Tigre de l’Océan indien : Où est ton cœur ?

By Vina Ballgobin

Depuis le dernier budget, le calvaire a été réduit pour ceux qui ont besoin de frais médicaux allant jusqu’à un maximum de Rs 500 000 pour les soins médicaux inexistants à Maurice. Mais plusieurs autres patients ont toujours le choix entre trouver une somme importante pour les soins dans un centre hospitalier étranger ou la mort.

Deux patients ont accepté de témoigner afin d’expliquer leur situation aux Mauriciens et à ceux qui disposent des fonds CSR. Nous espérons que ces témoignages personnels aideront les Mauriciens à comprendre l’importance d’un brain-storming au niveau des ministères et du secteur privé pour favoriser le développement d’un système collectif – un one-stop shop – afin de faciliter l’accès aux soins à l’étranger et l’hébergement pour les patients mauriciens qui en ont bien besoin. L’importance d’un deuxième accompagnateur est aussi posée.

Le cas d’un jeune enfant de 3 ans de Triolet

 En février 2011, un jeune de 3 ans habitant Triolet ne se comporte plus comme les enfants de son âge. Ses parents décident de se rendre chez un médecin de la localité. Celui-ci leur demande de se rendre à l’Hôpital du Nord. L’enfant y passe une semaine. Ensuite, il est sous traitement pendant une semaine à l’Hôpital de Candos. Là, les parents apprennent qu’un traitement est disponible en Inde dans un centre hospitalier à Delhi.

Les parents sollicitent l’aide des membres de la famille qui cotisent pour payer les frais médicaux, le billet pour une accompagnatrice – la maman – et les frais pour le séjour sur place, initialement prévu pour une durée de trois mois. Finalement, ils y restent pendant neuf mois pour le traitement du cancer qui affecte le petit.

A l’époque, la famille obtient Rs200 000 et un billet d’avion pour le patient, pris en charge par le ministère de la Santé. La collecte de fonds a lieu à travers l’île, notamment les jours de marché et de foire. G. Ah Yan récolte des fonds à Mahebourg pour la famille.

Dès lors, le calvaire d’une jeune maman commence. Elle ne sait parler ni anglais ni hindi. Heureusement que le bhojpouri est là pour l’aider avec un peu de vocabulaire anglais retenu de l’école. (Comment aurait-elle fait sans la connaissance du bhojpouri ? Aurait-il fallu d’un deuxième accompagnateur ?) Elle apprend à vivre seule avec un enfant gravement malade, parfois en ICU, avec tout le poids psychologique que cela représente… Elle doit aussi apprendre la débrouillardise et elle trouve un logement, un flat pour y vivre car le séjour s’éternise. Un jour, un pick-pocket lui vole son sac à main avec Rs6000 indiennes… Heureusement que la famille lui téléphone régulièrement de Maurice et cotise de nouveau pour lui venir en aide.

Le jeune enfant est rentré avec sa mère le 8 décembre 2011. Néanmoins, il faudra repartir en Inde pour un check up dans quelques mois. Et le soutien de la famille sera nécessaire, encore une fois…

Le cas de Monsieur Jean Daniel ROSALBA

Ce patient a 48 ans. Depuis quelque temps, il se rend compte qu’il ne peut plus exercer son métier de la même manière car il éprouve rapidement une fatigue intense. Il est exténué lorsqu’il monte trois étages alors qu’il faisait ce va-et-vient plusieurs fois par jour au travail auparavant.

Il commence à suivre un traitement à l’hôpital de Flacq. En septembre 2010, après quelques mois de traitement, il apprend qu’il est atteint d’une maladie grave. Les médecins détectent chez lui une « anémie aplasique », associée à des problèmes de moelle osseuse. Un peu plus tard, les médecins diagnostiquent chez lui une maladie nommée « Pancytopénie ». C’est une diminution de tous les types de cellules sanguines (globules rouges, blancs et plaquettes) dans le corps humain.

Un responsable de l’hôpital lui annonce qu’il existe un moyen de soigner cette maladie hors de mainland Mauritius. C’est la transplantation de la moelle osseuse avec une chance de survie de plus de 80%. Il lui donne aussi une estimation des coûts qui s’élève entre Rs1, 200 000 à Rs1 700 000.

