De notre destin commun

Changement climatique & COP26

By Rajiv Roy

La conférence de Glasgow sur le climat – COP26 – est un moment de toute première importance pour la planète.

C’est la raison pour laquelle les yeux du monde sont rivés sur cet événement pour suivre avec appréhension si les décisions seront à la hauteur des enjeux, si depuis la COP23, il y a eu une évolution des consciences, si la moelle substantifique, la quintessence de ce qui nous lie en tant qu’humanité peut enfin s’imposer et s’essaimer.

Pourtant il est plus que jamais évident qu’il faudra se serrer les coudes pour s’en sortir collectivement car nous n’avons pas de planète de rechange !

Pic – France 24

Il faut dire que le constat actuel par rapport au changement climatique est accablant. Les preuves défilent quotidiennement devant nous à travers les variations de température, les pluies diluviennes conduisant à des inondations majeures, la montée du niveau de la mer, la fonte des glaces aux pôles, ou la disparition des neiges du Kilimandjaro plus près de chez nous.

Voilà pourquoi le Premier ministre italien Mario Draghi qui préside le G20, regroupant les grandes puissances économiques du monde, a clairement fait ressortir dans son discours que le combat contre le changement climatique est le défi majeur de notre époque.

Il a ajouté ceci :  soit nous agissons maintenant en changeant de braquet pour favoriser une approche plus écologique, soit nous tergiversons en renvoyant à plus tard les décisions cruciales sans toutefois aucune garantie de réussite. Parmi les pays du G20, le Brésil, la Chine, l’Inde, l’Allemagne et les États-Unis représentent à eux seuls 80% d’émission de gaz à effet de serre de la planète.

Si nous sommes arrivés là, nous ne devons nous en prendre qu’à nous-mêmes, car c’est dû à nos excès, à notre course effrénée pour obtenir toujours plus de croissance, de profits, pour nous hisser en tête d’affiche, sans aucune autre considération et en faisant fi des conséquences désastreuses d’un tel comportement…

Ce changement climatique – qui bouscule désormais nos certitudes -exige de nous tous des prises de décision intelligentes et intelligibles. Le temps n’est plus aux discours vaseux mais à l’action car l’heure est grave. Selon les climatologues, pour faire plafonner le réchauffement climatique à 1.5 degrés, il faut atteindre le « net zero emission » (émission nette zéro) d’ici 2050.

Il y a donc une urgence pour amener tous les pays à faire les bons choix, à être proactifs pour que cette conférence ne soit pas un coup d’épée dans l’eau mais une opportunité réelle pour avancer dans la bonne direction et poser les bases pour un revirement de la situation.

Il faut aussi prendre acte du fait que certaines puissances, à l’instar de la Chine et l’Inde, veulent faire valoir le fait que l’on ne peut pas leur demander de freiner leur croissance et leur développement alors que d’autres pays – avant eux – ont construit leur richesse sans restrictions et sont responsables pour une large part de la situation actuelle.

Si ces éléments ne sont pas actés d’une manière ou d’une autre, alors l’on pourrait s’attendre à de la résistance de leur part. Il faut donc faire preuve de beaucoup de diplomatie et de doigté car, en définitive, le but est de faire avancer tous les pays dans la même direction et éviter ainsi de commettre l’irréparable.

Il faut aussi se rendre compte que les puissances de l’Ouest ont parfois le mauvais réflexe de distribuer des certificats de bonne conduite selon leur propre agenda ou de faire des déclarations péremptoires qui souvent agacent et irritent plus d’un. L’excellent film du grand metteur en scène Costa Gavras ‘Adults in the room’ sur l’attitude de l’Union européenne,  et ce, par rapport à la Grèce alors qu’elle traversait une période délicate, est très révélateur et dépeint avec brio cette mentalité paternaliste.

Cette posture expliquerait, dans une certaine mesure, l’absence physique des dirigeants de la Chine et de la Russie à la COP26, même si, au fond, c’est une occasion ratée pour elles d’évoquer, en tête à tête, des dossiers litigieux ou en suspens pour atténuer les tensions qui ne servent les intérêts de personne.

Alors que ces gesticulations politiques se déroulent, il y a le sort d’un certain nombre de pays qui est dans la balance. L’on se souvient du cabinet des ministres exceptionnel tenu par le Premier ministre d’alors des Maldives sous la mer. Le but était d’amener le monde à réagir par rapport au fait que son île serait totalement submergée par l’océan dans un avenir pas très lointain. Même si cela avait marqué les esprits, encore une fois, il n’y a pas eu de suite, aucune mobilisation généralisée pour endiguer ce problème.

