Le tourisme se porte à merveille, mais le fameux ruissellement se fait attendre
Eclairages
Par A. Bartleby
Alors que les Mauriciens semblent avoir du mal à se relever de la crise économique et de l’inflation qui ont suivi la pandémie de la Covid-19, certains secteurs de l’économie mauricienne, eux, se portent très bien.
C’est le cas, par exemple, du secteur touristique qui affiche des chiffres qui sont désormais alignés avec ceux d’avant la pandémie. En effet, le mois d’octobre a vu le nombre d’arrivées touristiques franchir la barre du million, permettant dans la foulée de dépasser le chiffre de deux millions de touristes depuis la réouverture et la fin de la pandémie.
Le secteur touristique se porte donc extrêmement bien à Maurice. Une telle santé du secteur devrait donc avoir un effet de ruissellement vers le bas important sur les ménages mauriciens. C’est là que les choses semblent mitigées.
Ces chiffres témoignent de la bonne santé d’un secteur qui a été forcément profondément affecté par les mesures prises pendant la pandémie. Il est même possible de constater une évolution de ce secteur avec le fait, par exemple, qu’il n’y a pas vraiment eu de haute ou de basse saison depuis deux ans. Le flux touristique est resté continuellement tendu même pendant les saisons habituellement creuses.
Ces changements affectent nécessairement certains fondamentaux du pays, comme la consommation d’énergie et l’accès à l’eau potable. En effet, les chiffres avancés témoignent du fait qu’il y a une moyenne de 100 000 personnes de plus sur l’île mensuellement, et ce, en excluant les expatriés et les travailleurs étrangers qui s’y ajoutent à la population locale.
Cette donnée démontre que la gestion des ressources et l’accroissement indispensable des infrastructures deviendra de plus en plus critique avec une possibilité que les flux de touristes et d’étrangers augmentent encore plus durant les prochaines années.
Le secteur touristique se porte donc extrêmement bien à Maurice. Il ne s’agit pas ici uniquement du secteur hôtelier mais de tout ce qui constitue de près ou de loin l’activité économique dépendante des arrivées touristiques, et qui concerne près de 120 000 emplois directs et indirects à Maurice.
Une telle santé du secteur devrait donc avoir un effet de ruissellement vers le bas important sur les ménages mauriciens. C’est là que les choses semblent mitigées. Les arrivées touristiques importantes boostent forcément les entrées de devises et de liquidités dans le circuit monétaire local, mais nous n’arrivons pas encore à en percevoir les bénéfices pour les classes ouvrières.
En d’autres termes, le secteur se porte à merveille et les différents acteurs du secteur réalisent des bénéfices importants, mais nous ne pouvons pas encore constater un “feel-good factor” remarquable au sein de la population qui, elle, souffre toujours des effets de l’inflation et de la cherté de la vie.
Est-ce que ce fameux ruissellement se fait attendre ou bien est-ce qu’il y a des blocages structuraux qui font qu’il n’aura pas lieu pour certaines catégories de Mauriciens ? Ne faudrait-il pas poser cette question de manière sérieuse ?
* * *
Les Maldives vont faire appel de la décision du Tribunal international du droit de la mer
Quelques semaines après son arrivée à la présidence des Maldives, le Dr Mohamed Muizzu a tenu cette semaine une conférence où il a expliqué que sa nouvelle administration fera appel de la décision du Tribunal international du droit de la mer (TIDM) concernant le différend territorial entre les Maldives et la République de Maurice.
Pour rappel, les eaux contestées entre les Maldives et Maurice couvrent une superficie de 95 000 km². Le 28 avril de cette année, le TIDM a accordé 47 232 km², soit la plus grande partie de la zone de chevauchement, aux Maldives, et 45 331 km² de la zone contestée à Maurice. Ce partage territorial était extrêmement important dans le cadre de la revendication de Maurice sur les Chagos. Et le gouvernement avait obtenu le soutien des Maldives dans ce contexte.
Mais les choses ont changé avec l’arrivée de Muizzu à la présidence des Maldives. Le gouvernement sortant avait à l’époque décrit la décision du TIDM comme une victoire pour les Maldives, mais l’opposition d’alors, devenu le gouvernement d’aujourd’hui, a une perspective différente.
En effet, Mohamed Muizzu a été élu grâce notamment à la promesse d’un éloignement des Maldives de l’Inde et d’un rapprochement avec les intérêts chinois. Et il est difficile de penser que l’appel que feront les Maldives auprès de la TIDM ne s’inscrit pas dans cette stratégie, pour ne pas dire que cet appel ne soit pas piloté depuis Pékin.
