Pourquoi pas un pape arabe, africain, indien, ou latino?

By Sydney Selvon

Sur 265 papes, huit sont nés hors d’Europe. Le premier de tous les papes, St. Pierre, n’était pas Européen ni même d’origine européenne, car il était Palestinien, donc un Asiatique venant de l’Asie Mineure, comme Jésus Christ.

Il naquit à Bethsaida, en Galilée, et fut pape de l’an 64 à 67. Il y eut, selon la liste officielle des papes à travers l’histoire, des papes venant du monde arabe et d’Afrique.

Le monde arabe est essentiellement, sur le plan religieux, un monde islamo-chrétien où les deux religions coexistent depuis des siècles. La Syrie et l’Iraq, ou encore l’Egypte et la Palestine sont de grands pays islamiques et chrétiens, ayant de grandes communautés chrétiennes. Les sept autres papes venant de régions hors d’Europe, après St. Pierre, ont régné dans des temps très anciens :

St. Aristus, Bethléem, Judée (105-107)

St. Anicetus, Emesa, Syrie (155-166)

St. Victor 1, natif de la partie africaine de l’empire romain, (189-199/201) rien n’indique qu’il était citoyen romain ou descendant de Romains.

St. Melchiades, Africain possiblement d’origine berbère (311-314)

Théodore 1er, Palestine (642-649)

Sisinius, Syrie (708, 21 jours)

Constantine, Syrie (708-715)

Mais depuis cette époque, tous les papes ont été des natifs d’Europe et, comme le soulignent plusieurs internautes à travers le monde, « de race blanche ». Certes, la race importe peu et il y a de solides raisons à la centralisation de la papauté sur l’Europe à un moment de l’histoire où le catholicisme prenait un essor fulgurant sur le continent européen. Cependant, l’Eglise catholique a toujours su conserver son caractère global, comme l’Islam, mais il n’empêche que les plus grandes religions du monde, y compris le christianisme, étaient toutes, au départ, des religions asiatiques, comme l’hindouisme ou le bouddhisme, et elles ont largement pris la place de très anciennes religions d’Asie comme d’Europe.

Les racistes n’appartiennent à aucune religion

Cela me pousse à constater que ces grandes religions ont une dimension globale et qu’aucun raciste n’a le droit de se réclamer de ces religions qui ne connaissent aucune barrière raciale. Ils n’appartiennent, en fait, à aucune religion du fait même qu’ils sont remplis de haine pour d’autres groupes religieux ou ethniques et une telle haine n’est pas acceptable dans la signification profonde de la religion dans son sens le plus large. Gandhi se revendiquait de toutes les religions et ne portait pas de haine communale ou raciste dans son cœur, et Mandela doit lui aussi sa grandeur à une attitude de tolérance comparable. Les racistes disparaîtront, les grands resteront les grands de l’histoire.

Ayant fait un tel constat, on peut alors s’interroger, comme actuellement dans la presse à travers l’Europe et sur les autres continents, sur une pratique qui consisterait, au 21ème siècle, à n’élire que des papes européens et d’un seul groupe ethnique. Et pourtant plus de la moitié des Chrétiens ne sont pas Européens alors que le christianisme recule en Europe et que cette religion est bien plus vivante dans les mondes africain, arabe, indien et latino-américain.

Plus de la moitié des 1,2 milliards des Catholiques de la planète vivent dans les pays en développement. Les chiffres officiels de 2010, montrent que le nombre de Catholiques avait augmenté comme suit en une année : Afrique (+6,530,000); Amérique (+5,863,000); Asie (+1,814,000); Europe (+597,000), Oceania (+147,000).

“The World percentage of Catholics increased by 0.02%, settling at 17.42%. By continent: increases were registered in Africa (+0.3); America (+0.04) and Asia (+ 0.01), a drop in numbers was registered, like last year, in Europe (- 0.02) and Oceania (- 0.3),” selon le site Internet du Vatican (http://www.news.va), en 2010.

En termes de continents, la répartition des Catholiques est de 121 millions en Asie, avec, en plus, environ 3 millions au Moyen Orient (Asie Mineure); 135,2 millions en Afrique; 351 millions en Amérique Latine, les Caraïbes et l’Amérique centrale; 449 millions en Amérique du nord; 284 millions en Europe; et 7 millions en Océanie.

Parmi les cardinaux, qui constituent le gratin des dirigeants de l’Eglise, il y a des Africains, des Indiens, des Arabes, des Chinois, des Latino-Américains, etc. Déjà, les bookmakers à travers le monde – et probablement à Maurice – organisent des paris. Deux ont déjà annoncé les cotes, à savoir Paddy Power et Ladbrokes. C’est peut-être indécent si l’on s’en tient au sens strictement religieux de l’élection d’un pape, mais peut-on empêcher des tentatives légitimes d’analyser les facteurs qui pourraient jouer dans le choix d’un nouveau pape qui, qu’on le veuille ou non, est un des dirigeants les plus influents sur la planète.

