« Si Navin Ramgoolam est élu sans anicroches à la première présidentielle à un tour, les autres élections poseront problème»

Interview: Me Sonah Ruchpaul

« L’égalité de tickets ne donne aucun avantage au MMM, car en cas d’une cassure, le transfugisme – nourri par l’ambition du député qui attend son tour, rassure le PM en exercice »
« La représentation proportionnelle (PR) est renvoyée aux calendes grecques, même dans le cas d’une victoire aux trois quarts, avec les tirs à la courte paille qui s’ensuivront »

Après la dissolution du Parlement, ce sont les résultats aux prochaines élections générales par chaque alliance, par chaque parti politique et aussi par circonscription qui captivent l’attention de plusieurs Mauriciens. Quelles stratégies les partis politiques – grands et petits – vont-ils mettre en place pour gagner la sympathie des votants ? A quel type de manœuvres la population sera-t-elle exposée ? Et que se passera-t-il à l’issue des élections législatives ? Y aura-t-il un référendum ou non pour la constitution de la deuxième République ? Sonah Ruchpaul répond à nos questions.

Mauritius Times: Voilà! C’est fait. La dissolution du Parlement, comme annoncée par l’ancien leader de l’Opposition, aujourd’hui allié de Navin Ramgoolam, a eu lieu lundi dernier, et le train va donc pouvoir démarrer vers cette grande aventure qui, selon les dires de Paul Bérenger, consiste à transformer Maurice par le biais d’un « programme bien ambitieux, une merveille comme programme en un pays phare, un modèle d’unité dans la diversité ». Rien ne semble, à ce stade, pouvoir stopper ce train, qui devrait, sur la base de l’arithmétique électorale, remporter une très grande victoire. Qu’en pensez-vous ?

Sonah Ruchpaul : Comme vous le dites, c’est une aventure, avec deux aventuriers qui risquent de ne pas se retrouver dans l’ « Utopie » de Thomas More, dont rêve Bérenger. Si le leader mauve ne consulte pas de gourou, Ramgoolam gagnerait de faire un petit saut au Tranquebar de son adolescence.

Tout a été bien signé et chacun des deux compères affirme à l’autre que « his word is his bond ». Chacun se rappellerait-t-il que dans l’ « Utopie » de Sir Thomas More, le vieux cardinal avait écrit : « Kindness and good nature unite men more effectually and with greater strength than any agreements whatsoever, since thereby the engagements of men’s hearts become stronger than the bond and obligation of words»?

Je dirais à Bérenger que l’engagement pris envers Sir Anerood Jugnauth en public à l’hôtel Manisa était celui de deux cœurs, mais qu’il a préféré celui des mots. Donc, Beware. Les mots s’interprètent. De Odgers à Gatley ou Carter-Ruck. De Magna Carta au Hansard. Les cœurs se parlent et s’entendent. Les mots se détruisent.

Je n’ai jamais cru que le train Bérenger-Ramgoolam était le chariot de Brahma. Il a mis des semaines, voire des mois, pour se lancer, avec des tâtonnements et même des arrêts de moteur. L’engin, sensé tout écraser sur son passage, s’arrête en chemin pour organiser des tours de magie comme l’arrivée de Sithanen au récent meeting rouge à Quatre Bornes, planifiée à la Ramgoolam, comme celle du dimanche 12 octobre, où Callikan s’efforcera à exhiber ses derniers talents. On verra sa performance dimanche, où on le suspecte de vouloir surpasser celle de 2010. Pourquoi, donc, doit-il partir, si son rendement promet d’être si beau ? N’est-ce pas parce qu’il risque de se mettre plus tard à la disposition d’un seul des partenaires, aujourd’hui soudés ?

Vous parlez d’arithmétique électorale. Trois mois avant le 11 juin 1982, je m’étais fait gronder par feu Sir Satcam Boolell pour avoir prédit les 60-0 de cette année-là. Sir Satcam avait remarqué que j’avais baissé les bras à ce stade de la campagne et m’en avait fait part. Je lui avais rétorqué honnêtement que nous faisions face à un 60-0.

« To pensé mo même pas pou élu ? » m’avait-il demandé.

Je lui avais répondu : « Bien sûr, bonhomme là même dans Triolet pas pou éli. »

J’avais froissé, de toute évidence, son orgueil de ministre et de député de la circonscription No 10 pendant les derniers trente ans. Vingt-quatre heures avant le scrutin, j’avais disparu de Montagne Blanche-Grande Rivière Sud Est et je n’ai pas été vu même aux alentours de ma maison de Quatre Bornes avant 16 heures de sommeil. Je n’avais pas assisté au dépouillement du 12 juin.

