‘Pravind Jugnauth va éliminer toute personne impliquée dans des affaires qui affectent la crédibilité de la dynastie’

Interview : Jack Bizlall

‘Bérenger n’est pas un homme de pouvoir, c’est un homme du pouvoir’

Le renouveau, avec l’intégration de quelques jeunes au sein des partis politiques, a été catastrophique. D’une part, les citoyens ordinaires constatent l’imposition d’une routinisation des pratiques politiques abjectes au sein des institutions démocratiques (népotisme, entre autres). D’autre part, les partis politiques souffrent d’une absence de professionnalisation par rapport à l’activité politique (manque de connaissances théoriques dans tous les domaines – politique, social, culturel, économique, et manque de savoir-être pour communiquer avec les citoyens, entre autres). Par ailleurs, le principe démocratique est floué. Soit un parti politique admet à la tête le fils ou la fille du leader sortant (ressemblant ainsi à l’instauration d’une monarchie), ou ce sont des affrontements internes interminables entre anciens et jeunes. Jack Bizlall, fin analyste politique, explique l’effritement de l’engagement politique au profit de pratiques individualistes et le fossé grandissant entre citoyens ordinaires et partis politiques.

 

Mauritius Times : Les élections ne sont pas pour demain, même si le Gouvernement semble s’y préparer méthodiquement, mais il paraît – selon les échos provenant des milieux politiques – que les tractations sérieuses en vue des prochaines alliances électorales auraient déjà débuté. Qu’est-ce qui presse ?

Jack Bizlall : En principe je crois que les partis politiques de droite seront dans l’obligation de confronter les prochaines élections séparément sauf s’il y a un changement au sein du Parti Travailliste. Je ne vois pas le MSM et le MMM concrétiser une alliance préélectorale avec le PTr de Ramgoolam. Ce serait indigeste électoralement parlant.

La seule question pertinente est comme suit : serait-il possible que le MMM et le MSM concluent une alliance pour ces élections ? Dans l’absolu, tout est possible en politique, tout est acceptable en politique. Il y a toujours une justification pour s’associer en politique. En général, il suffit de tomber d’accord pour piller et ensuite partager les biens de l’Etat et les « donations » provenant des investisseurs et des accapareurs de biens publics. Nos politiciens ont partagé des milliards pendant ces 20 dernières années, à l’exception de certains qui ont conservé leur dignité sur le plan de l’honnêteté.

En principe, les élections générales ne seront fixées que quand les rapports de force entre les pro-Ramgoolam et les anti-Ramgoolam seront établis au sein du PTr, et en dehors du PTr. Des sanctions pénales contre Ramgoolam pour les poursuites engagées contre lui peuvent bien aider les anti-Ramgoolam. Il n’est pas interdit de révéler que certains au PTr souhaitent que ces sanctions soient appliquées le plus vite possible.

Mais le DPP et le judiciaire vont hâter ou retarder les choses, indépendamment des élections, certes, mais pas sans conscience de ce qui peut se passer pendant et après les procès. L’indépendance du judiciaire existe à Maurice. Mais montrez-moi un homme ou une femme totalement indépendant à Maurice, ou ailleurs.

Ce n’est pas le sort de Ramgoolam qui est en jeu, mais les pratiques politiques dont il a héritées. Pour qu’il y ait espoir de changement, il faut que les jeunes se démarquent des manipulateurs et des accapareurs. C’est crucial. J’ai publié cette semaine un opuscule à l’intention des jeunes, intitulé « C’est demain 2033 ».

Souvenons-nous du jeu de la comptine “« Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette ;
le premier de nous deux qui rira aura une tapette ! »

Les deux protagonistes, Ramgoolam et Jugnauth, risquent de rire jaune et ainsi les tapettes risquent de pleuvoir. Le dénouement de toutes ces histoires va faire du bruit, y compris l’affaire MedPoint. Mais, à ce stade, nous ne pouvons exclure une alliance électorale entre les deux sur la base d’un arrangement pour arrêter les poursuites.

Pourquoi la droite irait-elle aux élections séparément ? La classe politique de droite peut prétendre faire élire ses candidats en dehors des alliances électorales. Mais ce n’est pas certain dans le cadre des alliances électorales. Tel a été le cas en 1976. Donc, les alliances électorales se feront après les élections comme en 1976. Savez-vous qu’en 1976 il y a eu des négociations post-électorales entre le PTr et le PMSD, entre le MMM et le PTr et entre le MMM et le PMSD ? Ramgoolam père a opté pour le PMSD que parce que le MMM avait fait élire plus de candidats que le PTr.