C’est le Saint Siège et non le Vatican qui entretient des relations diplomatiques avec 179 gouvernements à travers le monde et le Vietnam pourrait devenir le 180ème. Les Etats suivants n’ont pas de relations diplomatiques avec le Saint Siège : Afghanistan, Arabie saoudite, Bhoutan, Brunei, Chine, Comores, Corée du Nord, Laos, Maldives, Mauritanie, Myanmar (Birmanie), Oman, Somalie, Soudan du Sud et Tuvalu.

Le Saint Siège n’entretenait pas de relations avec Israël jusqu’en 1993, étant donné le soutien de l’Eglise à l’énorme communauté chrétienne vivant dans les pays arabes comme la Syrie, l’Iraq, l’Egypte, la Palestine, etc. mais la diplomatie mondiale a eu le dessus lorsqu’un processus de paix avait été engagé entre Arabes et Israéliens. Mais les prêtres, évêques et cardinaux arabes sont connus pour leur soutien à la cause palestinienne.

Une des plus anciennes et des plus importantes communautés de Catholiques se trouve en Inde. La plus nombreuse communauté chrétienne de l’Inde est celle des Catholiques qui compte 17 millions de fidèles, ce qui fait que celle de Maurice, en comparaison, est infime comme me le faisait remarquer un haut-commissaire indien qui un jour m’exprima son désaccord avec le fait que beaucoup de personnes à Maurice prennent la haute commission comme étant une « ambassade hindoue » et non pas une représentation diplomatique d’un grand pays multi-religieux réunissant Hindous, Musulmans, Chrétiens, Jaïns, Bouddhistes, etc., et aussi de non-croyants. « Le caractère de l’Etat indien est celui d’un Etat séculier selon le préambule de sa Constitution, ce qui interdit au gouvernement de favoriser une religion au détriment d’une autre et donne la liberté entière aux religions d’exister et d’être librement pratiquées, » disait ce diplomate.

L’Inde envoie des centaines de prêtres catholiques au Canada, où le nombre de vocations est insuffisant.

Il est malheureux que les pronostiqueurs des journaux européens continuent à mettre l’accent plus sur les candidats européens à la papauté que sur ceux des pays en voie de développement. Ces derniers ne sont ajoutés que ‘au cas où’ le choix se porterait en dehors de l’Europe et de l’Amérique du nord. Cependant, l’un d’entre eux le Ghanéen Peter Kodwo Appiah Turkson, coté à 9/4 par Paddy Power et 5/2 par Ladbrokes, part parmi les favoris. Il préside le Conseil Pontifical pour la Justice et la Paix, poste auquel le Pape Bénédict XVI l’avait nommé en 2009. Il pourrait bien devenir le favori dans les prochains jours. Il est un économiste et a proposé, sur la base que l’Eglise est une institution globale et a de l’autorité pour s’exprimer fortement sur l’économie globale, une réforme profonde du système financier international:

Une intervention sur un site Internet (projectavalon.net), explique: “In response to the global economic crisis started in 2008, Cardinal Turkson together with bishop Mario Toso elaborated a proposal to reform the international financial system by creating a Global Public Authority and a Global Bank that consider the interest of all developing countries. The document of 40 pages was officially presented in October 2011 and criticizes the actual structure of International Monetary Fund and other institutions.”

Les dialogues entre Musulmans, Hindous et Chrétiens

Al-Jazeera rapportait et soulignait l’importance de la nomination de nouveaux cardinaux non-européens le 24 novembre de l’année dernière dont: l’Arabe (Libanais) Bechara Boutros al-Rahi, l’Indien Baselios Cleemis Thottunkal, le Nigérien John Onaiyekan, le Colombien Ruben Salazar Gomez et le Philippin Luis Antonio Tagle. Ils s’ajoutent, rappelait l’agence de presse, à d’autres non-Européens qui sont éligibles pour voter un nouveau pape.

Il est intéressant de noter les commentaires d’Al-Jazeera à cette occasion puisque c’est une agence dont les dirigeants connaissent profondément les pays en développement et qui évoque, ici, les dialogues entre Chrétiens, Musulmans et Hindous :

“Benedict’s decision to raise the two to the highest rank in the Church short of the papacy indicates his concern for relations between Christianity and Islam. Benedict visited predominantly Muslim Lebanon last September and called on members of both faiths to work together to build peace in the Middle East and beyond.

“In Nigeria, which is about 50 per cent Muslim, Boko Haram – an armed group fighting against Western influence – has killed hundreds of people in attacks since launching an uprising in 2009. Many of the attacks have been on Christians and churches.

“Thottunkal, 53, the Indian, is on the front line of inter-religious dialogue with Hinduism. The other two, Gomez, 70, of Bogota, Colombia, and Tagle, 55, of Manila, come from predominantly Catholic countries.

“Benedict’s health appears to be good but he has been looking frail recently and has started using a cane. Popes usually reign for life but in a book in 2010, Benedict said he would not hesitate to become the first pontiff to resign in more than 700 years if he felt no longer able “physically, psychologically and spiritually” to run the Catholic Church.”


* Published in print edition on 15 February 2013

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