Quelques jours après son accession au poste de Premier ministre (PM) en octobre 2003, Bérenger m’avait appelé au téléphone, après avoir refusé de le faire depuis 1973, tellement il m’en voulait d’avoir dissous le comité MMM établi par lui et moi-même à Londres en cette année-là. Après tant d’années d’éloignement, je ne savais quoi lui dire. Je n’avais fait que l’écouter me dire tout et rien. Puis j’avais raccroché sans un mot quant à un rapprochement politique. Il ne m’avait pas invité à le rencontrer non plus.

Quelques jours plus tard, un agent d’un ancien ministre MMM qui avait toujours voulu que je réintègre le MMM, m’avait rapporté ceci : « Ou conné, missié Ruchpaul, ou lors goon ou. Mo patron pé dire qui Bérenger fine choisir ou comme ène parmi cinq intellectuels qui li pou demande soutenir li. »

Je m’étais déjà exclu de ces cinq intellectuels car mon attitude pendant le court entretien téléphonique dont je viens de vous parler avait été partiellement dictée par le fait que le nouveau PM avait déjà un de ses pieds dans la tombe. J’étais absolument certain que le MSM-MMM allait perdre l’élection partielle pour le siège laissé vacant, suite à la démission de Sir Anerood Jugnauth (SAJ), parti pour Le Réduit.

Sur l’écart avec lequel Rajesh Jeetah devait remporter l’élection, je devais être précis. Je disais à Arvind Boolell, qui me rendait des visites occasionnelles chez moi à cette époque, qu’elle serait d’environ 4,500. En effet, l’écart fut réduit à 3,500. C’était dû à des bagarres organisées par des agents du MMM dans certains endroits à prépondérance musulmane dans le but — réussi dans une large mesure – d’effrayer les vieux et les femmes des urnes.

Revenons à votre question. Malgré ces petits exploits jusqu’ici inconnus, j’avoue que les prédictions sont risquées. Je sais qu’en chimie deux et deux ne font pas toujours quatre. Là c’est de l’alchimie, mon cher, avec des variables de désintégration inestimables.

S’il était là, mon ami Christian Rivalland, celui qui n’échangeait que des chiffres avec moi, lorsqu’on se voyait, je lui posterais un mail en le défiant. Ancien trésorier du PMSD pré-Indépendance, c’était un expert sur les tendances de vote des 21 circonscriptions de la République, qu’il connaissait rue par rue.

Mais je dois vous dire que même pour lui qui faisait des prédictions coutumières sur les législatives, celles qui arrivent lui auraient donné du tarrh tarrhi. Il se trouve que cette fois, les révoltes sont endogènes. Par exemple, dans le cas des mauves, des protestations de masse ciblaient Bérenger, le leader historique du MMM lui-même.

* Donc, vous ne croyez pas que l’alliance PTr-MMM a bien démarré ?

En tout cas, pas sur des chapeaux de roue, comme vous semblez le dire.

* Si l’on se fie à ce que les gens sont en train de dire en privé, cet accord électoral conclu entre Navin Ramgoolam et Paul Bérenger ne ferait pas l’unanimité au niveau de la base travailliste et même parmi une bonne frange des militants également. Ce qui se dit sur le terrain traduit un sentiment anti … l’électorat travailliste aurait plutôt souhaité une alliance Bleu-Blanc-Rouge, alors que les militants ne feraient toujours pas confiance à Ramgoolam. Est-ce que l’attitude de chaque base est difficile à comprendre ?

Si l’on se fie à ce que les gens disent en privé, l’alliance rouge-mauve perdra ces élections car l’impression qui se dégage est que des anciens rouges et des anciens mauves changeront de camp en vrac.

Mais leurs motivations sont différentes. Chez les Travaillistes, c’est une question de moralité religieuse qui les émeut, hommes et femmes, jeunes et vieux. À mon avis, ce sera une riposte sentimentale d’abord. Ajoutez à cela la fraude et la corruption sans précédent qui ont fragilisé tous les ménages, et les misères subies à cause de la politique ultra-libérale du ministre des Finances d’alors, Sithanen. C’était entre 2005 et 2010.

Chez les mauves, la réaction est plus politique. C’est le ras-le-bol contre un leader qui a trahi publiquement, avec la population de toutes nos îles comme témoin, et qui a été pris la main dans le sac aux dépens d’un camarade de 85 ans qui, malgré ses nombreux défauts, a toujours tenu parole, souvent contre vents et marées.

