Là où ça coince…

Alliance MMMMSM
Le feuilleton « koz-kozé » risque de prendre plus de temps que prévu. D’autant plus que la Présidente n’a pas l’intention de démissionner…

Un beau million de roupies : c’est la coquette somme qui aurait été dépensée par la non moins coquette Présidente de la République pour ses besoins en bijouterie, vêtements de luxe, produits de beauté… Tout cela, selon l’express, généreusement offert – remboursé selon la Présidente — par le sulfureux Alvaro Sobrinho.

“Le MMM et le PTr sont les seuls à pouvoir aller aux élections sans alliance et de les remporter. Ce qui n’est pas le cas du MSM. Le parti orange en est ainsi, de loin, le principal demandeur car, en outre, il y va de sa survie. En effet, une lutte à trois dans le système électoral privilégiant le ‘vote utile’ signifie sa disparition sans réel espoir de renaître. La confidence de SAJ sur la possibilité d’une alliance MSM-MMM renforce le ‘bargaining power’ du MMM…”


Mais connaissant l’homme d’affaires qu’est Sobrinho, il n’est pas exclu que cette offrande — ou prêt — ait une certaine contrepartie. De quoi enfoncer davantage le régime Lepep. Rappelons que la moralisation de la vie publique était l’un de ses deux principaux thèmes de campagne en 2014. Je ne vais pas étaler ici la liste des entorses en matière d’éthique du régime Jugnauth. Trop longue… C’est désespérant…

L’autre promesse de campagne étant, pour rappel, le fameux miracle économique… devenu mirage économique. Un taux de croissance à 4%, loin des 7% promis ; un chômage persistant touchant en majeure partie les jeunes ; un pouvoir d’achat particulièrement écorné ; une colossale dette publique de Rs 300 milliards, véritable chape de plomb sur le dos des taxpayers présents et futurs ; paupérisation de la classe moyenne ; la pauvreté touchant de plus en plus la classe ouvrière ; un écart riche-pauvre de plus en plus colossal ; une pauvreté absolue qui s’accroît… etc, etc. On est donc extrêmement loin du miracle économique promis. Le tout dans un climat de vaudeville chaotique.

Ayant donc échoué sur ces deux axes, l’alliance Lepep, qui entretemps a perdu le PMSD, n’a aucune chance de rééditer sa performance de 2014. D’où les tonnes d’efforts déployés en direction du MMM pour une alliance salvatrice. La confidence de Sir Anerood Jugnauth  (Le Défi, 8 mars 2018) sur la possibilité d’une alliance MMM-MSM n’est pas passée inaperçue. Il faut dire que le MMM, fragilisé par son énorme débâcle de la partielle de décembre dernier et ses chamailleries internes, alors que l’option Boolell est enterrée semble être tenté par une nouvelle aventure avec le MSM.

Mais les conditions du MMM seraient drastiques comme à l’accoutumée. On se souvient des conditions imposées au PTr par Bérenger en 2000, et celles encore plus draconiennes en 2010 – une « blacklist » plus longue de personnalités travaillistes à écarter et un nombre de tickets passant de 25 à 28 « non-négociables ». En 2014, le PTr fragilisé par la « cassure » PTr-MSM, avait fini par s’entendre avec le MMM dans le cadre d’un « accord » incompréhensible et incompris.

Ce qu’on peut retenir c’est que les exigences du MMM pour une alliance se durcissent d’élection en élection. Malgré la grande fragilité dans laquelle le MMM se trouve, je ne suis pas certain qu’il compte revoir à la baisse ses conditions. D’autant plus que sa base électorale, à ne pas confondre avec son « hard-core » – ce qu’il en reste -, est majoritairement hostile à toute alliance « mauvaise et pas claire ».

L’abstention massive lors de la partielle de décembre dernier des électeurs mauves influencés par la rumeur de « koz-kozé » MMM-MSM, d’ailleurs lancée en premier par des militants eux-mêmes, en était la démonstration éloquente.