* Et les partis de gauche ? Peuvent-ils prétendre faire bonne figure lors des prochaines élections ?

Certainement. Il ne faut pas croire que l’électorat est si naïf pour ne voter qu’à droite. Mais il ne faut pas être présomptueux pour croire qu’un parti de gauche peut battre les partis de droite, et les autres partis de gauche à la fois. Le drame se trouve dans cette stratégie paralysante.

Il ne sera jamais question de victoire électorale pour la gauche SANS rassemblement. Rassembler présuppose un comportement non sectaire. Il faut se débarrasser de tout dogmatisme, de tout comportement doctrinaire, de toute croyance que l’on peut faciliter un tel rassemblement avec des compromissions par un programme minimal ou de n’admettre aucun compromis avec un programme maximal, voire maximaliste, et encore moins avec des pratiques manœuvrières.

Il faut s’ouvrir aux opinions des autres et surtout sortir du raisonnement binaire, bicéphale, manichéenne…. Trois concepts philosophiques et politiques que les partis de gauche doivent maîtriser intellectuellement. Pour cela, il faut relire Marx et se documenter sur ce qui s’est passé entre 1848 (les révolutions en Europe) et 1917 (la révolution bolchevique) et surtout entre 1917 (la prise du pouvoir en Russie) et 1989 (la chute du mur de Berlin et l’implosion du communisme bureaucratisé.)

J’ai pris mes distances du marxisme pour me concentrer sur la pensée marxienne. Si on est un révolutionnaire pur et dur, on ne participe pas aux élections parlementaires. Il y a chez des jeunes qui s’engagent un certain gauchisme qu’ils revendiquent d’ailleurs, assez naïvement.

Permettez-moi de me référer aux commentaires de Marx contre Lassalle dans sa lettre du 13 octobre 1868 à J.B von Schweitzer : « Vous avez expérimenté personnellement l’opposition qui existe entre un mouvement de secte et un mouvement de classe. La secte cherche sa raison d’être et son point d’honneur, non pas dans ce qu’il y a de commun au sein du mouvement ouvrier, mais dans sa recette particulière qui l’en distingue.».

En ce qui me concerne, j’ai pris mes distances du parti politique, non sans raison. J’y reviendrai dans une publication avant les élections.

La gauche a une possibilité de faire élire ses candidats. Aucune organisation de gauche ne peut prétendre élire suffisamment de candidats pour constituer un gouvernement. Mais, avec un arrangement électoral, ils peuvent aller aux élections eux aussi séparément dans le cadre d’un programme politique non sectaire.

* On pourrait croire que les dés sont d’ores et déjà jetés pour une confrontation opposant les Travaillistes en alliance avec le PMSD contre un ‘Remake MMM-MSM’. Rien n’est définitif, paraît-il ?

C’est le scénario qui apparaît le plus plausible. Entre le PTr et le PMSD, c’est déjà un fait accompli. Ce n’est pas nouveau. J’espère que cette alliance ne compte pas reprendre le projet de République présidentielle.

Parlons de remake MMM-MSM. Ces deux partis politiques ont un passé commun entre 1971 (le 1 octobre 1971, Jugnauth quitte le parquet pour soutenir publiquement le MMM) et 1982 (les élections dites des 60-0). Il faudra répertorier les noms de toutes les personnes qui ont quitté ou qui ont été expulsés du MMM. Pour ma part, je compte rédiger la liste à partir de 1972 : un véritable massacre à la tronçonneuse.

De notre histoire à partir de 1965, je dirai que c’est Jugnauth père qui a tout gagné sur le terrain politique et c’est Jugnauth fils qui a hérité de tout sans faire aucun effort. Jugnauth père s’est permis de manipuler Ramgoolam père et fils, Duval père et fils, Boolell père et fils, Bérenger père et possiblement gendre et fille, etc., après avoir manipulé Bissoondoyal… A 85 ans il est encore au Gouvernement. Pensez-vous qu’il cessera de manipuler nos politiciens pouvoiristes ?

* Par ailleurs, la retraite au Réduit n’intéresserait pas Paul Bérenger, paraît-il, et c’est ce qui aurait bloqué la concrétisation d’une alliance MMM-MSM jusqu’ici. On affirme aussi qu’il attendrait le dénouement de l’affaire MedPoint pour y voir plus clair.

