Lybie : Quand les Noirs « paient » pour Kadhafi 

Chronique de Jean-Baptiste Placca

Devant la joie débordante du peuple libyen, ivre du simple bonheur d’en avoir fini avec le colonel Kadhafi, la décence commande de taire un peu les querelles africaines sur la légalité des interventions extérieures. Pour entendre la mélodie de la délivrance, qui émane des flots humains convergeant vers Tripoli, il faut faire silence.

Certes, la fracture demeure entre ceux qui ne voudront prendre en compte que la possibilité enfin offerte au peuple libyen de se lancer à la conquête de la démocratie, et ceux qui n’en finissent pas de réprouver le rôle de l’Occident dans la guerre qui a permis aux rebelles de venir à bout du régime du « Frère Guide ».
Après la chute de Ben Ali puis de Moubarak, le colonel avait encore la possibilité de prendre les devants, avec des initiatives d’ouverture démocratique. Pour n’avoir pas su offrir à son peuple un peu de la liberté qu’elle réclamait, lui et sa famille ont tout perdu. Seriez-vous surpris, si l’on vous disait que nombre de ces manifestants qui juraient, hier, sur la Place verte, de donner leur sang pour sauver le régime, font partie de ceux qui célèbrent aujourd’hui la fin de la dictature, sur cette même place, désormais dédiée aux martyrs ?

Entendre les appels de détresse

A une semaine près, le colonel aurait célébré, ce jeudi 1er septembre, le quarante-deuxième anniversaire de ce qu’il faut bien appeler son long règne. Le voilà obligé de se cacher, pour sauver sa tête, mise à prix pour un petit million et demi de dollars. Quelle offense ! Quelque part dans le désert (ou déjà dans un pays étranger), le colonel prendra peut-être le temps de méditer sur la vacuité de ce jeu dangereux, qui consiste à mesurer sa puissance au nombre de décennies passées au pouvoir. « On n’a plus peur ! », disent les Libyens. Cette phrase, nous l’avons beaucoup entendue à Tunis et au Caire. Quelle meilleure façon, pour ces peuples, de dire au monde qu’ils étaient tenus par la terreur !
Il faut donc vraiment faire silence, et souhaiter le meilleur au peuple libyen. Et, qui sait, ce silence permettra peut-être d’entendre les appels de détresse des Africains de peau noire, livrés à la vindicte de certains Libyens, sous prétexte que le colonel Kadhafi a eu recours à des mercenaires subsahariens pour écraser la rébellion.
Le sort de ces milliers de Noirs en danger de mort en Libye est certainement plus préoccupant que les petites querelles africaines, y compris celles qui se déroulent au sein de l’Union africaine, à propos de la reconnaissance du CNT, l’organe de transition libyen.


* Published in print edition on 16 September 2011

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