associé à Sherry Singh, ce qui a probablement accéléré sa chute dans l’estime du noyau qui s’était constitué autour de lui.
Quelle autre option avait-il donc ? En réalité, c’est feu Dev Virahsawmy qui avait compris ce qu’allait faire Bruneau Laurette. En effet, dans un entretien qui date de l’année dernière, Dev Virahsawmy avait très justement expliqué que Bruneau Laurette compensait son manque de discernement et de compréhension politique par un langage de nature religieuse.
En d’autres termes, ne sachant pas formuler des propositions politiques sérieuses, Bruneau Laurette passe son temps à tenir un discours messianique dont l’objectif est justement de cacher le vide de ses propositions. À partir de là, il était parfaitement logique que Bruneau devienne lui-même pasteur, copiant à la lettre les méthodes des pasteurs évangélistes américains comme Billy Graham ou Joel Osteen.
Ces pasteurs, par leur emploi d’un discours qui mélange messianisme, politique et vision sociétale, sont devenus des stars aux États-Unis. Et des stars dont l’influence est telle qu’elle leur apporte la capacité d’influencer les politiciens que nous avons mentionnés, mais également la capacité à construire d’immenses fortunes.
Encore une fois, nous sommes ici très loin de ce qui se fait aux États-Unis, mais l’ordination de Bruneau Laurette pourrait lui permettre un réalignement politique.
Déjà, une telle ordination signifie qu’il a sans doute fait une croix sur l’électorat des cités des circonscriptions urbaines. Mais une telle ordination signifie également qu’il va tenter d’aller piocher dans un autre électorat : celui des nouveaux convertis.
Et cet électorat n’est pas forcément celui que l’on croit. Il se pourrait bien qu’il soit bien plus présent dans les régions rurales et qu’il représente aujourd’hui une part importante dans les changements démographiques qui pourraient influencer l’issue d’une élection.
De ce point de vue, la stratégie de Bruneau Laurette n’est pas complètement folle. Mais réussira-t-il à produire l’effet qu’il recherche ? Personne n’a pour l’instant prouvé que c’était possible. Mais peut être que nous aurons droit à une grande première pour les prochaines élections générales.
* * *
La fin du miracle économique chinois ?
L’économie chinoise vit des moments compliqués depuis la fin de la pandémie de la Covid-19.
Entre le ralentissement de la circulation mondiale, une chute sensible de l’investissement étranger, une augmentation importante du chômage des jeunes et un marché de l’immobilier dans une situation d’endettement sévère, les indicateurs ne sont pas au mieux pour un pays qui ambitionnait de passer bientôt devant les États-Unis en tant que première puissance économique mondiale.
À titre de comparaison, le PIB de la Chine représentait 76% de celui des États-Unis en 2021, alors qu’il représente 64% du PIB américain en 2023. Ce recul de 12 points est énorme pour une période de deux ans et témoigne des difficultés actuelles de l’économie chinoise.
Il faut préciser que cette régression est le résultat de deux phénomènes simultanés. D’un côté, le ralentissement de la croissance chinoise est bel et bien réel (et, en réalité, date d’avant la Covid-19) mais, de l’autre côté, l’économie américaine s’est tenue mieux hier que l’annonçaient les prévisions. La raison principale de cette bonne santé de l’économie américaine est une réindustrialisation ultra-rapide des États-Unis, qui se fait au détriment des industries chinoises.
Nous voyons là le lien de symétrie profond qui existe entre ces deux économies qui sont extrêmement dépendantes l’une de l’autre. La Chine a longtemps profité de la désindustrialisation américaine, et du transfert des capacités de production des États-Unis vers la Chine où les coûts de production étaient nettement moins élevés. L’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche et la guerre commerciale qu’il a initiée contre la Chine a fait que les États-Unis se sont dotés d’autres capacités de production, ce qui a fait que certains géants américains ont quitté la Chine, entrainant un immense manque à gagner pour l’économie chinoise.
C’est le cas, par exemple, d’Apple qui a fermé ses usines chinoises afin de les relocaliser en Inde, où sont maintenant produits les iPhone et iPad.
D’ailleurs, il suffit d’observer l’évolution des investissements directs dans l’économie chinoise depuis un peu plus d’une décennie pour comprendre le phénomène. La Chine représentait, il y a encore dix ans, un Eldorado pour l’investissement direct, qui a été le fuel de sa croissance économique et du développement de ses industries. Aujourd’hui, en 2023, il y a plus d’investissement direct qui quitte l’économie chinoise qu’il n’y a d’investissement qui y entre.
En d’autres termes, plus de capitaux sortent de la Chine qu’ils n’entrent en Chine. Ceci a des conséquences directes sur l’économie chinoise, à commencer par l’apparition du chômage de masse qui touche aujourd’hui près de 21% des 18-25 ans en Chine. Cela a de quoi surprendre car nous sommes déjà dans les standards européens, donc des pays postindustriels.
