Alimentation, une autonomie souhaitable

Par Nita Chicooree-Mercier

Le gouvernement indien, par la voix de son premier ministre, lance un appel aux Indiens riches de célébrer les mariages en Inde, ce qui permettra de dépenser localement en termes de nourriture, de service traiteur qui compte des millions de petits catering businesses, les entertainment groups avec musiciens et danseurs. Et bien évidemment, en plus de réduire l’empreinte carbone, c’est l’économie locale qui en tire les bénéfices.

En ce temps d’inflation, de vie chère et d’une récession menaçante, si les performances économiques d’une Amérique endettée jusqu’au cou se mettent à marcher au ralenti à l’image de son président, le conseil du premier ministre indien tombe à pic.

Dans une rencontre avec les jeunes, il n’a pas hésité de faire un rappel au bon sens et au patriotisme économique : Regardez ! Tout ce que vous avez sur vous, à commencer par le téléphone, est importé, leur a-t-il lancé.

Fort heureusement, les festins qui accompagnent les mariages indiens à l’étranger restent indiens, plats végétariens soigneusement préparés avec des épices divines. Il semblerait que la Turquie a créé de bonnes affaires en misant sur les Indiens en quête d’un cadre dépaysant, et aussi le bling-bling de Dubai, avec un budget faramineux.

Les riches Indiens gagneraient à choisir avec plus de sagesse la destination de leurs grandes dépenses. En dehors des mégapoles à dimension surhumaine et hyper polluées, le sous-continent indien dans toute sa variété ne manque pas d’attrait. Si une fête grandiose dans le cadre enchanteur du Cachemire court le risque de tourner au vinaigre, il y a les palais somptueux du Rajasthan et les régions du Nord-Est qui ne demandent qu’à booster leur économie.

La Chine prend conscience de l’effet dévastateur sur la santé de la nourriture transformée depuis que les grandes enseignes occidentales ont pignon sur rue et, que le gras, le salé et le sucré en plus des pesticides font mauvais ménage dans le foie et les artères des consommateurs.

Ce n’est pas que l’agriculture chinoise est dépourvue de pesticides, comme en Inde d’ailleurs. C’est que les bouillons aux légumes mi-cuits tendent à disparaître des tables surtout chez les jeunes cadres hyper pressés au quotidien. Passons sur les dommages collatéraux crées par les boissons sucrées importées du pays de l’Oncle Sam.

Visionnez le petit-déjeuner traditionnel chinois, varié selon les régions, mais essentiellement composé de bouillons (indispensable pour fluidifier le transit des aliments), galettes aux légumes ou bol de riz et thé nature remplacés par toasts avec beurre et confiture, pire encore, café nature ou café au lait sucré (un excitant et une agression gratuite faite au cœur), vous avez les dégâts en 3D.

Comme dans bien d’autres contrées, le petit-déjeuner est traditionnellement salé. En Inde, au roti bhaji et dhal, l’héritage britannique introduisit le thé au lait et sucré à donner la nausée, héritage malheureux qui s’est aussi invité à Maurice.

Le lait mélangé au café et au thé est fortement déconseillé, autant les prendre nature. Le dithé pire, comme le sucre roux, attire un mépris injustifié de la part de nos compatriotes, et c’est même un signe anachronique de pauvreté.

Si vous dites aux visiteurs de passage vers trois heures de l’après-midi qu’ils auront une tasse de thé (on ne prive pas les Mauriciens de leur thé chéri, il y en a qui voyagent avec leur paquet de thé) et du manioc bouilli agrémenté d’un chutney de cotomili, eh bien, ils vous regardent, les yeux écarquillés, un peu étonnés.

Leur offrir un thé sans lait est un affront aux règles de l’hospitalité. Rassurez-vous, même si les gâteaux et les biscuits achetés au supermarché ont acquis un certain prestige, les Mauriciens tiennent aux gâteau patate et, le manioc, autre produit naturel, est prisé lorsque le temps libre d’un week-end le leur permet.