C’est ce qui se dit ces temps-ci. Parlons de Bérenger. C’est le plus grand tacticien politique de notre histoire. Mais il est très mauvais stratège. Il a l’habileté de toujours trouver des solutions à tous les problèmes du moment. Il donne l’air de se moquer du passé et de ne se soucier guère de l’avenir. Quand le MMM fit élire son candidat le 22 septembre 1970 à Triolet – après la mort de Lall Jugnauth (IFB) l’oncle d’Anerood Jugnauth – avec 71,5 % du suffrage contre le candidat travailliste, il sauta sur l’occasion pour opter pour la voie électoraliste.

A partir de 1976, il avait tout renié du contenu du programme MMM « Pour une Ile Maurice Possible » publié le 1 août 1970. Ensuite, lentement et sûrement, il avait opté pour un retour au pragmatisme politique. C’est une doctrine qui place la réalité et l’action comme moyens pour réussir en politique, considérant que la réussite pratique est le seul critère de vérité.

Il fallait tout repenser au MMM après 1976, et nous n’étions pas en mesure de le faire. Il avait bloqué la superstructure idéologique et la structure organisationnelle pour arriver à ses fins.

Avant d’entreprendre ses études universitaires il avait peur de ce qu’il appelle « la réalité électorale, à Maurice » et il serait traumatisé par les événements entre 1965 et 1968. Il existe d’ailleurs un texte à ce sujet qui avait été publié dans l’express, si ma mémoire ne me fait pas défaut.

Bérenger a la mauvaise habitude d’écouter uniquement ceux qui lui disent ce qu’il veut entendre. J’ai été en liaison téléphonique avec Madan Dulloo le jour de la cassure. C’était en mars 1983. Il a écouté Kasenally interprétant mal la Constitution. Par ailleurs, il utilise les gens uniquement quand ils sont de quelque utilité. Il avait blessé son conseiller de longue date, Lutchmeenaraidoo, et c’est ce dernier qui avait poussé Jugnauth à « casser » le MMM.

* Pour avoir été témoin de la manière dont Bérenger réfléchissait et agissait durant une bonne partie de sa carrière politique, le voyez-vous tenté par une lutte à trois, avec lui comme candidat au poste de Premier ministre ?

Il s’est présenté comme Premier ministre aux élections de 1983 et le MMM a été seul contre tous. J’ai suivi ces élections avec attention sous le kiosk de la Cité Vallijee pendant une grève de la faim et ensuite pendant l’occupation de l’usine Retreaders. C’était catastrophique pour le MMM. Bérenger a été battu à Quatre Bornes. Il lui manquait 33 votes pour battre Raj Veerasawmy.

Le problème avec Bérenger, c’est que personne ne lui fait confiance. Le jour qu’il va quitter le Gouvernement en 1983, il me téléphone tôt le matin pour m’annoncer qu’il va quitter sa lettre de démission à cause du renvoi de Gaëtan Essoo comme directeur de la MBC, et qu’il ira ensuite à la GWF. Je lui réponds « Mo a truv twa lor lari ». A chaque fois qu’il s’est trouvé en difficulté, il a pris contact avec les anciens du MMM. En 1988, nous étions ensemble (MMM, OMT-FNAS, FPU et GWF) à fêter le 50ème anniversaire du 1er mai. Les photos de cette manifestation existent pour prouver ce que j’avance.

Le paradoxe avec Bérenger, c’est qu’il n’est absolument pas rancunier mais il éveille la rancune chez tous ses anciens amis et collaborateurs. J’ai appris comme vous qu’il pense aller seul aux élections. Mais, rassurez-vous. En vérité, il ne sait pas lui-même avec qui il s’associera aux prochaines élections. Laissons-le vivre sa vie. Il n’est pas innocent, loin de là… Mais il n’a jamais représenté un danger pour notre pays sauf en 2014 avec sa République présidentielle. Ce n’est pas un homme de pouvoir, c’est un homme du pouvoir.

* Les tracasseries que Paul Bérenger a rencontrées au sein de son parti de la part des seconds couteux ces derniers mois ont sans doute entaché son image en tant que leader incontesté. Mais le MMM, avec Bérenger à la tête, demeure un puissant parti politique (et incontournable, dit-il) malgré décembre 2014, malgré aussi le PMSD de Xavier Duval, le Mouvement Patriotique ou le Mouvement Libérateur. Qu’en pensez-vous ?

