Acquittement de l’acteur Kevin Spacey : un coup dur pour la Cancel Culture et le mouvement #MeToo ?

Eclairages

Par A. Bartleby

L’acteur Kevin Spacey vient d’être acquitté par un jury de toutes les charges de harcèlement sexuel portées contre lui. Pour rappel, ce dernier avait été accusé par une trentaine d’individus de comportement inapproprié, avec pour conséquence directe le fait d’être renvoyé de la série ‘House of Cards’ et de ne plus travailler à Hollywood.

La chute spectaculaire de Kevin Spacey, l’un des acteurs américains les plus cotés, s’est inscrite dans l’émergence des mouvement #MeToo et la Cancel Culture.

Cinq ans après les premières révélations de viols et d’agressions sexuelles concernant le producteur Harvey Weinstein, qui ont conduit à l’émergence du mouvement #MeToo, Kevin Spacey est poursuivi pour quatre chefs d’agressions sexuelles contre trois hommes. P – AFP

Dans le premier cas, les individus victimes de harcèlement étaient encouragés à dénoncer leurs bourreaux sur les réseaux sociaux, et ce, sans devoir forcément fournir de preuves.

Dans le cas de la Cancel Culture, il s’agit du fait de tout simplement arrêter d’aller voir les films d’un acteur ou d’un producteur, d’arrêter de consommer les produits d’une marque ou encore d’arrêter d’écouter ou d’aller à des concerts d’artistes considérés comme sulfureux et devant être annulés.

Ces deux mouvements font ainsi un usage politique des réseaux sociaux, sous la forme de dénonciations publiques d’un côté, et sous la forme de circulation de messages de boycott, de l’autre. Dans le premier cas, c’est toute la procédure de l’initiation d’une enquête policière qui était contournée. Dans le second cas, c’est la loi du marché qui joue avec des réductions drastiques de la demande qui font que, par exemple, les producteurs de films n’emploient plus un acteur qui risquent de plomber la popularité et les revenus d’un film.

Ces deux mouvements ont eu un succès certain permettant, par exemple, à des victimes réelles de venir de l’avant avec des dénonciations et des preuves à charge contre des agresseurs qui sont actuellement ou bien en instance de procès, ou bien ont déjà été condamnés. Mais cette pratique n’est pas sans ses failles et ses limites.

Dans le cas de la #MeToo, il y a eu plusieurs cas de faux témoignages, notamment de femmes s’attaquant à la réputation d’hommes publics et/ou riches. Ce fut le cas du footballeur Benjamin Mendy. Ce dernier fut accusé de viol alors qu’il était un joueur de Manchester City et de l’Equipe de France. Il fut limogé par son club et perdit sa place en Équipe de France. Dans son cas, il fut arrêté et un procès fut intenté. Comme dans le cas de Kevin Spacey, Benjamin Mendy fut exonéré des accusations contre lui et fut prouvé innocent. Mais sa carrière de footballeur de très haut niveau semble bel et bien terminée aujourd’hui. The damage is done.

Dans le cas de la Cancel Culture, les choses vont encore plus loin avec des appels à littéralement effacer des mémoires des pans entiers de l’histoire de certains pays. C’est le cas aux États-Unis, par exemple, où des groupes de pression demandent que des statues d’hommes politiques ayant participé à la traite des esclaves soient enlevés des lieux publics afin d’en effacer leur mémoire.

Un nouvel avatar de la gauche libérale américaine

Nous voyons là en fait un nouvel avatar de la gauche libérale américaine, l’idée étant de faire basculer le pays dans ce que certains journalistes nomment la post-racial culture, où toutes les différences de couleur et de race seraient effacées comme par enchantement du jour au lendemain, sans réel affrontement avec l’histoire et sans réelles solutions aux problèmes structuraux qui découlent de cette histoire.

Nous voyons un excellent exemple de cela avec la série ‘La Chronique des Bridgerton’, qui se situe à la fin du 18eme siècle. Cette série montre une société bourgeoise anglaise post-raciale, où les considérations raciales n’ont aucun lieu d’être. Il s’agit bien évidemment d’une fiction et intéressante à cause du parti pris. Mais cette fiction montre un fantasme qui efface ce qui faisait le cœur même de la stratégie coloniale : le racisme. Et en ne montrant pas comment le racisme structure les différences sociales et les rapports de pouvoir, la série fait tabula rasa sur le nerf même de la guerre contre les discriminations.