Le petit-déjeuner a connu un bouleversement qui n’a guère plu à notre foie, aux intestins et aux artères. Le dipain diber a écarté sans ambages le roti et légumes que les femmes avaient le temps de préparer autrefois. Confitures de toutes sortes et les jus de fruits sucrés apportent de la modernité et de la couleur sur la table au point d’oublier qu’un petit-déjeuner sain doit être salé. 

Les aliments trop cuits constituent un autre défaut des habitudes alimentaires car ils perdent leur valeur nutritive. Les épices ont une valeur inestimable pour la santé, de la cannelle, du tilani à l’elaychee, le methi et le clou de girofle, dont le mélange et le dosage sont méticuleusement étudiés et calculés, et l’aura qu’elles diffusent dans le corps procurent aussi un bien-être psychique, peu connu du grand public.

Il convient de les utiliser à bon escient avec des légumes mi-cuits ; et les salades, très prisées en Europe, peinent à constituer un repas complet à Maurice. N’hésitons pas à emprunter à d’autres pays ce qui est bon pour la santé du public.

En revanche, nous constatons avec effroi une consommation d’alcool avec le whisky en tête de liste pour débuter le week-end chez les jeunes salariés et cadres des milieux aisés. Si c’est un moyen de détente et de liberté, il n’est pas souhaitable d’en faire une habitude.

Rappelons qu’en ce qui concerne les personnes d’origine indienne et asiatique, certains aliments et boissons sont étrangers à leur organisme depuis des siècles, d’où leur vulnérabilité à une consommation immodérée.

Avec la fête du brède, les Mauriciens ne découvrent pas l’Amérique ! A Maurice, ce n’est pas les fêtes qui manquent. La fête du chouchou, du letchi, etc., sont courants à la Réunion qui ne peut se vanter d’un calendrier chargé de fêtes comme à Maurice.

Dans leur ensemble les Mauriciens sont restés attachés aux légumes et brèdes locaux. Le dhal et ses variétés conservent une place d’honneur autant pour la saveur que pour les vitamines. Longtemps stigmatisés avec le cliché négatif de feuillage, aliment des barbares, voilà le brède réhabilité et mis à l’honneur par un groupe commercial puissant.

Les mentalités ont évolué, tant mieux ! Le but reste commercial, sinon où en est l’intérêt ? Ça plaira aux touristes tout comme les aquarelles des femmes en jupe, blouse et horni, travaillant dans les champs de canne. Des peintures qui rapportent à ceux qui ont le flair d’utiliser ce qui est rentable dans le paysage local.

A la recherche des fruits disparus des cours et des marchés figurent le cœur de bœuf, le corossol, le jambalac, le jamblon et le zatte (les nouvelles générations en connaissent à peine la saveur). Le tamarin frais dont le jus fait grand bien en été est fortement ignoré.

Il faut régler le problème causé par les chauve-souris si la production de la mandarine et d’autres fruits est menacée. Les oranges coûtent cher ; on ne sait pas si l’Université de Maurice se penche sur la question de la propagation rapide de l’influenza qui rend visite à chaque maisonnée en hiver. Y a-t-il une carence en vitamine C due à l’absence de consommation de fruits ? Ou des allergies ? C’est quand même particulier à Maurice.

Au chapitre des produits presque inexistants dans les ménages, il y a l’ail noir, les tomates variées et de qualité, les champignons frais. L’Inde en fait une production en quantité industrielle destinée à l’exportation. Les bienfaits du champignon sont peu reconnus. On a quelques réserves à allouer des terres à l’élevage tant que Rodrigues assure les produits frais en viande.

Allons donc ! Il y a tout un boulevard à explorer pour une meilleure santé et aussi pour le plaisir…


Mauritius Times ePaper Friday 1 December 2023

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