J’ai côtoyé les sympathisants du MMM lors des élections partielles de Quatre Bornes en 2017. Croyez-moi, ce sont d’excellents activistes mais pas formés. Même les plus éclairés sont dans le noir. La liste des nouveaux élus du MMM au CC de ce mouvement est révélatrice de cette situation au MMM. J’apprends que Sheila Bunwaree s’occupe de la formation. Avec tout le respect que j’ai pour Bunwaree en tant qu’universitaire, elle devrait, je crois, concéder qu’elle manque de formation politique elle-même.

La situation au MMM aujourd’hui est pire que ce qu’elle était en 1976. J’attends de voir comment ce mouvement qui jouit d’une certaine crédibilité sur le plan moral, va se reconstruire d’ici les prochaines élections.

* Le Parti Travailliste, avec Navin Ramgoolam aux commandes, dit-on, demeure aussi un parti incontournable, et sans challenger direct, Ramgoolam est bien parti pour une longue carrière au Guy Rozemont Square, non ?

Voila quelqu’un qui dit avoir reçu des dizaines de millions pour construire un nouveau siège pour le PTr, et qui se retrouve là-bas dans un bâtiment en ruine, reflet du PTr lui-même.

Ramgoolam manque la maîtrise de soi. Il ne fait rien de valorisant et, s’il lui arrive de faire quelque chose, ce n’est certainement pas avec désintéressement. Il n’a pas l’humilité de se retirer alors que tout le monde le souhaite. Il va, par tous les moyens, essayer de s’imposer. Comme Premier ministre, il a été battu en deux occasions aux élections générales. Il n’y a jamais deux sans trois, se dit-il sans doute.

Bérenger est sincère mais il change de sincérité très souvent. Jugnauth est lui aussi sincère, mais uniquement quand ses intérêts ne sont pas en jeu. Ramgoolam pense que le public est obligé de croire qu’il est sincère parce qu’il est le fils de son père et parce qu’il a le facies d’Arsène Lupin. Même quand il nous raconte des histoires invraisemblables comme l’affaire de Roches Noire et les Rs 220 millions dans ses coffres.

Longue carrière vous dites au Guy Rozemont Square ? Je ne lui souhaite pas de rester là-bas longtemps. Ce bâtiment risque de l’ensevelir au sens propre comme au sens figuré.

Je lui ai écrit une lettre ouverte (publiée par Le Mauricien) en date du 23 septembre 2013 en ces termes :

« Vous appliquez une politique de « laisser faire » anarchique qui est en train d’exproprier les citoyens de la République de Maurice de leur pays et vous êtes ainsi le vecteur de la fracture sociale qui s’installe insidieusement dans le pays.

Quand nous avons des enfants, il nous faut nous engager à construire un monde meilleur pour eux et pour leurs enfants, et les enfants de leurs enfants… Croyez-moi ou pas, tous les enfants sont mes enfants.

Il existe dans ce pays un accaparement généralisé, conspirateur, frauduleux, corrupteur qui s’infiltre dans nos mœurs et dans notre culture au point que les tenants du pouvoir économique, politique, étatique et mafieux s’accaparent de tout, s’enrichissent à un degré inimaginable laissant les autres vivre dans la pauvreté et la promiscuité les plus dévastatrices pour nos enfants et pour la sécurité des citoyens. Chaque jour des crimes de toutes sortes sont perpétrés contre les enfants, et l’accaparement est tel que même les corps des enfants sont accaparés criminellement par des adultes détraqués. Garçons comme filles.

Quant aux citoyens ils sont de plus en plus individualistes et adeptes de la soumission volontaire. Vous laissez pourrir notre société. Cela ne vous touche point en tant que dirigeant. Je n’ai pas de commentaires à faire sur votre attitude en tant qu’humain. Votre miroir, comme celui de Dorian Gray, doit vous interpeller chaque jour.

Le racisme pratiqué par les surhommes, c’est-à-dire les puissants, s’installe donc dans notre pays au point que j’affirme que nous sommes depuis quelques années devenus une société ségrégationniste. » 

J’ai tout dit le concernant. Passons à d’autres choses.

* Qu’en est-il du MSM et du fils de Sir Anerood Jugnauth ? Sans l’épée de Damoclès qui reste suspendue au-dessus de la tête du leader du parti avec l’affaire MedPoint, croyez-vous qu’il soit possible pour que le MSM puisse remonter la pente avec toute cette série d’affaires impliquant les Sobrinho, Soodhun, Yerrigadoo, et tant d’autres du parti ou proches du pouvoir ? Il y aurait leurs fréquentations douteuses avec des trafiquants de tout acabit qui ont entaché son image depuis le début de son mandat ?

