Un anarcho-capitaliste élu à la tête de l’Argentine, des violences raciales en France et l’extrême droite au pouvoir aux Pays-Bas
Eclairages
Par A. Bartleby
Ces dernières semaines ont été marquées par des basculements politiques vers l’extrême-droite en Argentine en Amérique latine, et en Europe – en France et aux Pays-Bas pour être plus précis.
Commençons par l’Argentine. Après des décennies des mouvements de gauche inspirés du péronisme, le pays vient d’élire un économiste anarcho-capitaliste à la tête du pays. En effet, l’élection de Javier Milei s’est inscrite dans un rejet massif des politiques économiques et monétaires qui ont mis l’économie du pays à genoux depuis plus de 30 ans.
Ultralibéral, anti-avortement, climatosceptique… Javier Milei, le nouveau président de l’Argentine. P – TF1 INFO
Milei, un économiste qui se décrit lui-même comme un anarchiste et un capitaliste, a été élu sur des promesses de rupture économique qui ont séduit la majorité des Argentins. Parmi ses propositions, il y a
- la politique radicale d’abandonner le Peso argentin en faveur du Dollar américain,
- une réduction drastique de l’intervention de l’Etat dans les affaires économiques, et
- une réforme visant à revoir l’application politique des valeurs égalitaires qui structurent la société argentine depuis plus d’un siècle.
Milei propose en réalité un “reboot” (redémarrage) de l’économie argentine par les principes directeurs des théories économiques de l’ultralibéralisme. Ces derniers ont, selon l’idéologie (par exemple, de l’école de Chicago), la capacité à restructurer les principes fondateurs de l’organisation sociale et politique d’une société donnée dominée par le libre jeu et le non-interventionnisme. En d’autres termes, c’est aux principes du jeu de l’économie de dicter les décisions politiques et non aux politiques de dicter à l’économie, et c’est au libre jeu de l’économie de dicter les formes institutionnelles que doit adopter l’État.
Il s’agit là d’une rupture radicale avec l’histoire même des mouvements politiques en Amérique latine, à une exception près : le Chili.
En effet, le 11 septembre 1973, une junte – dirigée par le général Augusto Pinochet avec l’appui des États-Unis – déposa le président socialiste élu Salvador Allende, qui préféra se suicider au Palais de la Moneda plutôt que de se laisser prendre.
Le gouvernement de Pinochet entama alors un vaste projet de réformes économiques fondé dans les principes articulés par l’économiste autrichien néolibéral Friedrich Hayek qui enseignait alors à l’Université de Chicago. Ces réformes prévoyaient la destruction de l’État social et son remplacement par un État qui opère selon les principes du marché libre, acceptant par exemple que l’exclusion et l’insécurité soient des éléments internes à toute société et que ce n’était pas le rôle de l’État de combler les inégalités sociales et économiques.
L’expérience chilienne servit alors de laboratoire aux politiques que Ronald Reagan et Margaret Thatcher allaient appliquer aux États-Unis et au Royaume-Uni respectivement. The rest, as they say, is history. (Le reste, comme on dit, appartient à l’Histoire.)
L’Argentine s’apprête ainsi à basculer dans un bouleversement profond si Milei réussit à appliquer son programme. Nous devinons que les troubles sociaux risquent de se multiplier et que Milei devra sans doute souvent avoir recours aux forces de l’ordre et à une application dure et rigide des principes de sécurité.
La montée des extrémismes en France et aux Pays-Bas
De l’autre côté de l’Atlantique, en Europe, la France et les Pays-Bas ont également été secoué par des évènements faisant la part belle à la montée des extrémismes.
En France tout d’abord, où la petite commune de Crépol a été secouée par le drame de la mort d’un jeune adolescent nommé Thomas. Ce dernier assistait à une fête de la commune qui a été interrompu par des délinquants venus des quartiers et des cités des villes voisines. Une bagarre s’ensuivit lors de laquelle Thomas fut poignardé.
Les réactions furent immédiates avec une levée de bouclier des mouvements d’extrême-droite qui ont riposté en attaquant des centres sociaux et des commerces appartenant à des Français issus de l’immigration. En fait, nous avons vu la symétrie directe de l’affaire Nahel qui avait provoqué d’importantes émeutes en juin de cette année.
Certains observateurs parlent d’un climat social qui ne cesse de se dégrader et qui glisse lentement vers une guerre raciale en France, une opposition banlieues/France profonde qui traduit elle-même une opposition Blancs/Arabes. Et il est clair que la gestion calamiteuse des émeutes de juin par le président Emmanuel Macron n’a pas aidé à calmer les choses.
