Diaspora indienne et langues

Une sensibilisation à la réalité sociale et politique est d’une importance capitale pour la diaspora. Et cela, sans attendre un défi, une menace

Par Nita Chicooree-Mercier

En ce temps de commémoration des identités et cultures, la créolité est d’actualité, et l’héritage indien dans sa diversité ethnique et religieuse s’annonce comme chaque année. Les deux termes qui identifient les descendants depuis des siècles trouvent leur origine dans la langue des navigateurs et colons portugais. Des termes étrangers au vocabulaire des principaux concernés qui ont perpétué, malgré eux, une définition identitaire importée.

Indian Diaspora. Pic – SoundCloud

Du Brésil aux Antilles aux îles de l’océan indien, le concept de créolité a gagné du terrain pour inclure une vaste diaspora issue d’une rencontre forcée et tragique entre colons européens et ceux arrachés du continent africain. C’est en toute légitimité que les générations d’aujourd’hui se penchent sur un héritage commun qui a vu naître langues, chants, danses et coutumes engendrés par ces mélange et cohabitation ethniques et culturels. L’empreinte culturelle de l’héritage colonial est restée tenace et intacte au cours des siècles.

C’est un fait que les descendants, qui revendiquent une nouvelle identité, parlent avec les mots, suivent la religion et le code vestimentaire de leurs anciens maîtres jusqu’aujourd’hui. C’est dire la puissance de l’assimilation et de la domination sur les peuples colonisés. Au fil du temps, le discours universitaire émanant des pays colonisateurs, suivi par les chantres de la créolité dans les îles, s’est autorisé à incorporer toutes les composantes de la population sous la bannière de la ‘créolité’, selon la définition du dictionnaire.

Cette approche a plutôt bien réussi dans les sociétés où l’assimilation s’est imposée par le biais de l’éducation et des médias consentants, notamment dans les territoires français d’outre-mer.

Si la force de l’assimilation n’a laissé aucune marge de manœuvre aux anciens colonisés, tant étaient-ils coupés de leur pays d’origine en Afrique, la tentative de calquer le même discours de la définition identitaire aux autres ethnies et cultures a échoué, d’autant plus que le lien avec l’Inde, notamment, a toujours été soigneusement entretenu. Ces groupes entendent bien s’arroger le droit de se définir selon leur propre logique interne tout en reconnaissant le dynamisme d’une langue créole qui s’est imposée par sa vitalité et nouveauté, comme une langue commune.

Cependant, une vision romantique du kreol comme étant une langue riche, promue dans un certain discours, est loin d’être partagée par tout le monde. C’est aller vite en besogne car l’évolution d’une langue se fait dans le temps, comme chacun le sait.

Une langue, étant la colonne vertébrale d’une culture, ceux issus de l’immigration indienne devraient impérativement s’interroger sur l’avenir de l’apport de leur langue d’origine dans l’héritage culturel que leurs ancêtres ont perpétué dans les pays d’adoption. Quelle est la valeur d’une culture vidée de sa langue ? Cette question concerne aussi bien les groupes d’origine tamoule et gujarati fortement assimilés par la langue française dans les îles françaises que ceux qui vivent aux Antilles anglaises et aux Seychelles et à Maurice.

L’avenir du gujarati dans la jeune génération dans le milieu commerçant est incertain, à la Réunion, par exemple. L’enseignement de la langue tamoule est limité à une minorité pour prétendre l’élever au statut d’une langue vivante pratiquée par ses membres au bout de plus de deux siècles d’assimilation bientôt. De même, le hakka est à peine parlé par la jeune génération des gens d’origine chinoise. La survie de la langue ‘arabe’ des pays d’Afrique du Nord en Europe est en partie due à ses 40 à 50 ans d’existence.

Maurice est un exemple unique d’un pays indépendant avec une forte représentation des politiciens d’origine indienne qui a conservé l’enseignement des langues indiennes dans le système scolaire, mais où le kreol a fait reculer le bhojpuri, le tamoul et le hakka sans qu’aucune autorité interne à la communauté n’ait jugé utile de soulever les bonnes questions. Read More… Become a Subscriber


Mauritius Times ePaper Friday 28 October 2022

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