Sans Port-Louis, que serons-nous?

Porlwi By Light – illuminé : un évènement qui fait sensation. Projet culturel dans lequel on a voulu mettre tout le paquet ! Chaque catégorie – le commerçant, le marchand ambulant, l’artiste, le designer – tente pour l’occasion de récolter quelque chose.

 Pour l’un le profit, pour l’autre les louanges, et pourquoi pas le plaisir de se sentir valable ? D’ailleurs, les questions avant l’évènement montraient bien que cela méritait le déplacement. Toutes les couches sociales des autres villes et villages ont ressenti le besoin de visiter Port-Louis avec un autre regard. Pas ce Port-Louis où l’on a du mal à circuler, à se garer, où l’on transpire gros, obligeant parfois à avaler le fameux alouda du bazar et que l’on veut quitter avant l’heure de pointe quand tous se ruent vers leur voiture ou les Blue Line et les autres autobus de la gare Victoria ou de la gare du Nord.

Mais Port-Louis, c’est aussi un port où ont débarqué Mark Twain, le fameux auteur de Tom Sawyer, Bernardin de St Pierre qui s’en inspire pour son roman Paul et Virginie, Charles Baudelaire bien connu pour Les fleurs du Mal, du prince malgache très controversé – Ratsitatane, de Mahatma Gandhi, et de tant d’autres personnalités que bon nombre de nos jeunes ignorent.

Comment oublier le Jardin de la Compagnie qui a, (malgré la critique sur les rencontres douteuses) surtout le soir, des arbres et des allées qui n’ont rien perdu de leur histoire et de leur charme. Les bancs sont rarement vides. Des gens profitent de l’ombre du pied lafourche pour lire le journal.

Non loin de là, le fameux Cinéma des Familles qui faisait le bonheur de tant de gens des années 1960, 1970. La grande époque des films de Nargis, Meena Kumari, Raj Kapoor, Sunil Dutt, Dilip Kumar, entre autres, qui n’attiraient pas uniquement les jeunes et encore moins les adultes célibataires mais des pères et mères avec leurs enfants à qui ils faisaient découvrir les vedettes de l’Inde. Evidemment le cinéma Majestic n’attirait pas moins les spectateurs avec les matinées enfantines et les films américains qui plaisaient beaucoup aux collégiens après leur semaine d’école.

Au port, aujourd’hui, à peine remarque-t-on la statue de Labourdonnais et des autres dont celle de Sir Seewoosagur Ramgoolam. Pourquoi ? L’on s’intéresse plus aux galeries du Caudan car le port n’est plus ce qu’il était avec ses sirènes et fumées.

Port-Louis sans le Champ de Mars perdra son cachet. Comme l’écrit le grand poète Léoville L’Homme dans une Lettre à J.A. Duclos, « le terrain où toujours la communauté mauricienne se rencontre pour oublier les soucis qui la travaillent ». La foule compacte de parieurs et de curieux fait des va-et-vient sur les pelouses où circulent des marchands ambulants pour apaiser leur soif ou se gaver de beignets ou autres fastfoods. Véritable atmosphère de kermesse avec la musique assourdissante du folklore local et des chansons de Bollywood ! La coutume veut que ce soit festif même si certains pronostiqueurs ou parieurs y perdent leur chance de faire fortune.

Sait-on que la première journée de courses inaugurée le 25 juin 1812 suit la tradition britannique ? En effet la gentry fortunée, à laquelle appartenait Sir Colonel Draper, était passionnée des courses de chevaux. Malcolm de Chazal qui adorait se promener dans les rues de Port-Louis rappelle pour le 150e anniversaire du Turf Club que celui-ci est « allié au Jockey Club d’Angleterre, en raison de sa glorieuse ascendance. » Les premiers coursiers sont des chevaux – Arabponies – qui galopaient dans les principales courses.

Les années sont passées et les évènements successifs n’ont pas fait disparaître la culture hippique ni la passion du jeu. Clement Charoux dans L’Ile Maurice aux Temps des Diligences – 1932 décrit dans un style pittoresque une journée des courses : « Les visiteurs animent les rues, assiègent perruquiers, pâtissiers et restaurateurs. Une maison s’est transformée en hôtel pour soixante personnes ; plus loin deux ou trois auberges moins vastes se sont improvisées… Revues, musiques, danses, feux d’artifice, complèteront les plaisirs du sport et de la table.»

Dans la « plaine », ce n’est pas que la population de Port-Louis qui vient s’y divertir. Maurice Galea dans son livre célébrant le centenaire du Mauritius Turf Club affirme que c’est un loisir populaire. Combien vrai ! Tous les commerces urbains, les banques et bureaux ferment alors que, sur les propriétés sucrières, le travail dans les champs s’arrête pour permettre à la population d’applaudir les meilleurs coursiers et se distraire.

Dans les années 1950, des familles possédant une maison coloniale ou autre type d’habitat se mettent sur les balcons pour suivre les courses. C’est l’occasion d’inviter les cousins, les proches et de passer des moments époustouflants pour s’imprégner de la culture hippique. Les souvenirs, les miens également, restent indissolublement liés au galop des chevaux, à la poussière qui s’élève, aux cris de la foule avec le dernier furlong, à des images d’enfants juchés sur les épaules de leur père sous un ciel de plomb.

Sait-on que c’est à Port-Louis, Champ de Mars, que l’on a eu le grand meeting des travailleurs présidé par Dr Maurice Curé ? Première célébration de la Fête du travail ! Sait-on que l’on a hissé le drapeau mauricien avec l’indépendance si chèrement acquise ? Sait-on que le tombeau Malartic s’y trouve ?

Aujourd’hui Port-Louis revit avec le festival des lumières. Un moment de détente mais surtout d’achat pour une société consumériste. La capitale n’a pas que des bureaux, des grandes banques, des commerces, ou son hôpital Civil. Elle a tant de coins, de pierres, de monuments et de rues qui rappellent une époque. Les musées et festivités ne suffisent pas. Sans Port-Louis, nous n’aurons pas de nouvelles de l’actualité car l’emplacement des journaux s’y trouvent là. Sans Port-Louis pourrons-nous vraiment penser qu’ailleurs c’est aussi riche d’histoire ? Que l’on y réfléchisse !

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