Ce taux de chômage est en tout cas inédit en Chine depuis le début des réformes économiques par Deng Xiaoping. La montée en richesse des classes ouvrières et des classes moyennes chinoises était constante, avec chaque génération bénéficiant d’un accroissement conséquent de leur niveau de vie. C’est cette dynamique qui semble aujourd’hui ralentir de manière assez significative, tellement significative même qu’une part importante de la jeunesse chinoise plonge peu à peu dans un désenchantement qui fait qu’elle refuse de se marier et d’avoir des enfants par peur de l’incertitude de l’avenir.
Parallèlement à ce phénomène, le marché immobilier chinois est entré il y a deux ans dans une situation extrêmement instable et complexe avec notamment l’effondrement des stocks d’Evergrande, le second plus gros groupe immobilier chinois. Evergrande avait accumulé des dettes de plus de $340 milliards en 2022, avec des projets immobiliers de plusieurs millions d’appartements qui étaient à l’arrêt. Cela a produit une situation extrêmement compliquée pour des millions de chinois qui avaient englouti toutes leurs économies dans l’achat d’un bien immobilier. Les paiements avaient été effectués, mais la majorité des projets n’avaient même pas démarrés.
Le gouvernement chinois est intervenu pour tenter de stabiliser le groupe et en promettant que les retards allaient être réglés. À ce jour, rien n’a été vraiment fait, Evergrande devant même se déclarer banqueroute sur ses holdings américains en août de cette année.
Ce camouflé d’Evergrande a d’ailleurs forcé Moody’s à revoir son “credit rating” en dégradant sa perspective pour l’économie chinoise, ce qu’il ne faut pas confondre avec une dégradation de la note qui reste le A. Mais Moody’s tire clairement la sonnette d’alarme en voyant dans la bulle immobilière un danger structurel pour l’économie chinoise dans son ensemble.
Tout cela produit un affaiblissement du gouvernement chinois et de la position de Xi Jinping. Ce dernier semble d’ailleurs plutôt se concentrer sur la politique extérieure chinoise afin de relancer l’économie de son pays. Ainsi, la continuation du développement du ‘Belt and Road Initiative’, malgré des retards et des setbacks de certains projets, permettent à la Chine de continuer sa politique d’expansion commerciale vers notamment le continent africain.
En effet, il semble actuellement essentiel aux décideurs chinois de concentrer leurs efforts sur l’expansion dans notre région du monde. La multiplication des projets et des accords commerciaux avec les pays africains pourrait donner à la Chine une voie de sortie de la situation complexe dans laquelle elle se trouve en relançant ses industries et en faisant entrer dans le circuit économique chinois les investissements directs dont il a besoin pour soutenir une relance.
* * *
Le Venezuela vote pour l’annexion d’une partie du Guyana
Le Venezuela est un pays paradoxal. Alors qu’il possède les plus grandes réserves de pétrole de la planète, ce pays compte parmi les plus pauvres d’Amérique du Sud. Nicolas Maduro gouverne d’une main de fer depuis qu’il a remplacé Hugo Chavez en 2013.
Maduro est dans l’actualité depuis quelques jours car il a organisé le 3 décembre dernier un référendum sur l’annexion de la région de l’Essequibo, territoire appartenant à l’État voisin du Guyana. Ce référendum n’a aucune valeur juridique sur le plan international. Cette frontière est litigieuse depuis un certain temps mais elle était plus ou moins acceptée jusqu’à récemment, c’est-à-dire jusqu’à la découverte d’importants gisements pétrolifères.
En effet, l’Essequibo est un territoire de 160 000 km2 de forêt tropical dont le sous-sol est extrêmement riche en pétrole et en gaz. Des gisements extrêmement prometteurs ont également été découverts au large des côtes de l’Essequibo.
La région de l’Essequibo est donc hautement stratégique dans la région, et le coup de force que tente Maduro a forcément fait réagir les pays voisins. Le Brésil déjà, pays frontalier du Venezuela et du Guyana, où le président Lula a positionné des troupes de l’armée brésilienne près de la frontière guyanaise. Ce même Lula s’est également exprimé sur l’effet domino qu’une telle situation pourrait produire sur le continent, en précisant que l’Amérique du Sud n’avait pas besoin de cela dans la conjoncture présente.
Les États-Unis ont également réagi, par l’intermédiaire du secrétaire d’État aux affaires étrangères, Antony Blinken. Ce dernier a haussé le ton envers Maduro en précisant que les États-Unis reconnaissaient la souveraineté du territoire guyanais. Dans la foulée, l’armée américaine a débuté des exercices militaires sur le territoire guyanais, exercices qualifiés de provocation par le Venezuela.
