Israël durcit sa posture

Eclairages

Par A. Bartleby

Alors que les appels à la négociation, à l’ouverture d’un corridor humanitaire et au cessez-le-feu se multiplient, Benjamin Netanyahou a affirmé qu’Israël n’accepterait aucun cessez-le-feu dans les conditions actuelles.

Cela a fait suite au rejet d’une proposition de l’ONU appelant à un cessez-le-feu, et la majorité des pays membres ont voté en faveur de cette proposition. Mais les États-Unis ont usé de leur véto afin de bloquer la résolution.

Il est ainsi clair que les négociations et la situation sont dans une impasse qui ne risque pas de se résoudre de sitôt. Mais sommes-nous forcément en face d’un statut quo qui s’est cristallisé et qui est parti pour durer ?

Difficile de l’affirmer pour l’instant tant la situation semble volatile et précaire.

Israel-Hamas War. P – Times Now

Ce qui est sûr, c’est que le gouvernement israélien reste extrêmement timide quant à une offensive massive au sol. L’armée israélienne continue de bombarder Gaza avec des intrusions timides des chars et de l’armée de terre dans la bande, mais nous ne voyons toujours pas l’opération de grande envergure qu’avait annoncée Netanyahou au lendemain de l’attaque du Hamas.

Nous constatons en fait que la situation est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît du côté des décideurs israéliens. Il est clair que Benjamin Netanyahou se doit d’intervenir dans Gaza afin de tenter de récupérer les otages pris par le Hamas. La pression populaire ne cesse de monter contre lui concernant cette question, et il ne pourra pas résister encore bien longtemps aux demandes du peuple israélien.

Mais parallèlement à cela, il sait parfaitement bien qu’une intervention dans Gaza est un piège qui risque de se refermer sur l’armée israélienne. D’ailleurs, tous les spécialistes de la stratégie militaire le disent : entrer dans Gaza reviendra à mener une opération suicidaire pour les Israéliens. En effet, le Hamas connaît parfaitement bien le terrain de Gaza et est parfaitement préparé à mener une bataille sans merci et d’une dureté absolue contre les Israéliens, et les pertes d’un côté comme de l’autre seront immenses.

C’est sans doute pour cela que Netanyahou continue de pilonner Gaza par le ciel, espérant mettre à bas les infrastructures du Hamas et démoraliser ses troupes, sans considération des pertes en vies humaines du côté des civils. Les ONG estiment, par exemple, que le nombre de morts du côté de Gaza aurait franchi la barre des 8000.

Ce chiffre a de quoi donner froid dans le dos, et la question d’une ligne rouge qu’Israël ne devra pas franchir reste posée.

D’ailleurs, il est clair que les Israéliens sont conscients du fait qu’ils marchent sur des œufs. La rhétorique même des diplomates israéliens a radicalement « shifté » depuis quelques jours, l’ambassadeur d’Israël aux Nations-Unies se permettant même de porter une étoile de David lors d’un discours faisant l’apologie des méthodes militaires actuelles en citant la situation des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.

Cet amalgame est profondément dangereux et montre que le gouvernement israélien est dos au mur sur la scène internationale. Plusieurs pays appellent ouvertement à rompre des relations diplomatiques avec Israël en n’hésitant pas à appeler à ce que Benjamin Netanyahou soit poursuivi pour crime de guerre par la Cour pénale internationale.

En réalité, seul l’allié américain semble tenir ferme derrière Israël. Mais pour encore combien de temps ?

Dans un ouvrage extrêmement important, John Mearscheimer et Stephen Walt (professeurs de sciences politiques à Princeton et à Harvard respectivement) avaient étudié le rôle des groupes de pression proches d’Israël dans les mécanismes de décision du gouvernement américain. Ils avaient conclu que toute la politique étrangère américaine au Moyen-Orient était influencée et orientée par les intérêts d’Israël. Ils affirmaient même que ces lobbies étaient devenus tellement puissants qu’aucun président américain ne pourrait être élu sans leur soutien.