Quels sont les enjeux actuels dans cette partie de l’océan Indien? S’agit-il, comme certains intérêts opposés au retour des Chagos sous la souveraineté mauricienne, d’une manœuvre de la Chine pour obtenir une base militaire à proximité de Diego Garcia ?
Difficile de dire pour le moment. Et nous verrons bien comment les choses évolueront dans les prochains mois. Mais il y a, en réalité, une autre hypothèse qui pourrait s’avérer bien plus crédible, celle d’une réserve d’hydrocarbures en milieu marin qui sera de facto partagé entre Maurice et les Maldives selon le partage territorial admis par le jugement du TIDM.
Est-ce que les Maldives, avec le soutien de la Chine, voudraient tenter d’approprier tout le territoire concerné ? Cette hypothèse n’est pas à prendre à la légère.
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Israël et le Hamas concluent une trêve de quatre jours
Le gouvernement israélien a approuvé dans la nuit de mardi à mercredi un accord prévoyant la libération d’au moins cinquante otages détenus par le Hamas, en échange de la libération de prisonniers palestiniens et d’une trêve d’au moins quatre jours dans la bande de Gaza. Mais “la guerre continuera après le cessez-le-feu”, a averti Benyamin Nétanyahou.
Cette décision a été prise à l’issue d’une longue réunion tenue dans la nuit de mardi à mercredi. Au début de la réunion, le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, avait enjoint ses ministres à approuver l’accord, négocié par le Qatar avec l’aide de l’Égypte et des États-Unis, estimant que c’était “la bonne décision” à prendre. Il avait également précisé que le président américain Joe Biden avait contribué à “améliorer” l’accord, pour y inclure “plus d’otages, à un moindre coût”, selon le quotidien israélien Ha’Aretz.
Cet accord constitue la première avancée diplomatique depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre dernier, et constituera aussi la première trêve d’envergure malgré le fait qu’elle ne durera que quatre jours. Mais ces quatre jours seront précieux diplomatiquement, notamment dans la mise en place d’un accord et dans le précédent qu’il pourrait constituer.
Dans les faits, le Jerusalem Post explique que 30 enfants, huit mères et 12 autres femmes – soit cinquante otages sur les quelques 240 détenus à Gaza – seront libérés par le Hamas “par petits groupes” au cours des quatre jours de trêve. Israël libérera en échange 150 femmes et mineurs palestiniens détenus dans ses prisons, n’étant pas directement impliqués dans des attaques terroristes ayant fait des morts.
Le Jerusalem Post croit également savoir que “30 otages supplémentaires” détenus par le Hamas pourraient être libérés “si la trêve est prolongée de quatre jours supplémentaires”. Les médias israéliens affirmaient dans un premier temps que les 50 otages concernés par l’accord seraient tous de nationalité israélienne, mais la Maison-Blanche a assuré dans la soirée que trois d’entre eux seraient américains.
Dans la foulée de l’annonce de cet accord par le gouvernement israélien, le Hamas a également confirmé que l’accord a bel et bien été conclu. Par-delà la libération des 150 Palestiniens, cela permettra à l’aide humanitaire de se déployer dans les zones gravement touchées par les bombardements israéliens à Gaza.
Mais cela ne signifie aucunement la fin des hostilités entre les deux entités. La trève pourrait être prolongée de quatre jours supplémentaires mais les combats reprendront de plus belle dès que ce dernier aura expiré.
En fait, nous voyons deux choses se mettre en place. D’un côté, les frappes israéliennes sont en train de porter leurs fruits étant donné que le Hamas accepte la libération d’une partie des otages. Cela viendra sans doute conforter Benjamin Nétanyahou dans le fait que sa stratégie donne des résultats concluants, et ce, malgré l’immense coût pour les civils palestiniens.
De l’autre côté, une trêve permettra de calmer un peu les esprits, même du côté israélien. En effet, l’union sacrée qui avait regroupé toutes les franges des sensibilités israéliennes s’est peu à peu érodée au fur et à mesure que Tsahal augmentait ses frappes et que le nombre de morts augmentait de manière exponentielle de Gaza.
Ainsi, Nétanyahou était dans l’obligation de démontrer que sa stratégie d’une guerre quasi-totale portait des fruits et n’était pas qu’une stratégie de vengeance aveugle qui n’allait produire aucun résultat concret.