C’est en tout cas l’extrême droite française qui en profite, et Marine Le Pen pourrait bien encore plus consolider sa base en vue des prochaines élections présidentielles.
En parlant de profiter du climat délétère, c’est Geert Wilders (un ami de Marine Le Pen) qui a réalisé un coup d’éclat en obtenant la majorité aux élections qui se sont tenues aux Pays-Bas. En effet, le PVV Freedom Party, le Parti pour la liberté (PVV) l’équivalent du Front National aux Pays-Bas, a réalisé un coup politique énorme cette semaine en remportant 37 des 150 sièges au parlement hollandais. Cela peut ne pas sembler énorme puisque ne constituant pas la majorité, mais ces 37 sièges placent le PVV en tête devant toutes les autres coalitions, lui permettant de former un gouvernement si d’autres partis acceptent de se joindre à eux.
Geert Wilders pourrait ainsi bientôt se retrouver à la tête d’une coalition qui va gouverner les Pays-Bas, avec un agenda économiquement et socialement de droite et avec une politique migratoire d’extrême droite.
Après la Hongrie, après l’Italie, c’est maintenant au tour des Pays-Bas de basculer. Et cela pourrait n’être que le début.
* * *
Linion Moris entre en campagne électorale et annonce ses deux PM
C’est l’évènement politique de la semaine à Maurice : Linion Moris a tenu une conférence de presse annonçant son entrée en campagne électorale et a présenté son équipe pour les prochaines échéances électorales.
L’exercice a fait grandement réagir sur les réseaux sociaux. Entre critiques et insultes, Linion Moris n’a pas échappé aux foudres et aux attaques, à cause notamment de sa proposition pour un partage du mandat à l’israélienne. Nous y reviendrons.
Mais par-delà les réactions majoritairement mitigées et/ou négatives, il faut avouer que l’exercice a surpris. Pourquoi annoncer une entrée en campagne électorale et présenter une équipe alors que la date des prochaines élections n’est pas encore connue ? Il est bien évidemment clair que le mandat de l’actuel gouvernement se terminera au début de novembre de l’année prochaine, ce qui fait que nous approchons rapidement des prochaines échéances électorales. Mais le coup de départ est loin d’être donné, ce qui explique que tous les partis aiguisent actuellement leurs armes, occupent le terrain et commencent les tractations qui leur permettront d’aligner leurs candidats dès que le feu vert sera donné.
Ce travail de préparation est extrêmement important et requiert plusieurs mois d’occupation du terrain et la multiplication des rencontres et des réunions. D’ailleurs tous les partis politiques traditionnels sont actuellement affairés à cela. Le MSM multiplie depuis quelques temps les réunions dans les circonscriptions alors que l’alliance PTr-MMM-PMSD continue, elle, sa tournée en organisant des congrès qui se termineront le 3 décembre prochain.
Ces partis ont également commencé à déployer leurs candidats potentiels dans les circonscriptions, notamment les nouveaux candidats qui n’ont pas encore d’expérience électorale. Commencer à occuper le terrain est ainsi essentiel pour les différents partis, et notamment pour les nouveaux partis qui n’ont pas de base électorale solide, comme pour LPM.
Mais occuper le terrain et entrer officiellement en campagne électorale, ce sont deux choses différentes. Dans le premier cas, c’est un exercice de prise de température qui permet des ajustements et des repositionnements critiques, alors que dans le deuxième cas, c’est une affirmation claire et précise sur les intentions et la stratégie d’un parti politique.
Est-ce que les membres de Linion Moris ont effectué ce travail de terrain leur permettant d’être absolument clairs dans leurs stratégies ? Sans doute oui, avec les moyens dont le parti dispose. Mais peut-être aussi qu’il y a du sens à se déclarer bien avant les échanges lorsque vous vous battez contre les grosses locomotives.
Pour l’instant, Linion Moris ne semble pas avoir les capacités d’aligner 60 candidats. Mais si le parti déclare déjà ses candidats à l’avance, cela permettra à ces derniers d’abattre un travail que les grands partis, eux, peuvent compléter rapidement par le simple fait de l’existence de leur organisation territoriale et structurelle.
Ainsi, cette entrée en campagne de Linion Moris ressemble bien plus à un exercice de structuration du parti qu’à une actuelle entrée en campagne. Et ce n’est pas une stratégie tout à fait inutile car c’est maintenant qu’un tel parti dispose de l’espace nécessaire pour manœuvrer. Nous le savons tous : plus on approchera des échéances, plus les Mauriciens mettront les petits partis et leurs alliances de côté dans leurs considérations politiques.