Ainsi, Monsieur Rosalba se retrouve dans une situation catastrophique. Sa maison avait pris feu dans le passé et il avait dû tout recommencer à zéro, petit à petit. Quant à son épouse, elle avait subi une opération en janvier 2011. Il a toujours été le seul à travailler à la maison. Depuis le déclenchement de sa maladie et sa grande fatigue accompagnée de douleurs corporelles intenses, il ne travaille plus et vit de la pension mensuelle du ministère de la Sécurité sociale, des aides financières et des dons en nature, essentiellement des produits alimentaires, que lui fournissent les habitants de son village à Argy et les membres de sa famille.

L’aide d’autrui est fort louable mais cela ne signifie pas que tout se passe bien pour le patient sur le plan psychologique. Je cite les paroles de Monsieur Rosalba :

« J’avais l’habitude de travailler sept jours sur sept. J’ai toujours fait du travail social. Et je peux vous garantir que j’ai les larmes aux yeux quand je suis seul à la maison. Je me sens impuissant : je ne peux même pas aider mon épouse quand elle va recueillir de l’argent en semaine. J’ai mal partout. Quand les amis ou les membres de ma famille apportent des provisions pour la cuisine, je me sens très gêné. La dignité d’un humain, c’est d’être capable de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille en autonomie… Cette situation est très dure à vivre pour moi au quotidien. »

Quand M Rosalba apprend la nouvelle à propos de sa maladie, il décide d’effectuer toutes les démarches pour recueillir la somme immense nécessaire aux frais médicaux. Il précise qu’une bonne connaissance des circuits administratifs et la connaissance de bons contacts sont utiles dans ces conditions. Au cas contraire, admet-il, cette étape aurait été un véritable cauchemar. (Et s’il n’avait pas été un travailleur social ? Et s’il n’avait pas eu les bons contacts ?) Il explique le système à son épouse qui effectue toutes les démarches auprès du ministère de la Santé et du ministère de la Sécurité sociale. Elle s’occupe d’obtenir les passeports auprès des autorités mauriciennes et se rend aussi auprès de la station de police afin d’obtenir les autorisations légales pour la récolte de fonds auprès du public.

Depuis le dernier budget, Monsieur Rosalba a droit à Rs500 000 et un billet d’avion gratuit pour un accompagnateur. Mais il lui reste à trouver ce qui suit : 1. Un billet d’avion pour le donneur, son frère, (son deuxième accompagnateur); 2. La somme pour les frais médicaux – minimum Rs 700 000, maximum Rs 1 200 000. ; 3. La somme pour vivre sur place – hébergement, transport et nourriture. (Je ne considère pas les soins post-chirurgie, les frais d’assurances et le coût d’un éventuel check-up à ce stade.) D’après un document officiel, il devrait être en Inde on or around le 05 décembre 2011. Toutefois, le recueil de fonds en public – le public collection permit – s’étend du 26.11.2011 au 25.02.2012. En ce moment, M. Rosalba est de nouveau hospitalisé pour une transfusion sanguine…

Entretemps, Air Mauritius continue de faire des profits mirobolants… Les « party-vintage » redoublent dans les chassés en cette période de fête… La Mauritius Bankers Association ressent-elle le moindre sentiment devant l’existence de ce genre de problèmes dans la République de Maurice ? Le ministre de la Santé a-t-il pensé qu’il faut mettre de l’ordre dans son ministère afin de faciliter les démarches de n’importe quel Mauricien?

Le ministre des Affaires étrangères a-t-il pensé à réduire le gaspillage d’argent public dans les Ambassades ou allons-nous encore payer des millions comme en 2010 pour le « Rehabilitation and Refurbishment of Chancery Building » passant de la somme initiale de £ 40,537 à un revised fee de £ 114,562 ? Et l’achat d’une Mercedes d’un “High Official of the Mauritian High Commission in London” pour des « social, domestic and pleasure purposes” ? Il y a aussi les dépenses pour le « Home-based Confidential Secretary » alors que ce poste devrait être supprimé depuis 2002 ? Et les soins médicaux tous frais payés pour le home-based staff qui sont sur le high side ? (Voir le Rapport de l’Audit – www.gov.mu/portal/goc/auditHome/file/minforeign.pdf

Sans aucun doute, quand Maurice est devenue le tigre de l’Océan indien, elle a perdu son cœur dans les dédales du capitalisme et elle n’arrive toujours pas à le retrouver. Parlons-en du pardon national à cause de cette mentalité d’exploitation à la mauricienne !


* Si vous souhaitez aider Monsieur Rosalba, veuillez le contacter au
Tel : 767 89 83


* Published in print edition on 16 December 2011

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