C’est ainsi, également, une petite victoire politique pour Nétanyahou. Est-ce que nous allons voir une multiplication de ces trêves et un retour de tous les otages en Israël ? C’est l’espoir légitime que nous pouvons entretenir. Ce qui est certain, c’est que les tractations diplomatiques semblent avancer, même si cela reste trop lent.
* * *
Vladimir Poutine fait son grand retour au G20
Deux réunions importantes ont eu lieu cette semaine. Tout d’abord celle des BRICS qui s’est tenue mardi et ensuite celle du G20 qui a eu lieu mercredi. Le fait marquant de ces deux réunions : la présence virtuelle de Vladimir Poutine, qui faisait son grand retour sur l’arène internationale.
Sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI), Vladimir Poutine s’expose au risque d’une arrestation s’il se déplace dans les pays qui reconnaissent la CPI. Du coup, il est intervenu par visioconférence. Cela lui a d’ailleurs offert une formidable tribune pour faire passer ses messages, et notamment pour marteler son concept du nouvel ordre mondial qui émerge avec une place privilégiée de la Russie sur l’échiquier international.
Concrètement, cela se traduit sur des prises de position sur les enjeux actuels, avec notamment le fait de réaffirmer la position russe pour une solution à deux États comme la seule issue possible au conflit israélo-palestinien.
Il a dans la foulée également parlé de la guerre en Ukraine, déclarant que “l’action militaire est toujours une tragédie, […] et évidemment nous devons réfléchir à la manière de mettre fin à cette tragédie. Par ailleurs, la Russie n’a jamais refusé le dialogue pour la paix avec l’Ukraine. Ce n’est pas la Russie mais l’Ukraine qui a annoncé publiquement avoir abandonné la table des négociations, et un décret présidentiel a été signé pour interdire la négociation”.
Poutine serait-il donc pour une résolution du conflit en Ukraine ? Difficile à dire pour l’instant, mais ce qui est sûr c’est qu’il n’a pas fait cette déclaration pour rien.
Nous en parlions déjà il y a quelques semaines, et plusieurs experts et observateurs du conflit commencent de plus en plus à l’affirmer : il se pourrait bien que la Russie ait déjà gagné la guerre en Ukraine, et que les opérations actuelles ne sont qu’une continuation du statut quo jusqu’à ce qu’une armistice soit signée.
En effet, les choses ont basculées en Ukraine depuis quelques mois. La résistance héroïque de l’armée ukrainienne à Marioupol et la contre offensive tentée par les forces ukrainiennes n’ont pas eu les résultats escomptés. Bien au contraire, Volodymyr Zelensky a jeté toutes ses forces dans la bataille en espérant repousser les forces russes en dehors de son territoire, mais celles-ci ont fait exactement ce qu’ils avaient fait face à Napoléon et face à Hitler.
Ils ont reculé en attendant que les forces ukrainiennes s’affaiblissent et épuisent leurs munitions et leur matériels, avant de repartir de l’avant et sécuriser la ligne qu’ils s’étaient fixés pour objectif. Parallèlement, le conflit à Gaza a fait que les alliés des Ukrainiens ont été forcés de concentrer leurs soutiens en armements et en munitions vers Israël, affaiblissant encore plus l’effort ukrainien.
Ce n’est ainsi pas un hasard si les grands médias occidentaux parlent aujourd’hui déjà d’une victoire de la Russie en Ukraine. Les lignes ne bougeront plus beaucoup et les pertes territoriales ukrainiennes seront sans doute désormais des territoires annexés pour de bon par la Russie.
Il y a d’ailleurs même des scissions qui commencent à apparaître au sein des gouvernants ukrainiens, avec un clash ouvert et public entre Volodymyr Zelensky et le général Valeri Zaloujny (le commandant en chef des forces armées ukrainiennes). Zelensky a même dû jusqu’à aller mettre en garde Zaloujny que ce n’était pas l’armée mais le pouvoir politique qui prenait les décisions, tellement la relation entre les deux hommes s’est dégradée depuis quelques semaines, et certains médias occidentaux commencent même à parler d’un départ de Zelensky qui aurait perdu le soutien de ses alliés occidentaux.
Le retour de Poutine sur la scène internationale signifie-t-il donc un retour en grâce d’un tacticien victorieux face auquel l’Occident ne peut rien faire ? Il y a sans doute aussi peut être un peu de cela qui s’est joué cette semaine.
Mauritius Times ePaper Friday 24 November 2023
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