Nous voyons d’ailleurs cela à chaque élection. Les nouveaux partis attirent un certain intérêt au début d’une campagne électorale. Ils font un peu de bruit, surtout si leurs propositions sont en rupture avec les partis traditionnels. Mais cet intérêt ne dure jamais bien longtemps, et l’immense majorité de l’électorat se tourne très rapidement vers les partis traditionnels – ce qui fait que les nouveaux sont vite relayés en arrière-plan lors d’une campagne électorale.
Ainsi, Linion Moris semble avoir pris une initiative louable en annonçant dès maintenant son entrée en campagne électorale. Ses membres pourront aller sur les plateaux de radio en annonçant et en énumérant leurs propositions comme s’ils étaient en campagne, en faisant un peu le buzz et en forçant même les partis traditionnels à entrer dans leur jeu. Cette prise d’initiative ressemble ainsi également à une volonté de dicter le rythme politique.
D’ailleurs, l’annonce des deux PM et du partage à l’israélienne s’inscrit dans cette volonté d’ouvrir les débats en vue des prochaines élections.
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L’Arabie saoudite accueillera l’Exposition universelle en 2030
La nouvelle est tombée dans la nuit de mardi, l’Arabie saoudite accueillera l’Exposition universelle en 2030, devançant ainsi la Corée du Sud et l’Italie.
Il s’agit bien évidemment d’un événement de prestige, mais ce prestige démontre certaines choses. Cela fait des années que le royaume saoudien fait des efforts importants pour changer la perception du monde quant à son rôle dans le monde et durant ce siècle.
L’arrivée du prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed Ben Salmane (MBS) aux affaires a encore plus accéléré et renforcé cette volonté. En effet, ce dernier s’est démarqué dès le départ de ses prédécesseurs – tous les fils d’Abdelaziz ben Abderrahmane Al Saoud, le fondateur du royaume d’Arabie saoudite – de par sa jeunesse et de par le fait qu’il représente une nouvelle génération de Saoudiens dont les aspirations sont différentes de leurs aînés.
Ainsi, dès sa nomination comme prince héritier en 2017, MBS a tenu à se démarquer de ses aînés. Son ascension au poste de Premier ministre en 2022 lui a donné les outils et les moyens de mieux asseoir cette image de la transformation du royaume saoudien à travers différentes réformes. Par exemple, par des politiques hautement symboliques déjà, comme le droit de conduire et de voyager sans autorisation d’un gardien accordé aux femmes ou encore le refus de financer le wahabbisme à travers le monde. Mais, il s’inscrit aussi de manière bien plus profonde dans le paysage politique en réalité, avec un plan de transformation de l’économie saoudienne en anticipation du déclin du pétrole d’ici 2050.
Ce plan de transformation prévoit le développement des secteurs économiques puissants en Arabie saoudite, mais également un élargissement des intérêts géopolitiques et culturels du royaume. Ainsi, MBS n’a pas eu de mal à détourner le regard de l’allié historique américain en faveur des puissances émergentes comme la Chine et l’Inde.
Parallèlement, MBS n’a pas hésité à se lancer dans des conflits parfois ouverts contre le Qatar et l’Iran, qu’il considère comme des obstacles à la volonté hégémonique du royaume saoudien sur la région et sur l’Islam car c’est aussi cela qui est en jeu.
Malgré son modernisme, MBS reste un traditionaliste et se rend entièrement compte que la première force de l’Arabie saoudite, par-delà le pétrole, reste le fait que l’immense majorité du monde musulman regarde vers la Mecque, ce qui fait du royaume saoudien la voix du monde musulman.
MBS a parfaitement bien compris cela, d’où sa volonté de développement d’un autre modèle économique qui permettra au royaume d’être une puissance économique et technologique, tout en restant une puissance spirituelle pour une grande partie de l’humanité.
Ce rôle a d’ailleurs été parfaitement observé depuis le début de la guerre de Gaza. Les Saoudiens ont réussi le pari d’arriver à une trêve entre le Hamas et Tsahal sans pour autant antagoniser le monde musulman et maintenir sa politique visant à entretenir des relations autrement avec Israël.
Benjamin Nétanyahou avait déclaré qu’Israël se trouvait au milieu d’un processus de transformation du Moyen-Orient. Ce qu’il n’a pas précisé, c’est que cette transformation se faisait main dans la main avec MBS et le royaume saoudien.
Ainsi, MBS se positionne comme l’architecte et le bâtisseur de l’Arabie saoudite du 21eme siècle. Contrairement aux autres leaders mondiaux, il n’a que 38 ans et régnera sur son royaume jusqu’à sa mort. Il a ainsi le potentiel de devenir l’acteur majeur de la région pendant la majorité de ce siècle, et il a clairement décidé de le devenir.