Paradoxalement, le gouvernement guyanais, lui, est resté assez silencieux, sauf pour une prise de parole claire du vice-président Bharrat Jagdeo. Ce dernier a clairement déclaré que toute exploration pétrolière de compagnies vénézuéliennes ou d’autres pays serait considérée comme une invasion du Guyana.
Ce n’est pas la première fois que le territoire de l’Essequibo se retrouve au milieu d’une dispute territoriale. Cela fait près de 200 ans que le Venezuela revendique occasionnellement l’Essequibo, car il considère en avoir été spolié en 1841 par le Royaume-Uni qui détenait alors le Guyana (devenu indépendant en 1966).
Mais la découverte récente des gisements change forcément la donne dans cette région. Ces gisements pourraient faire du Guyana l’un des pays les plus riches du monde, ce que Hugo Chavez et Nicolas Maduro n’ont pas réussi à faire avec les ressources pétrolières vénézuéliennes.
Assistons-nous aux prémices d’une guerre pour les ressources énergétiques en Amérique du Sud ? Ça y ressemble beaucoup et il faudra garder un œil averti vers cette région du monde au cours des prochains mois.
* * *
Vladimir Poutine annonce sa candidature à sa propre succession
Vladimir Poutine a indiqué vendredi dernier ne pas avoir “d’autre choix” que d’être candidat à la présidentielle russe de mars 2024 pour un cinquième mandat, près d’un quart de siècle après son arrivée au pouvoir et deux ans après le début de l’assaut contre l’Ukraine.
Le chef de l’État russe, qu’une révision constitutionnelle de 2020 autorise à être de nouveau candidat en 2024 et 2030, peut théoriquement se maintenir au Kremlin jusqu’en 2036, l’année de ses 84 ans.
“A une autre époque, j’ai eu d’autres pensées concernant cette question. Mais je comprends qu’aujourd’hui il n’y a pas d’autre choix possible. Je vais donc me présenter au poste de président de la Russie”, a déclaré l’intéressé, âgé de 71 ans, à l’occasion d’une cérémonie télévisée où il remettait des décorations.
Cette candidature ne devrait pas être beaucoup remise en cause. Le président de la chambre basse du Parlement, Viatcheslav Volodine, a réagi sur Telegram en insistant sur les “qualités uniques” de Vladimir Poutine, tandis que pour son homologue à la chambre haute, Valentina Matvienko, le chef de l’État “ne fuira jamais ses responsabilités”.
Il se trouve qu’aucun détracteur du Kremlin ne devrait être en mesure de se présenter au scrutin, les autorités écrasant l’opposition depuis des années. La quasi-totalité des opposants d’envergure, à l’exemple du militant anticorruption, Alexeï Navalny, ont été jetés en prison ou ont été poussés à l’exil.
La Commission électorale russe a annoncé que le scrutin se déroulerait sur trois jours, une pratique instaurée pendant la pandémie de Covid-19 mais dénoncée par l’opposition comme étant un moyen de faciliter les fraudes et d’obtenir les résultats attendus par le pouvoir.
Les symboles se multiplient puisque l’élection se déroulera du 15 au 17 mars, peu après le deuxième anniversaire du déclenchement de l’attaque contre l’Ukraine, toujours en cours, et à la veille du dixième anniversaire de l’annexion par la Russie, en 2014, d’un premier territoire ukrainien, la péninsule de Crimée.
L’élection aura d’ailleurs lieu dans les régions ukrainiennes occupées par la Russie, où la loi martiale est actuellement en vigueur. Alors que la Russie a revendiqué en septembre 2022 l’annexion de quatre nouvelles régions ukrainiennes qu’elle occupe partiellement (Donetsk, Lougansk, Kherson, Zaporijjia), la présidentielle doit aussi être le “point culminant de la réunification”, a estimé Valentina Matvienko, la présidente du Conseil de la Fédération, la chambre haute du Parlement russe.
Après une année 2022 marquée par des revers sur le front des combats et une volée de sanctions occidentales, Vladimir Poutine apparaît fin 2023 en meilleure posture avec l’échec de la contre-offensive entamée cet été par l’Ukraine, l’effritement du soutien financier européen et américain à Kiev et le redressement de l’économie nationale. La Russie a même prévu d’augmenter ses dépenses militaires de 67% en 2024, à quelque 30% de son PIB.
En visite dans le Golfe début décembre, le président russe poursuit son retour sur la scène internationale faisant fi du mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale lancé à son encontre. Il est plus que jamais en position de force, surtout que les soutiens à Zelensky fondent comme neige au soleil.
Mauritius Times ePaper Friday 15 December 2023
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