Ceci explique peut-être cela.

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189eme anniversaire de l’arrivée des travailleurs engagés

Émancipation : un long chemin a été parcouru, mais il reste encore tant à faire

Nous avons commémoré ce jeudi le 189eme anniversaire de l’arrivée des travailleurs engagés à Maurice.

Cette commémoration, tout comme celle du 1er février pour l’abolition de l’esclavage, relève d’une importance symbolique, historique et politique majeure pour notre pays. En effet, nous ne devons jamais oublier que c’est dans l’exploitation de l’homme par l’homme que s’est construite la Nation mauricienne.

Le colonialisme fut exactement cela : la mise en place d’un système d’exploitation de la force du travail humain par le capital colonial, en commençant par l’esclavage et ensuite par l’engagisme. C’est comme cela que les grands domaines sucriers furent établis, et c’est comme cela que les grands conglomérats (aujourd’hui l’un des piliers de l’économie mauricienne) furent fondés.

Mais c’est également là que la construction de l’État postcolonial prend tout son sens. En effet, l’indépendance de Maurice, acquise du processus de décolonisation résultant de l’effondrement de l’Empire britannique au sortir de la Seconde Guerre mondiale, n’a pas d’autre sens et d’autre fonction que la promotion de la justice sociale et la rectification des injustices de départ.

C’est d’ailleurs le chantier auquel se sont attelés les gouvernements qui se sont succédé depuis 1968. L’éducation gratuite, la santé gratuite, l’élargissement des aides sociales et l’approfondissement du modèle social ont toujours été les priorités en matière de politiques publiques, notre modèle économique libéral nous permettant une production soutenue de la croissance. Tout le fondement du progrès mauricien se trouve d’ailleurs là, dans cette alliance entre le libéralisme économique et la construction des institutions du “Welfare State”.

La paix sociale et la pérennité de notre vivre-ensemble se trouvent également là car nous n’avons jamais eu à Maurice la volonté de la vengeance postcoloniale. C’est aussi ce qui fait le succès de notre pays, et ce qui a fait que nous n’avons pas suivi des exemples comme le Zimbabwe. La voie du progrès ne se trouve ainsi pas dans la vengeance, mais dans l’émancipation.

L’émancipation requiert la mise en place de processus permettant l’empowerment ou l’autonomisation des dominés de l’histoire. Et l’empowerment de ces dominés doit avoir lieu dans un contexte qui leur donne des accès égaux à l’accumulation du capital, à la création de l’entreprise, à des carrières dignes et grandioses, et à l’épanouissement culturel et social.

De ce point de vue, nous faisons deux constats : un long chemin a été parcouru depuis 1968 mais il reste encore tant à faire. 

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Chandler Bing est décédé

Matthew Perry, l’acteur jouant le rôle de Chandler Bing dans la série iconique ‘Friends’, est décédé cette semaine à l’âge de 54 ans. Il a été retrouvé noyé dans son jacuzzi dans sa demeure de Beverly Hills.

Bien qu’ayant joué également dans le cinéma et ayant eu des rôles importants, Matthew Perry est et restera à jamais connu et reconnu pour son rôle dans la série télé ‘Friends’. Cette sitcom iconique, qui a duré 10 saisons, était devenu un tel phénomène global que des théoriciens des “Cultural studies” y ont même consacré des ouvrages à la série.

Certains affirment même que ‘Friends’ a défini une génération et a participé à transformer le regard porté sur les productions télévisuelles, bien avant la révolution des plateformes de streaming qui ont redéfini l’accès aux plages et la manière dont les films sont produits et visualisés.

‘Friends’ n’était pas sans ses critiques, notamment avec le fait que le casting était composé majoritairement de blancs, et que les minorités n’y avaient aucune réelle visibilité. Il faut avouer que cette critique tient même si ‘ Friends’ a été produit à une époque où les questions de représentation n’étaient pas encore aussi prédominantes dans les productions télévisuelles.