D’autres îles sont malheureusement dans une situation identique, à l’instar de Samoa, Solomon, Barbades, Tuvalu, Kiribati, parmi moult d’autres. D’ailleurs, le discours rempli d’émotion de la Première ministre des Barbades, Mia Amor Mottley, récemment, en Ecosse, tout autant que sa plaidoirie pour des actions concrètes a bouleversé plus d’un. Les populations de toutes ces îles représenteront une nouvelle catégorie de réfugiés, connue comme des réfugiés climatiques sans mère patrie et n’ayant plus de territoire propre.

Dans le même ordre d’idées, les peuples autochtones d’Amazonie, a l’instar du chef Raoni, sont à l’avant-plan du combat pour sauver la forêt primaire, leur habitat naturel depuis toujours, alors que parallèlement la déforestation continue de plus belle sous le gouvernement de Bolsonaro qui distribue des permis d’exploitation à tour de bras.

Parfois, entre le constat pourtant implacable et les mesures d’accompagnement, il y a un grand fossé, un trou béant. Autant lorsque les grandes corporations se retrouvent en difficulté ou au bord du gouffre comme pendant la crise des ‘sub-primes’, l’état se retrousse les manches pour voler à leur secours, autant lorsque de simples individus sont victimes du changement climatique, l’on tergiverse avant de décider s’il faut les soutenir ou non.

Et, c’est la raison pour laquelle de plus en plus de gens remettent en cause ce modèle de développement où ils se sentent exclus. Ceci expliquerait le pourcentage très élevé de l’abstention lors des élections ou l’attrait pour des partis qui prônent un nationalisme nous rappelant  les pages sombres de l’histoire de l’humanité.

Sur le plan local, il ne faudrait pas que la présence à la COP26 soit un moment de complaisance juste pour se donner bonne conscience et, qu’en retour, on ne prend pas les décisions courageuses qui conviennent, par exemple, par rapport au charbon.

Le charbon n’aurait pas dû être autorisé dans un premier temps si nos gouvernants avaient conscience de ses conséquences néfastes sur l’environnement mais il semblerait que des réseaux puissants ont toujours et encore le dernier mot.

Le changement climatique doit impérativement renforcer le concept de solidarité mondiale. Ainsi, la crise des migrants concerne tous ceux quittant des zones de guerre ou des pays touchés par la famine, et ceux qui sont victimes de brimades pour chercher refuge sous des cieux plus sûrs, en dépit des passeurs véreux.

Cette situation a dévoilé un aspect pas très flatteur des sociétés les plus avancées. Il faudrait une politique d’aide ciblée pour encourager un développement local responsable, ce qui contribuerait à préserver l’environnement. Il est vrai que la grande majorité des peuples du monde ont un attachement profond à leur terre d’origine et ne demandent qu’à vivre en paix avec leur famille sur ce sol.

La COP26 a du pain sur la planche. Plus de 100,000 jeunes ont défilé car il s’agit de leur avenir et ils n’ont pas l’intention d’abdiquer, de baisser les bras : ils réclament des comptes. Mais au vu du l’attitude calculée de certains dirigeants, le chemin risque d’être long tout en espérant qu’ici-là il ne soit pas trop tard.

En effet, nous sommes à la veille d’une situation irréversible. Greta Thunberg, l’activiste très pugnace, a déjà qualifié cette conférence négativement : c’est un échec parce qu’il n’y a pas suffisamment d’ambition, nous dit-elle.

Espérons, néanmoins, qu’à la clôture des travaux, on ne se limite pas aux seules «nettes zéro » d’émissions de gaz en 2050, à l’arrêt de la déforestation en 2030, ou à stopper l’émission de méthane en 2030. Ce ne serait pas suffisant et confirmerait les craintes de certains scientifiques qui pensent que même si les initiatives pour réduire les émissions sont mises en place, nous serons quand même impactés par une augmentation de 2.7 degrés.

Il faudrait aussi que les pays riches tiennent parole en mettant à disposition les $100milliards promis depuis 2020, sinon les pays moins nantis questionneront à juste titre leur crédibilité. C’est pour cette raison que le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a souligné avec force que les manquements par rapport aux engagements financiers contribuaient à la méfiance entre le nord et le sud. Notre avenir se joue maintenant.

Let’s keep our fingers crossed…


* Published in print edition on 9 November 2021

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