L’attribution de l’Exposition universelle à l’Arabie saoudite représente une grande victoire symbolique pour ses ambitions, tout comme pourrait l’être également l’attribution de la coupe du monde de football bientôt.
* * *
Guerre de Gaza : les négociations s’accélèrent en vue d’une trêve étendue
Alors qu’un cessez-le-feu temporaire a pu être conclu entre Israël et le Hamas, en contrepartie d’un échange d’otages et de prisonniers, il semblerait que tout soit fait pour que ce cessez-le-feu continue encore quelque temps.
En effet, il devait durer quatre jours au départ et il est sur le point d’expirer à l’heure où nous écrivons. Mais les tractations avancent rapidement entre Israël, le Hamas, le Qatar et l’Arabie saoudite afin d’étendre la trêve et afin que plus d’otages et de prisonniers soient libérés.
Il se pourrait ainsi que la stratégie diplomatique que certains pays ont privilégié porte ses fruits, même si une trêve ne signifie pas une solution à long terme.
Il est intéressant de décortiquer les attitudes des deux côtés avec un Hamas qui déclare avoir réussi à faire plier Israël, alors que les dirigeants israéliens, eux, considèrent que les lourdes frappes sur Gaza ont forcé le Hamas à entrer dans une posture de négociation.
En réalité, les deux ont plus ou moins raison. Pour comprendre toute stratégie militaire, il faut regarder par-delà les enjeux humanitaires et éthiques et se concentrer sur les rapports de force dans ce qu’ils ont de plus crus et de plus de passionnés. C’est ainsi qu’un général et grand théoricien de la guerre s’est approprié la fameuse leçon de Clausewitz en commentant la situation actuelle à Gaza : cette guerre est la continuation de la politique mais par d’autres moyens. Et, ajoutons ceci, par des moyens extrêmement brutaux, voire excessifs.
D’ailleurs, nous le suggérions nous-mêmes dans un précédent billet sur une éventuelle réponse israélienne : il était clair que Tsahal ne penserait pas y aller par le dos de la cuillère. En d’autres termes, il se pouvait bien que la stratégie de l’armée israélienne ne fut jamais celle d’une occupation de Gaza, comme Benjamin Nétanyahou a pu le déclarer, mais une attaque tellement violente et meurtrière au point de forcer le Hamas à la table des négociations une fois qu’une certaine ligne rouge a été passée.
Cette ligne rouge : 14 000 morts du côté des Palestiniens. Soit près de 10 fois le nombre des victimes israéliennes. C’est le “prix” qu’a accepté de payer le Hamas avant de considérer une trêve et d’échanger des otages contre des prisonniers.
Est-ce que cela signifie que les frappes israéliennes ne reprendront pas ? Pas forcément, mais le moment d’accalmie actuelle est très certainement une opportunité que les acteurs du Moyen-Orient ne voudront pas laisser passer, notamment l’Arabie saoudite.
Ce pays s’est montré très prudent depuis le début de la guerre, dénonçant les frappes israéliennes mais sans forcément adopter une posture de non-retour vers les israéliens. Les enjeux actuels pour l’Arabie saoudite font qu’Israël pourrait devenir un partenaire clé dans le cadre de la modernisation mis en place par Mohammed Ben Salmane. D’ailleurs, les deux pays étaient sur le point de conclure un accord pour la normalisation de leurs relations diplomatiques, économiques et sécuritaires…
Cet accord, Israël en a également besoin puisque l’Arabie saoudite pourrait être l’acteur clé pour sa sécurité, et notamment pour contenir l’ennemi iranien.
Ainsi, il était farfelu de penser que Tsahal s’était lancé dans une opération militaire motivée uniquement par la vengeance. L’objectif était multiple dès le départ : produire une démonstration de force qui forcerait le Hamas à la table des négociations pour la libération des otages sans pousser la relation avec l’Arabie saoudite vers le point de non-retour.
Assistons-nous au début d’une autre phase du conflit ? Difficile de le dire pour l’instant, mais une chose est absolument sûre et certaine : Israël et le Hamas ont utilisé les Palestiniens de Gaza comme d’une matière d’échange afin d’arriver à un point de neutralité permettant à une négociation de commencer, et ni l’Arabie saoudite ni l’Iran n’y ont vu le moindre souci.
Malheureusement, nous assistons là à la triste histoire des Palestiniens, toujours utilisés par les pays voisins pour faire avancer leurs propres intérêts géopolitiques et souverains.
Mauritius Times ePaper Friday 1 December 2023
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