D’ailleurs, Barack Obama a lui-même exprimé son inquiétude par rapport à la Cancel Culture. Il considère que cette manière d’affronter l’histoire et le passé ne sert qu’à faire du politiquement correct et ne permet pas de rectifier les injustices actuelles, en affrontant les sources et les origines. Il y voit un grand danger pour l’avenir même de la démocratie américaine, et il faut avouer qu’il pourrait bien avoir raison.

Un même mouvement existe à Maurice, par exemple, avec la demande de faire retirer la statue d’Adrien d’Epinay du Jardin de la Compagnie. Pour rappel, Adrien d’Epinay fut le représentant des colons français propriétaires d’esclaves à Maurice quand les Britanniques prirent possession de l’île. D’Epinay avait pour objectif de négocier la non-application de l’abolition de l’esclavage dans la colonie de Maurice avec l’administration britannique. Cette négociation aboutit au fait que les esclaves furent libérés contre un paiement des Britanniques. Cet argent, qui devait être distribué en partie aux esclaves affranchis, fut conservé par les colons de l’époque et servit à la fondation d’une banque extrêmement populaire aujourd’hui.

Posons-nous donc la question : est-ce que le cancelling d’Adrien d’Epinay implique également le cancelling de cette banque ? Et en quoi est-ce que le cancelling de ces choses permettra la réparation des injustices venues des heures les plus sombres de notre histoire ? Toute cette démarche pseudo-politique peut se résumer à ces deux questions. 

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Le réchauffement climatique est-il bénéfique pour l’industrie touristique mauricienne ?

Cette question peut sembler un peu folle au regard de l’impact de la montée des océans sur nos littoraux, mais elle reste posée. Et elle se pose même de manière très sérieuse alors que le continent européen fait face à des vagues de chaleur inédites.

En effet, les destinations européennes populaires connaissent actuellement des températures dépassant parfois les 40 degrés dans les régions de la Méditerranée, et notamment en Espagne, en Italie et en Grèce.

Paradoxalement, une récente étude de la ‘Climate Impact and Adaptation Policy’ de la Commission européenne indique un modèle de changement où les destinations du nord bénéficieront du réchauffement climatique alors que les destinations du sud feront face à un déclin soutenu.

Jean-Pierre Mas, le président de l’association ‘Entreprises du  Voyage’, réfute cette hypothèse. Ce dernier ne prévoit pas de grand déclin dramatique mais bien plutôt des changements sur le long terme.

Par exemple, Mas affirme que certains touristes européens préféreront passer leurs vacances d’été dans des destinations du sud, où c’est l’hiver, à cause justement des températures élevées des régions méditerranéennes. D’ailleurs, Mas prend Maurice en exemple pour soutenir sa thèse qu’un changement de comportement touristique est en marche, rappelant au passage que ce pays est devenue la 9eme destination préférée des Français.

Il est intéressant de corroborer les affirmations de Mas avec les statistiques locales de l’industrie touristique. Alors que l’année 2022 avait vu un total de 997,290 touristes, l’année 2023 est bien partie pour dépasser ce chiffre avec 596,466 arrivées enregistrées entre le 1er janvier et le 30 juin. Mieux même, les recettes générées par le secteur sont également en hausse avec un revenu mensuel de Rs 6,9 milliards, enregistrées pour le mois de mai. Lorsque l’on constate que les recettes touristiques du mois de mai étaient supérieures à celles de février ou d’avril, nous constatons aisément que la thèse de Mas semble se confirmer.

Une conversation informelle avec les opérateurs du secteur démontre également l’existence de ce changement de comportement du marché, avec la destination Maurice devenant de plus en plus prisée pour les mois de l’hiver européen, même si ces mêmes opérateurs disent être déjà à 80% remplis pour la saison estivale à venir.