Mais l’immense succès de ‘Friends’ et le fait que cette série continue à être rediffusée dans le monde entier, vient surtout de l’universalité des symboles et des situations. La série nous montre l’évolution d’un groupe de jeunes amis qui apprennent à devenir des adultes, avec toutes les joies mais aussi les petits soucis que cela implique.

Matthew Perry jouait lui le rôle de Chandler Bing, un jeune cadre drôle et sarcastique mais tellement attachant également. Mais par-delà ce rôle, l’acteur s’était surtout fait remarquer parce qu’il fut l’une des premières célébrités à parler ouvertement de ses problèmes d’addiction et de son combat pour la sobriété.

Il avait ainsi brisé un tabou qui a permis d’en faire un sujet sur lequel nous devons discuter afin de pouvoir mieux aider les gens pris dans cette spirale. Le guitariste Eric Clapton en avait également fait de même, allant jusqu’à ouvrir un centre de réhabilitation à Antigua.

Nous ne connaissons pas encore les causes du décès de Matthew Perry, mais tout laisse à penser qu’il avait peut-être rebasculé dans la spirale de l’addiction. Il laisse derrière lui une armée de fans profondément attristés par son départ. Les épisodes de ‘Friends’ où il faisait tant rire seront désormais emprunts d’une nostalgie certaine.

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Gestion désastreuse des quotas de thon de la CTOI: Incompétence ou agenda caché?

Ce sujet est presque passé inaperçu à l’Assemblée nationale la semaine dernière. Il est néanmoins extrême important.

Le leader de l’opposition Xavier-Luc Duval, dans son intervention sur le “Fisheries Bill”, a expliqué comment la gestion des quotas pour la pêche du thon dans nos eaux territoriales pourrait mettre le “seafood hub” dans une situation extrêmement compliquée.

En effet, le ministère en question, sans donner la moindre explication et sans raison aucune, a décidé de changer de méthode d’attribution des quotas pour les acteurs du “seafood hub” passant d’allocations annuelles à des allocations mensuelles.

La conséquence de ce changement de politique est que les opérateurs du secteur n’ont plus de visibilité sur la pêche du thon. L’allocation des quotas sur une base annuelle permettait aux opérateurs de planifier leur pêche et de s’adapter aux aléas de la mer, le thon n’étant pas forcément disponible pour la pêche à volume égal tout au long de l’année.

Le passage à une allocation mensuelle ne permet aucune visibilité et aucune planification, ce qui a pour conséquence une diminution drastique des volumes de pêche, avec le risque de pénurie pour le marché local.

Plus même, l’allocation annuelle permettait une visibilité pour tout le secteur thonier. Il faut savoir que la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI) allouent les quotas aux différents pays de l’océan Indien sur la base des précédents de pêche et sur la base des volumes accumulés. Ainsi, une diminution des volumes pêchés pourrait entraîner une réduction du quota annuel alloué à Maurice.

Par exemple, selon les dires du leader de l’opposition, la CTOI a alloué un peu plus de 10,000 tonnes de thon à Maurice pour l’année 2023. De ces quelques 10,000 tonnes, seulement 5,500 tonnes auraient été pêchées à la fin du mois d’octobre. Est-ce que les opérateurs ont les moyens de pêcher 4,500 tonnes en deux mois ? Non !

Une diminution des quotas par la CTOI pour l’année prochaine n’est donc pas impossible. Cette situation serait dramatique pour le “seafood hub” en entraînant une réduction drastique de l’activité économique, avec des pertes d’emplois et une diminution de l’investissement à prévoir.

Le ministre est-il au courant de cela ? Il ne peut pas ne pas l’être ? Pourquoi ne remédie-t-il donc pas à la situation ? La question est posée.


Mauritius Times ePaper Friday 3 November 2023

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