L’enjeu de la partielle : les prochaines législatives

L’objectif principal de Bérenger n’est pas de remporter cette partielle. Il vise avant tout les législatives

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Une première remarque d’emblée: le writ pour la tenue de la partielle étant émis, le Remake 2000 se dissipe. Mais cela ne veut pas dire nécessairement mort et enterré. Car, comme dirait l’autre, « tout est possible en politique ». Surtout à Maurice. Confidence pour confidence, je persiste à penser que le MMM n’a pas du tout l’intention de reprendre le MSM comme allié, malgré les profondes génuflexions à peine cachées de certains envoyés spéciaux du MSM. Non pas en raison des démentis du leader mauve mais bien compte tenu des conditions objectives qui sont favorables au MMM, notamment la quasi-certitude qu’il n’y aura pas de rabibochage PTr-MSM. Et ses chances de victoire en ‘solo’ aux prochaines législatives sont bien réelles. En tout cas, Paul Bérenger fait tout en termes de ‘move’ sur l’échiquier, quitte à dérouter les analystes avertis, pour éviter un ‘remake’ Bleu-Orange-Rouge de 2010 imbattable.

Soyons clairs : l’alliance Lepep en l’état actuel des choses n’a aucune chance de remporter les prochaines législatives. Pour plusieurs raisons : (1) Le départ du PMSD de l’Alliance Lepep. Dans les 49% de l’Alliance Lepep de la consultation de 2014, la contribution du PMSD se situait autour de 12-13% des suffrages exprimés.

(2) L’effondrement du ML estimé à 6-7% en 2014. Les récents propos vachards du député MSM Bashir Jahangeer dans les colonnes de Le Défi à l’encontre de l’autre VPM Collendavelloo, je cite : « c’est une vraie catastrophe, il accepte ce que ses officiers lui imposent », enfoncent davantage ce parti. Sans compter le récent dérapage du Deputy Chief Whip Ravi Rutna.

(3) Les frasques quasi-quotidiennes du toujours vice-Premier ministre Soodhun, répertorié ministre des affaires islamiques en Arabie Saoudite, autoproclamé « esclave » de la famille Jugnauth. Résultat : baisse de plusieurs points.

(4) Les nombreux cas de népotisme et de corruption allégués. Dernier en date : le scandale allégué Bet365 impliquant l’Attorney General que le PM a été forcé et contraint de virer. Si on était Incas, on dirait que les dieux s’en vengent. Je rappelle que le principal thème de campagne de l’alliance Lepep en 2014 était la dénonciation de l’immoralité politique de l’ancien régime. Ce qui avait permis au MSM de faire « virer » dans leur camp plus de la moitié de l’électorat travailliste. Ce n’est pas certain que ce segment approuve le MSM sur cette question. Encore quelques points envolés.

Au final, la force potentielle de l’alliance Lepep en l’état actuel et sans le PMSD fond comme neige et doit se situer autour de 10-15%. Donc aucune chance aux prochaines législatives dans une lutte à trois ou quatre qui se dessine. D’ailleurs le député Jahangeer – encore lui – a bien compris la situation et sans détour invite ceux qui veulent participer au mercato politique à le faire, je cite « entre septembre 2017 et mars 2018 » – admirez la précision – et se place lui-même sur le marché en signalant une préférence au PMSD. D’où l’obligation de chercher d’autres apports : à travers un Remake, de plus en plus hypothétique ou la conquête de l’électorat travailliste à défaut du PTr contrôlé par Navin Ramgoolam.

Je suis convaincu que le MSM était conscient dès le départ que les conditions entourant leur victoire de 2014 étaient exceptionnelles, je dirais uniques, et qu’il fallait trouver un autre stratagème pour conserver durablement le pouvoir. Ayant réussi à attirer la moitié de l’électorat travailliste, leur nouveau cible, c’est l’autre moitié. Pour mémoire : en 1983 le MSM d’Anerood Jugnauth avait réussi à contrôler le PTr et donc son électorat, ce qui leur avait permis de remporter les élections de 1983 et 1987. Les énormes pressions extérieures, et à l’intérieur même de son parti, ainsi que la situation politique délicate de l’époque avaient fini par faire plier un SSR casé au Réduit. Pire : un projet de fusion du PTr et du MSM sous le leadership d’Anerood Jugnauth avait même été concocté mais avait échoué grâce à la résistance de Sir Satcam Boolell, Vijay Venkatasamy, Ramesh Jeewoolall et James Burty David, entre autres.

