U.C

Attentes et réalités

 

D’ici trois semaines, les urnes auront rendu leur verdict et les entrants devront se retrousser les manches. Fort heureusement la campagne aura été courte, évitant au pays une incertitude prolongée et des risques de dérapage inacceptables dans une société qui se modernise et s’affranchit étape par étape des combats épiques, avec “jalsas” et poussées de fièvre qui ont jalonné son passé électoral. Le démarrage de campagne a été relativement en demi-teinte, les deux camps ayant quelque mal à finaliser leur liste de candidats.

 

 

Si l’Alliance de l’Avenir a largement réussi son meeting de lancement dans la capitale, elle doit impérativement régler le “cas Sithanen” dans les meilleurs délais. Elle a le mérite néanmoins d’avoir un front-bench clairement énoncé, avec une bonne représentativité nationale et un bilan relativement flatteur malgré la crise financière internationale. Le pays peut donc compter sur une certaine continuité aux affaires avec une maîtrise des grands dossiers et des grands chantiers en cours.

 

Quant au MMM, il n’a donné, à l’heure de ces lignes, aucune certitude quant au partage éventuel du fauteuil de PM, encore moins sur la hiérarchie de son front bench et de son Shadow Cabinet. Il leur reste à définir très concrètement leur programme tant sur le plan économique que sur divers dossiers sensibles, tels l’investissement étranger, l’éducation ou la sécurité publique. Quels bouleversements seraient à prévoir? La question est de toute évidence beaucoup plus attendue pour une équipe mauve postulant au changement et qui a eu cinq ans pour y travailler. La situation se décantera sans doute dans les jours à venir.

S’il faut exprimer des souhaits pour toute équipe sortante des urnes, je reste un peu dans l’expectative des deux manifestes. Cependant, il me semble que certains points méritent qu’on s’y attarde. Le dépoussiérage de notre Constitution n’est certes pas quelque chose qui mobilise les foules ou taraude la population. Le dernier gouvernement, malgré une majorité des trois quarts, avait échoué dans ses tentatives de réforme électorale, enlisée dans des marais de l’immobilisme, mais ne nous faisons aucune illusion, cette question demande un large consensus de la classe politique et une approche dépassionnée pour un dépoussiérage plus large que la simple reforme électorale.

Par exemple, le Président de la République a toute latitude pour s’exprimer, avec les réserves habituelles que l’occupant a de ses fonctions, et tous ont, à mon avis, utilisé cette liberté de voix et de ton selon leur personnalité propre , mais pourquoi ne pas clarifier l’implication des anciens Présidents ou Vice-Présidents dans une forme souterraine ou active de politique politicienne? Par ailleurs, à quoi sert une Vice-Présidence coûteuse alors que ses fonctions très occasionnelles pourraient être dévolues au Speaker de l’Assemblée nationale ou à un Chef Juge? Et dans la foulée, il faudrait aussi se pencher sur le code de conduite électoral et disposer d’un mécanisme judiciaire efficace pour trier les contestations sérieuses et donner une décision en ces cas dans les trois à six mois.

Quant à la réforme électorale, une dose de proportionnelle pourrait certes éviter des basculements type 60-0 par des glissements de 5-10% de l’électorat et mieux représenter les différents partis ou alliances politiques dans l’Assemblée nationale. Mais, en laissant de côté la question de dosage et de stabilité du gouvernement issu des urnes, je reste peu enthousiaste à l’idée des « party lists » et ce renforcement de deux catégories de députes: ceux ferraillant et élus d’une circonscription donnée avec des mandants qui exigent des comptes, et ceux qui n’auraient ni cette charge ni ces responsabilités. A ce rythme, autant simplement augmenter le nombre de députes correctifs, d’autant que, tout en respectant le combat méritoire de Résistans ek Alternativ, la transition vers l’abolition du système de best loser communal, ne semble pas encore pour demain. Au moins tous les députés auraient des responsabilités d’engagement auprès d’une circonscription.

Quant à l’idée que seule une dose de proportionnelle peut permettre aux femmes une meilleure représentation au Parlement, cela me semble tiré par les cheveux; en effet qu’est-ce qui empêche le MMM ou l’Alliance de l’Avenir de ne pas se contenter que de vœux pieux et de présenter au moins une douzaine de candidates chacun aux prochaines échéances? Faut-il légiférer pour que nos partis politiques mettent leur pratique au diapason de leurs déclarations d’intention?

Au niveau du fonctionnement du gouvernement, il semble qu’avec le bénéfice de l’expérience et l’évolution de l’économie nationale, certains ajustements au niveau des responsabilités ministérielles pourraient se révéler plus que judicieuses. Ainsi les activités de pêche, de gestion de nos îles éparses et d’une industrie halieutique de plus en plus importante, devraient mériter un ministère à plein temps. De même, dans le sillage des investissements considérables dans le secteur éducatif et les universités, la responsabilité d’un seul ministère qui chapeaute toute l’Éducation nationale du pré-primaire au tertiaire, sans compter la formation professionnelle pourrait être revue.

Au même titre, le ministère de l’Environnement devrait s’élargir aujourd’hui en un vrai ministère du Développement durable, dont le principal cahier des charges serait de chapeauter en concertation avec tous les autres intervenants la mise en œuvre du concept Maurice Ile Durable. Par ailleurs, nous ne pouvons qu’espérer que des professionnels se penchent sur les projections à moyen et long terme de nos besoins en eau et électricité compte tenu du rythme et des dimensions considérables des développements futurs annoncés: Zone de Tian-Li, ville nouvelle de Highlands ou encore les villes satellites autour d’Ébène. Cela nous amène à croire que le prix d’achat de l’électricité aux IPPs devra rapidement être tranché dans l’intérêt supérieur du pays.

Mais le plus important, à mon avis, demeure la question du regroupement mal avisé du ministère des Finances avec celui de l’ancien ministère du Plan et du développement économique. La gestion des Finances publiques, des recettes de la douane ou de la TVA, le suivi des rapports de l’Audit, la préparation et le suivi des budgets nationaux, sans compter celui de la lutte contre la pauvreté ou l’Empowerment, sont des activités qu’on imagine déjà très prenantes, exigeant des approches comptables. Au nom d’une prétendue meilleure efficience, on y a amalgamé ceux, économistes plutôt que comptables, qui devraient avoir pour mission de se pencher en permanence sur les grands axes de développement du pays, négocier les grands virages, surveiller les piliers de l’économie et conforter les nouveaux, gérer le Board of Investment, et surtout éviter les risques de la pensée unique qui dominerait toute l’économie, les Finances, le social, les actions ministérielles sectorielles et le développement. SSR avait-il tort de s’entourer à la fois d’un ministre des Finances et d’un ministre du Plan et du développement économique tous deux performants et appelés à collaborer mais avec des domaines spécifiques de responsabilité gouvernementale?

 

U.C.

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