D’ailleurs, ils déclarent également leur inquiétude quant au manque de travailleurs, ce qui pourrait freiner la croissance du secteur. L’AHRIM déclarait récemment, par exemple, que le  secteur hôtelier était en demande de main d’œuvre, avec plus de 3,500 emplois à pourvoir.

Mais revenons au point soulevé. Est-ce que le réchauffement climatique est bénéfique pour l’industrie touristique à Maurice ? Nous sommes forcés de constater que les données sont favorables pour Maurice, ce qui est une excellente nouvelle. Toutefois, il ne faut pas non plus se leurrer quant au fait que le réchauffement climatique présente également des dangers pour notre secteur touristique.

De ce point de vue, il est clair que le comportement du marché évolue, et Maurice semble bien positionner pour encore plus consolider son secteur touristique. Toutefois, il est également impératif de développer rapidement des politiques permettant au secteur d’évoluer et de s’adapter aux défis liés au réchauffement climatique.

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Lancement de la 5G mobile par Emtel

Emtel, l’un des géants des télécommunications à Maurice, vient de lancer la 5G mobile. Ceci fait suite au lancement de l’internet 5G à la fin de l’année dernière, et témoigne de l’avancée rapide des installations techniques permettant la diffusion du réseau 5G dans la majeure partie de l’île.

Emtel se positionne ainsi comme un précurseur avant-gardiste et acquiert clairement une position hautement avantageuse dans le domaine des nouvelles technologies. La 5G est effectivement extrêmement importante pour l’essor des nouvelles technologies de l’information, et notamment celles qui sont liées à l’intelligence artificielle (IA).

Ainsi, il ne s’agit pas uniquement d’une question de rapidité des réseaux, mais de la capacité de ces réseaux à accueillir les transformations rapides dans le domaine de l’IA et des télécoms.

La vitesse de déploiement du réseau 5G dans la région et sur le continent africain témoigne d’ailleurs de l’importance que revêt ces avancées. Maurice fait désormais partie de la liste grandissante des pays opérant comme l’Afrique du Sud, le Botswana, l’Égypte, le Kenya, le Lesotho, le Nigéria, le Sénégal, les Seychelles, la Réunion, Madagascar ou encore l’Uganda.

Il y a bien évidemment une dimension géopolitique extrêmement importante à la 5G. Nous nous souvenons tous des rapports extrêmement tendus que le Président des États-Unis Donald Trump entretenait avec la Chine et le géant chinois des télécoms Huawei. Cette situation avait même conduit l’ancien président américain à déclarer une guerre commerciale à la Chine. La 5G n’était pas la seule raison de cette déclaration de guerre commerciale, mais elle en était un élément extrêmement important.

En effet, le développement de la 5G par la Chine a constitué un bond en avant phénoménal de la puissance chinoise dans le domaine des technologies lui permettant de devancer les États-Unis, qui était à l’époque à la traîne dans le domaine. Mais la guerre commerciale menée par le président Trump n’a pas eu les effets espérés du côté américain car la Chine a su jouer la carte du ‘Belt and Road Initiative’ en rajoutant un élément technologique aux grands travaux d’infrastructures. Ainsi, un nombre important de partenaires de la Chine ont fait le grand plongeon vers la 5G, ce qui devrait ouvrir pour ces pays des possibilités de développement économique importantes.

Il était donc essentiel que la 5G arrive également à Maurice. La connectivité du pays au reste du monde est un élément essentiel pour notre modèle de développement, ce qui signifie que la construction d’infrastructures digitales est toute aussi importante que la construction d’infrastructures routières, portuaires et aéroportuaires. Plus même, avec la Covid-19 et le développement soutenu du télétravail, la 5G positionnera Maurice comme un lieu idéal pour l’installation de diverses entreprises pouvant travailler à distance avec les pays de la région.

La 5G vient ainsi s’inscrire dans un effort de faire entrer Maurice encore un peu plus dans la mondialisation et donnera des possibilités et des facilités accrues aux entreprises locales tout autant que celles qui s’implantent ici. Emtel a ouvert la voie et détient pour l’instant le monopole, mais d’autres opérateurs devraient suivre et notamment Mauritius Telecom qui a du retard à rattraper dans ce domaine.

