Revoilà les sondages!

Tit-Bits

Le propre des sondages est de donner l’impression d’être un instrument fiable pour connaître l’opinion des Mauriciens à un moment donné. La méthode simple et rapide consiste en un entretien au téléphone d’un modeste échantillon de la population en procédant par quotas.

Les quotas par groupes d’age, de sexe, de lieu de résidence et d’autres facteurs tentent de restituer une représentation fidèle en miniature de la complexité des réactions de 900,000 électeurs, une tâche particulièrement ardue. Les sources et les marges d’erreur sont tellement élevées, même sans « bias » intentionnel, que leurs résultats sont à prendre avec des pincettes. Par exemple, les appels au téléphone fixe en pleine journée, peuvent fausser les résultats en privilégiant certaines tranches de la population (ménagères, troisième âge).

Les études les plus fiables à Maurice couvrent donc un échantillonnage minimum de 1800 répondants dont le dernier exemple fut sans doute le sondage Politis-DCDM conduit de janvier-mars 2013 pour le compte de l’express-dimanche.

Avec un maigre échantillonnage de seulement 600 répondants, il est effectivement très difficile de tirer des conclusions adéquates et précises, tellement les marges d’erreurs et d’incertitudes sont grandes. Encore plus si on conserve un nombre élevé de sous-catégories pour déterminer les quotas des sondés (âge, sexe, catégorie socio-professionnelle, lieu de résidence, ethnicité). Prenons un commentaire de la Rédaction même de l’express en date du 21 mars 2004 pour bien comprendre de quelles marges d’erreurs et de quelle crédibilité on parle avec 600 répondants.

En effet, alors que l’élection partielle de décembre 2003 avait vu la nette victoire du néophyte Rajesh Jeetah avec 50% des votes, le sondage Syntheses-l’express deux mois après (en février 2004) situait les intentions de vote de l’alliance PTr-PMXD-MR à 26,4 % et celle de l’alliance MSM-MMM-PMSD à 38,4 % dans le Nord du pays. De quoi surprendre le moindre quidam !

Invité, dans un entretien avec Jérôme Boulle, à expliquer une telle divergence avec les résultats électoraux réels deux mois auparavant, le responsable du sondage expliqua, sans doute avec grande justesse, qu’avec seulement 115 sondés (sur 600) dans le Nord, la marge d’erreur (plus de 10%) était telle que l’écart entre les deux alliances selon le sondage ne voulait rien dire, que les deux alliances politiques, l’une avec 26% et l’autre avec 38%, étaient sûrement à pied d’égalité, ce qui expliquait les résultats des partielles ! Bref, on aura compris qu’avec cette méthode, 26% = 38% = 50%!…

On retiendra de la Rédaction même de ce journal, que les enquêtes téléphoniques sur 600 sondés donnent au minimum des marges d’erreurs de 4-5% et que, dès qu’il s’agit d’analyse par sous-groupes (groupes d’âge, résidence, catégorie socio-professionnelle ou ethnicité), les marges d’erreur deviennent telles (10, 15 ou 20% !) que toute prétendue analyse ne vaut plus grand chose. Le dernier sondage dans l’express de ce lundi 10 novembre effectué encore une fois au téléphone sur 600 sondés ne déroge pas à ces règles de bon sens autant que de statistique. A prendre donc avec de très grosses pincettes.

Néanmoins, par simple curiosité, je me suis efforcé d’y jeter un coup d’œil, exercice qui ne m’a guère rassuré je dois l’avouer. En prenant une simple question « Vos pronostics – Quelle Alliance remportera les prochaines législatives 2014? », la réponse semble claire : globalement 58% des sondés pensent que ce sera l’Alliance PTr-MMM.

Seulement, voilà: à une autre question, combien de sièges pronostiquez-vous pour l’Alliance PTr-MMM, la somme des réponses « plus de 30 sièges » se monte à plus de 83% !… Allez comprendre! Les sondés sont-ils inconséquents ou irrationnels d’une question à l’autre? Ou plutôt, est-ce que 58%=83% ? Prenez la réponse qui vous convient ! Quant au « classement » des personnalités politiques, beaucoup auront sans doute souri de ces résultats plutôt fantasques.

Quelle importance accorder à ces méthodes douteuses? Les sondages devraient-ils être mieux régulés, surtout en période électorale? En tout cas, les marges d’erreur de tout sondage publié devraient être clairement et obligatoirement affichées.

Ce qui en passant nous permet de nous interroger : peut-on imaginer un seul instant que les bulletins d’information de la station nationale de radio-télévision publique aient été aux mains de groupes de presse privés? Brassant des « analyses » de quelques commentateurs, avec des prétendus spécialistes « indépendants », des interventions quotidiennes des mêmes quinze habitués radotant leurs meetings publics, avec des micro-trottoirs rigolos et de savants sondages-gnognotte? Heureusement que la population dispose de la MBC dans cette déferlante de bruit et de fureur.

 

* Published in print edition on 14 November 2014

 

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