L’objectif du MSM est resté le même : l’accaparement de l’électorat travailliste pour se maintenir au pouvoir durablement. Il faut dire qu’une bonne moitié avait « viré » dans le camp MSM en 2014 mais, étant mouvant par définition, ce segment n’est pas acquis définitivement. Il y a donc du boulot. A cette fin, il leur faut d’abord éliminer Navin Ramgoolam. Ne pouvant le « caser », ils ont adopté la manière forte. Cela s’est traduit par une douzaine d’affaires – excusez du peu — qu’on lui a collées sur le dos, dont neuf sont classées sans suite. Plus la diabolisation continuelle et brutale contre sa personne à l’exemple des propos récurrents « hors sujet » du Premier ministre et le ministre mentor imité par le sémillant vice-Premier ministre Soodhun, qui a eu droit lui à un superbe rabattage de caquet, qui restera dans les annales, de la part d’une citoyenne lambda – Nirmala Maruthamuthu.

Dès lors c’est bien sous l’angle de cette tentative de mainmise sur l’électorat travailliste que je livre mes propos sur la partielle au N° 18 ayant comme point de mire les prochaines législatives. En effet, cette partielle se présente aux yeux du MSM comme une occasion d’enfoncer Navin Ramgoolam. Les récentes déclarations à peine voilées de certains dirigeants Lepep montrent clairement que le curseur est pointé sur la personne même du leader travailliste et non le candidat rouge. D’où leur volonté de faire chuter Arvin Boolell pour atteindre la cible Ramgoolam.

Ce qui est certain, c’est que l’Alliance Lepep va « participer d’une manière ou d’une autre » comme l’avait rappelé Collendavelloo, contredisant le fameux et boiteux « c’est pas notre élection… »

Quelle forme peut prendre cette participation ? 1) Désigner un candidat « pour la figuration ». Certes, cela leur procurera une plateforme anti-Ramgoolam mais une défaite –prévisible – entraînera, à coup sûr, l’effet contraire. Et une victoire –probable — du candidat travailliste profitera évidemment au leader des rouges. Donc option peu probable.

2) Plus probable : Ne pas désigner de candidat. Mais « participer » quand même en « aidant » — même sous tapis — la candidate MMM face au candidat travailliste, comme laissent entendre certains stratèges de l’Alliance Lepep. Là où les choses se compliquent, accrochez-vous, c’est que Bérenger ne veut pas de cette générosité « pourrie » (sic). Il faut s’attendre à une sortie en règle du MMM — ça va saigner –– contre celui – un ex — à qui on attribue cette proposition d’aide. L’ex demande en retour que Bérenger soit un peu plus gentil avec Lepep. Et puis quoi encore !

Il convient de souligner que l’objectif principal de Bérenger n’est pas de remporter cette partielle. Il vise avant tout les législatives. Il l’a répété maintes fois. Au fond cette partielle lui sert simplement de test. Voir ce que cela peut donner lorsque le MMM se présente seul et en alignant une femme, novice de surcroît. Plutôt en termes de score qu’en termes de victoire ou défaite. D’autant plus qu’une victoire du candidat travailliste ne serait pas pour lui déplaire dès lors qu’il espère à ce que cela engendrerait de la pagaille au sein du PTr. Une certaine fragilisation du PTr lui serait bénéfique dans le cadre d’une confrontation à trois ou quatre lors des prochaines législatives.

3) Reste une « participation » passive, non envisagée à ce jour par les stratèges de Lepep : Ne pas présenter de candidat, rester complètement en dehors de l’arène et tenter de s’approprier le fort taux d’abstention prévisible – en tout cas plus important que les 20% des partielles des années 2000 — compte tenu du dégoût ambiant. Ce serait un peu osé certes mais au moins l’alliance Lepep éviterait ainsi une terrible déconfiture directe face à Ramgoolam avec l’option 1. Ou une volée de bois vert du MMM pour leur proposition d’aide « pourrie » (re-sic) avec l’option 2.

 

  • Published in print edition on 22 September 2017

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