T.Laveri

La Grande Responsabilité des Chefs politiques

 

A les écouter se critiquant les uns et les autres, le peuple pourrait bien conclure que les chefs politiques sont des ennemis jurés et que, si jamais l’occasion se présentait, ils n’hésiteraient pas à tuer l’opposant qui est ciblé comme étant un ennemi mortel!

 

 

 

Rien n’est plus loin de la réalité, qui est le contraire exact de la perception populaire. Malheureusement, c’est cette perception erronée qui influence le comportement des partisans politiques qui eux se vouent une vraie inimitié jusqu’au point, on l’a vu maintes fois, de se bagarrer physiquement et même de s’entretuer. Lequel des chefs politiques qui donnent l’impression de se regarder en chiens de faïence aujourd’hui ou même leurs partisans évoquerait la mémoire d’activistes politiques qui furent tués lors des précédentes campagnes électorales?

N’était-ce que, pour rappeler des tensions potentielles, la futilité de leurs querelles intestinales vu la souffrance qui en résulte pour les proches, et surtout que, passées les élections, entre les candidats qui s’étaient voués à la perdition et avaient entraîné dans cette logique leurs mandants, tout revient à la normale en ce qui concerne leurs relations personnelles. Eux ne s’entretuent que politiquement – leurs suiveurs, hélas ! arrivent à le faire en chair et en os.

Les chefs politiques dont les messages engendrent, même indirectement, ces tueries courent toujours – et ils continuent à tenir le langage provoquant qui risque de déclencher le même genre de dérapage. On a déjà vu un début de ce phénomène à Tranquebar, et les deux camps se blâment mutuellement comme on s’y attendait. Et peu importe qui dit vrai, le fait est que violence a été perpétrée – et la campagne politique n’est qu’à son début!

D’où l’importance de ce rappel de la grande responsabilité qui incombe aux chefs politiques. Qu’ils jaugent profondément la teneur des paroles qui s’échapperont de leurs bouches, car elles peuvent avoir une portée démesurée. Tout le monde sait que souvent pour donner l’impression d’être crédibles ils tombent dans le clientélisme communal et au milieu des ‘noubannes’ ils exhortent ces derniers à se voir comme des victimes permanentes de l’Autre – dont l’identité est implicite dans leurs propos. Dans cette période d’une atmosphère déjà surchauffée, ils osent jouer sur le clavier des différences et la rengaine ‘majorité v/s minorité’ dans ces milieux occultes nocturnes, tout en clamant être les vecteurs uniques de « l’unité nationale » quand ils font face à la galerie publique. Que les électeurs donc se tiennent sur leur garde face à ces hypocrites !

Tous les chefs devraient envoyer un signal fort qu’ils ne toléreront aucunement des propos qui risquent d’attiser la haine communale, et que les références sectaires n’ont pas de place dans une île Maurice moderne.

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Jocelyn Grégoire: Coupe de la réalité mauricienne

Ceci est particulièrement applicable à Jocelyn Grégoire, qui fait carrément de la politique autant qu’il le nie. Nul n’est dupe: que peut bien discuter le chef d’une formation avec le label d’appartenance communautaire unique quand il rencontre des chefs de partis politiques en pleine période électorale? C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il s’est déplacé d’outremer.

Ceci dit, hélas ! Il n’est pas le messie qu’on avait projeté être à la création de son groupe, la Fédération des Créoles mauriciens. Car les choses ont évolué, comme a été noté dans La Voix Kreol. Le nombre de personnes présentes à ses réunions lors de son dernier passage est passé de milliers à des centaines, et tous les Créoles ne partagent pas nécessairement ses prises de position et ses démarches. Edley Chimon a démissionné de la FCM, d’autres membres de l’exécutif ont déploré publiquement le manque de démocratie dans cette instance assujettie plutôt à la voix unique. La MMKA, autre mouvement de Créoles, s’en dissocie aussi.

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Un Américain à Maurice

Vivant depuis plusieurs années aux Etats-Unis, Jocelyn Grégoire appartient à ce groupe de Mauriciens qui, loin du pays natal, garde encore l’image de Maurice qu’ils avaient quittée. Ils ne se rendent pas compte que les choses ont bien évolué depuis leur départ, et quand ils reviennent pour des vacances ou de courts séjours, ils essayent de trouver les repères d’antan. S’il n’y en a pas, ils se l’inventent, surtout si leur regard est embrouillé par des sorties ponctuelles hors des enclaves, telles que Balaclava et autres havres.