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Coup d’Etat au Niger: la politique africaine de la France s’effondre

L’armée du Niger a annoncé le 26 juillet dernier avoir séquestré Mohamed Bazoum, le président démocratiquement élu du Niger. Ce dernier a été remplacé par Omar Tchiani, qui a pris la tête du ‘Conseil national pour la sauvegarde de la patrie’, une junte militaire.

Des manifestations pro-Bazoum ont éclaté à la suite de ce coup, mais ces manifestations ont tout de suite donné lieu à une contre-manifestation d’envergure en faveur du coup d’état dimanche dernier. Des milliers de personnes se sont en effet réunies dans les rues de Niamey afin de manifester leur soutien au coup et à l’expulsion de Bazoum du pouvoir. Cette foule s’est même dirigée vers l’ambassade française et a même tenté d’entrer dans l’enceinte de l’ambassade en scandant des slogans anti-France.

Le Niger est une ancienne colonie française de l’Afrique de l’ouest, tout comme le Mali et le Burkina Faso. Ces deux pays ont d’ailleurs également connu des coups d’État récemment et sont plongés dans une instabilité politique durable. Le point commun de ces coups d’État : le sentiment anti-français qu’utilisent les putschistes pour justifier le renversement des régimes et des gouvernements considérés comme des pantins de la France.

Présence obscure de la Russie

Autre point commun de ces coups d’État : l’influence et la présence obscure de la Russie.

En effet, la foule de dimanche qui soutenait les putschistes s’est affichée avec un nombre important de drapeaux russes. Ils ont même brandi ces drapeaux russes devant l’ambassade de France, envoyant un message clair au monde : c’est désormais la Russie qui sera le partenaire privilégié du Niger en matière de coopération internationale.

Ceci a tout de suite fait réagir les commentateurs français. “Notre politique africaine s’effondre sur nous.” C’est ainsi que l’éminent diplomate français Gérard Arnaud a qualifié la situation en Afrique de l’ouest.

Ce sentiment anti-français vient de très loin et s’appuie sur les ressentis toujours vivides des injustices coloniales, incarnées aujourd’hui par le fameux concept de la France-Afrique et le Franc CFA. Cela fait plusieurs années que la diplomatie russe tente de s’engouffrer dans la brèche laissée ouverte par la France dans cette région du monde, et cela porte aujourd’hui ses fruits.

C’est d’ailleurs sur ce terrain que la milice Wagner est apparu, il y a quelques années. Evgueni Prigojine, le patron du groupe Wagner, a réagi au coup en saluant l’opération et en offrant ses services à Omar Tchiani. Il est encore trop tôt pour savoir si le groupe Wagner a été déployé sur le terrain du Niger, et si les déclarations de Prigojine s’inscrivent dans la stratégie de Vladimir Poutine (surtout après que les deux hommes se sont récemment affrontés ouvertement). Mais il est certain que la Russie avance ses cartes dans cette région du monde. Et ce n’est ni anodin, ni un hasard.

Il semble de plus en plus clair que l’opération spéciale russe en Ukraine deviendra un bourbier qui va durer des années. Ce faisant, Poutine a obtenu ce qu’il voulait vraiment : immobiliser l’Europe de l’ouest sur le front de l’est. En déployant la milice Wagner en Afrique, il semble clair que Vladimir Poutine veut affronter les puissances européennes, et la France en particulier, sur un autre terrain, et ainsi étendre le conflit qu’il a engagé contre ce qu’il appelle lui-même l’impérialisme occidental.

Si c’est vraiment le cas, il est clair que Poutine conserve des coups d’avance sur les occidentaux qui peinent à anticiper et à réagir à la stratégie de la Russie.

Reste la réaction des pays limitrophes du Niger, et notamment des membres du bloc ECOWAS qui réclament le rétablissement immédiat de Bazoum sous peine de sanctions économiques importantes. Est-ce que ces menaces seront efficaces ? Nous pouvons seulement affirmer que nous avons vu à quel point les sanctions contre la Russie n’ont pas fonctionné, et cela fera bientôt deux ans.

Mauritius Times ePaper Friday 4 August 2023