Ceci dit, une alliance MMM-MSM est « still on ». Je pense que l’électorat MMM, en présence d’une « bonne » alliance, reviendra à de meilleurs sentiments. Par « bonne », entendez un accord type 2000 avec certaines retouches à l’avantage du MMM. J’en vois six principales conditions acceptables pour l’électorat mauve :

(1) une « blacklist » comprenant ceux impliqués dans des “affaires”,
(2) l’exclusion du Mouvement Libérater de Collendavelloo de plus en plus dans le collimateur de Bérenger,
(3) 30-30 pour les tickets mais avec au moins une vingtaine de candidats MMM dans les circonscriptions urbaines,
(4) des législatives anticipées,
(5) une réforme électorale introduisant une dose de proportionnelle, et
(6) le partage à l’israélienne du prime ministership.

Les cinq premières exigences ne devraient pas poser problème. En revanche, de mon point de vue, la sixième condition se révèle particulièrement compliquée. C’est là où cela coince. En effet, le MSM ne semble pas souhaiter le partage du prime ministership et verrait plutôt le leader du MMM « step aside » et aller au Réduit. A noter que le partage du prime ministership n’avait pas été un franc succès en termes de suffrages pour le MSM en 2000 malgré la victoire de l’alliance MMM-MSM, et bien moins en 2005.

Si le MMM entend retrouver une bonne partie critique de son électorat ayant viré en 2014 et ayant boudé les urnes en décembre dernier, la seule option – le choix de se présenter seul mis à part – demeure le partage du prime ministership dans le cadre d’un partage clair du pouvoir.

Dans ce bras de fer, le MMM est véritablement en position de force. Ce parti et le PTr sont les seuls à pouvoir aller aux élections sans alliance et de les remporter. Ce qui n’est pas le cas du MSM. Le parti orange en est ainsi, de loin, le principal demandeur car, en outre, il y va de sa survie. En effet, une lutte à trois dans le système électoral privilégiant le ‘vote utile’ signifie sa disparition sans réel espoir de renaître. La confidence de SAJ sur la possibilité d’une alliance MSM-MMM renforce le ‘bargaining power’ du MMM.

D’où les efforts qui se multiplient pour faire en sorte que le MMM cède sur son exigence de partage du prime ministership. D’où, entre autres, la nomination de Raj Meetarbhan comme conseiller du Premier ministre. J’ai du mal à penser, comme beaucoup d’autres, que sa nomination – une de plus – auprès du PM sert à faciliter la transparence en matière de communication, ou encore pour promouvoir “l’éthique de la vie publique”, valeur qu’il dit chérir. Tout à son honneur, mais là c’est mal parti. A peine nommé, voilà que le feuilleton Présidente-Sobrinho est relancé.

Soyons sérieux : ce proche de Paul Bérenger –– pendant très longtemps jusqu’au « virage amorcé en 2014 » (sic) — tout en ayant été très critique envers les Jugnauth père et fils, n’est certainement pas recruté pour « l’éthique, la transparence, etc…», mais bien pour servir d’intermédiaire dans les âpres négociations d’alliance MMM-MSM.

C’est bien tenté, mais connaissant Bérenger qui est loin d’être un tendre, je ne suis pas certain que cela puisse faire bouger les lignes ; d’autant plus que le nouveau communicant du PM dans son entretien au Défi du 24 février a probablement commis une gaffe de ‘communication’ en qualifiant de « répugnante », la ‘position politique de Bérenger en 2014’.

Bref, le feuilleton « koz-kozé » risque de prendre plus de temps que prévu. D’autant plus que la Présidente n’a pas l’intention de démissionner comme l’avait annoncé le PM. C’est une véritable claque qu’elle inflige au PM entamant ainsi la crédibilité de parole et l’autorité premier ministérielles. Des éléments essentiels dans les négociations d’alliance avec un Paul Bérenger connu pour être un rude négociateur.

 

* Published in print edition on 16 March 2018

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