C’est cela le phénomène Jocelyn Grégoire, et pas de sa faute, parce qu’il a été dénaturé à l’américaine. Comme ces autres Mauriciens, il a la fâcheuse tendance de voir Maurice à travers le prisme de sa terre d’adoption. Là-bas, malgré l’élection d’Obama à la présidence, une cour a dû intervenir récemment dans le sud du pays pour que les enfants noirs ne soient pas ségrégués dans une école et ce, en dépit d’une loi anti-ségrégation qui fut votée dans les années 1950.

Chose impensable dans l’Ile Maurice de nos jours, où tous les enfants mauriciens se côtoient à tous les niveaux du système d’éducation. Grégoire sait-il que sous les régimes des Jugnauth et Ramgoolam toutes les familles habitant les cités eurent l’occasion d’acheter leurs maisons pour la somme nominale de Rs 1000 avec titres de propriété en main? Est-ce qu’il croit que les cités où habitent une grande partie des Créoles – car il y a aussi des familles appartenant à d’autres communautés, même en moins grand nombre – sont des nids de drogués ou des laissés-pour-compte comme on en voit dans les quartiers de certaines villes en Amérique?

Bien au contraire! Il n’a qu’à s’y rendre, les yeux grands ouverts, et il verra la transformation qui s’est opérée tant dans l’infrastructure que dans les habitations individuelles, améliorées et embellies parce que ces honnêtes gens, qui y résident ont le souci et le goût de s’améliorer. Et ils peuvent le faire parce qu’ils travaillent et gagnent leur vie. Et ils sont présents dans toutes les professions qui se pratiquent à Maurice, et même excellent dans certaines sphères comme le sport, ce qui fait honneur à tous les Mauriciens, qui n’en cachent pas leur admiration et leur fierté.

Bien sûr qu’il y a des Créoles qui sont moins bien lotis – tout comme il y en a dans les autres communautés aussi. D’ailleurs, des personnalités telles que Cassam Uteem, qui a établi un programme sur la pauvreté, l’a dit haut et fort – qu’il y a des pauvres dans toutes les communautés et pas uniquement dans une seule. Mais ce serait malhonnête de la part de quiconque de venir dire qu’ils ont été délibérément délaissés par les gouvernements successifs.

Pourquoi Jocelyn Grégoire ne se renseigne-t-il pas auprès de l’Empowerment Fund, structure mise en place par le gouvernement de Navin Ramgoolam pour ‘empower’ ceux au bas de l’échelle, et dont des milliers de Créoles en ont bénéficié?

Faut-il rappeler à Jocelyn Grégoire que l’éducation est gratuite à Maurice depuis 1975? S’est-il demandé si l’Eglise catholique a joué suffisamment son rôle auprès de la communauté créole pour la motiver à prendre avantage de cette opportunité? Avant de semer ce qui pourrait être perçu  comme une incitation à la haine raciale, que le bon abbé fasse son devoir et obtienne une vue d’ensemble plus objective de la situation non seulement de sa communauté, mais aussi des autres communautés qui toutes ont mené ensemble la lutte pour l’amélioration de leur niveau de vie. Et nombreux sont ceux qui continuent à lutter, à travers l’éducation ou l’entrepreneuriat, et avec l’aide des Mauricens de tous bords et toutes communautés confondues.

En ce qui concerne le recrutement dans la fonction publique, son grand dada, Jocelyn Grégoire préconise-t-il que cela se fasse sur la base de couleur de peau ou de religion, ou bien sur la base de qualifications comme cela se fait aux Etats-Unis? Et qui a permis à ce dernier de faire immensément de progrès?

La grande majorité de Créoles dans ce pays se comportent en bons citoyens et vivent en bon voisinage avec leurs compatriotes de différente foi ou communauté. Tous les Mauriciens ont des liens d’amitié qui dépassent les barrières de race, de religion ou de communauté. Certes, il y a des personnes au bas de l’échelle qui sont en difficulté et qui méritent qu’on les aide à travers le social ou la politique à surmonter leurs difficultés et trouver une meilleure place dans la vie. Et largement, ce sont des programmes gouvernementaux du genre Empowerment Fund qui seront toujours les mieux appropriés pour apporter le soutien nécessaire.

Jocelyn Grégoire est sûrement un bon prêtre et doit faire du bon travail auprès de ses ouailles aux Etats-Unis. Il serait plus prudent de sa part de s’adonner pleinement à sa vocation première là-bas au lieu de jouer à l’apprenti sociologue et politologue dans une Ile Maurice moderne… Il ne s’y retrouve pas, et n’en connaît pas la profondeur et moins encore a-t-il vécu l’expérience du développement tant dans l’aménagement territorial que dans l’évolution des mœurs de l’Ile.

Bon séjour au touriste Jocelyn Grégoire. Que ses hôtes prennent bien soin de lui !

T. Laveri

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