Pravind Jugnauth va se débarrasser de toute personne qui ne soutient pas la dynastie Jugnauth sans conditions. Il va éliminer toute personne impliquée dans des affaires qui affectent la crédibilité de la dynastie.

Il vient de proposer un budget qui ne parle pas de macro économie et qui utilise des concepts électoralistes pour faire taire ses opposants. Il nous rend ce qu’il a pris de trop. Il nous donne ce que nous aurons à rembourser plus tard. Il est dans la répétition propositionnelle, dans des dépenses gargantuesques, dans l’«investment swapping », dans l’économie hors production soutenue par l’endettement outrancier des ménages…

Il a proposé un « split budget ». L’expression « I want my split » est traduite en français par « je veux ma part de gâteau » Quand chacun séparément se sent subjectivement satisfait, Jugnauth croit qu’objectivement ce qu’il fait ou ne fait pas passera.

Vous parlez de MedPoint en termes de cas devant le Privy Council et d’accaparement de l’argent public. Le vrai scandale se trouve être l’état d’abandon de cette clinique.

La dernière fois que j’ai visité les lieux je suis entré librement dans la cour pour prendre des photos.

* Nous avons connu deux générations d’hommes (et de leaders) politiques depuis les années ’40 à ce jour, et la toute dernière – plutôt technocratique que… — n’a pas été vraiment encourageante. Il y a même eu de grosses déceptions. Vous êtes-vous posé la question : à quoi pourrait ressembler le monde politique de demain ?

Question intéressante. C’est justement dans le cadre de cette réflexion que j’ai publié un opuscule à l’intention des jeunes. J’ai ouvert 52 champs d’investigation et d’engagement. J’ai proposé la méthodologie de l’abstraction comme moyen de réflexion et de travail. J’y explique ce que c’est et je leur dit que ces 52 sujets vont nous pousser à nous tourner vers le futur.

La méthodologie a été expliquée. Elle passe par : les Différentiations ; l’Abstraction ; la Compréhension avant l’émission des Propositions. Ce qui est important, c’est l’abstraction. L’abstraction propose un isolement par la pensée d’un des caractères d’un objet (il faut aussi faire abstraction des choses non importantes) et formuler l’idée ainsi isolée.

* Les conclusions du rapport de la Commission Lam Shang Leen sur le trafic de drogue seront connues incessamment, mais déjà le ministre Mentor s’est prononcé en faveur de la réintroduction de la peine de mort pour les trafiquants et contre la révision de la « sentencing policy » contre ceux accusés de possession de drogues. A-t-il raison ?

Maurice a obtenu le statut de pays ayant aboli la peine capitale pour tous les crimes en 1995. Dans les pays de l’UE, les pays qui ont ratifié la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (la CEDH ou Convention européenne des droits de l’homme) et qui ont, en sus, signé le protocole additionnel n°13, de 2002, ne peuvent pas réintroduire la peine de mort.

En effet ce protocole dans son article 1 dit que « la peine de mort est abolie. Nul ne peut être condamné à une telle peine ni exécuté », et son article 2 : « aucune dérogation n’est autorisée aux dispositions du présent Protocole », ce qui signifie que la peine de mort ne peut être réintroduite, même en temps de guerre.

Dans un opuscule que j’ai publié intitulé « Un Fond Commun de Civilisation », je dis que notre civilisation a besoin de se construire et d’avancer constamment. On ne peut pas retourner à la peine de mort. Ce serait le plus grand des reculs pour notre société.

* Il y a aussi la question de la criminalité, en hausse selon le leader de l’opposition, et celle concernant l’indice de confiance de la police qui s’est récemment fait remarquer par des « infightings » au plus haut niveau de l’échelon. Par ailleurs, au Parlement, le ministre mentor a déclaré l’institution d’une enquête par un ancien juge pour faire la lumière sur l’affaire de saisie de drogue effectuée en avril 2017, et Xavier Duval a réclamé une Commission d’enquête sur les causes de la criminalité – pas sur la police. Qu’en pensez-vous ?

Le populisme est la voie la plus dangereuse pour notre société. Vous avez là un bel exemple de populisme de droite. Que peut faire une Commission d’enquête à propos des sujets d’ordre criminel ? Où est la police ? Où est le DPP ? Que fait notre judiciaire ?

On nomme une Commission d’enquête sur les carences de nos institutions et NON sur des sujets qui relèvent de leurs responsabilités.

Lors des prochaines élections, il faudra rassembler tous les intellectuels qui pensent que notre société doit être gérée autrement.

 


* Published in print edition on 20 July 2018

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