Au MMM, c’est une question de « Tu te fiches de ma gueule. Je ne m’agenouillerai pas cette fois. Des centaines de fois, je l’ai fait auparavant « devant missié-là ».

Mais comment ce sentiment généralisé de dégoût se répercutera-t-il sur le scrutin est une autre paire de manche. Quelle frange des partisans des deux partis s’abstiendra de voter aux élections ? À tenir en ligne de compte que beaucoup de Mauriciens votent avec le vent, que d’autres ne résistent pas aux offres d’un emploi, d’une promotion, d’un cadeau de Noël et du Nouvel An, fêtes qui s’approchent à grand pas…

Pour répondre à la dernière partie de votre question, c’est vrai qu’une partie des électeurs travaillistes aurait souhaité une alliance avec le MSM. Également quelques députés MSM, mais avait clairement fait ressortir, il y a quelques semaines, qu’une telle alliance se ferait sans lui, ce qui veut dire que la possibilité aurait été évoquée au Sun Trust Building.

* Quel sera l’impact, à votre avis, de la volonté de ‘couper/trancher’ de la part des deux électorats – travailliste et militant – si cette tendance se confirme?

Le couper/trancher organisé existe dans nos mœurs électorales depuis plus d’un siècle, depuis que Savinien Mérédac écrivait que les blancs, candidats l’un contre l’autre aux élections au Conseil Exécutif, « se battaient à coups de malabars. » Je ne cite que de mémoire.

De nos jours, des couper/trancher s’organisent de rigueur pour diverses raisons. En 1983, alors que je rendais visite à une famille de la Population Générale, partisane du PMSD, à Coromandel, une dame m’avais déclaré : « franchement, M. Ruchpaul, nous aurons à vous couper et donner un vote à Finette. » Je vous laisse deviner les raisons de cette franchise.

Vous allez sûrement vous rapSAJ peler qu’aux élections de 1983 au No 7, Dwarkanath Gungah avait devancé SAJ, candidat au poste de PM contre Bérenger, de quelques centaines de votes. C’était probablement un vote organisé des Raviveds, qui signifiait ainsi aux Vaishs « Nous qui mari ici. »

Pendant mon contre-interrogatoire de Harish Boodhoo devant la Commission Rault en 1983, l’homme de Belle-Terre se déclarait, point blank, être supérieur à moi en politique ; je le lui concédais volontiers sous les sourires bénins de Sir Maurice Rault et de ses deux assesseurs, Mme Laure Pillay et Me Prem Bissessur.

Et, pour cause, car j’avais accepté de céder ma place au No 10 à Kader Bhayat. J’avais même été invité à donner un coup de main à ce Soortee, qui posait sa candidature en milieu rural après avoir fui le No 2, où la communauté musulmane était toujours un « dépôt fixe » mauve et s’était vouée à le dévorer, s’il se présentait de nouveau dans cette circonscription.

Et là, je constatais , à mon dégoût de politicien inférieur qu’un mouvement était en place pour « garantir » à Bhayat une deuxième place au lieu d’une première place, et qu’il pouvait ravir à Sir Satcam.

* Qui avait organisé cette petite machination ?

Je ne saurais vous dire. Je n’étais pas enquêteur à l’époque. Pour revenir au couper/trancher national de la part des rouges et mauves en même temps, cela pourrait jouer en faveur de l’Alliance Lépep, à condition qu’elle bénéficie du vote fané, mais tout dépend aussi de la contre-campagne ou si le protestataire reporte son vote sur un Indépendant ou sur un petit parti.

* Mais au-delà du jugement que l’électorat portera au moment du vote sur l’accord entre Navin Ramgoolam et Paul Bérenger, on pourrait croire que ces derniers ont appris les leçons du passé pour réussir une nouvelle aventure ensemble et que les conditions sont cette fois-ci réunies pour assurer cela : partage de tickets sur la base de 30:30, rééquilibrage de pouvoirs entre le Président de la République et le Premier ministre, accord écrit, « lu et approuvé » devant les caméras de la télévision publique… Qu’en pensez-vous ?

Souvent, les politiciens, même les plus chevronnés, ne voient pas ce qui se passe sous leur nez. Suite à la volte-face de Bérenger à l’hôtel Manisa, un Top Politician a insisté que je vienne chez lui pour lui expliquer les motivations de ce comportement infect de Bérenger, condamné par toute la population, toutes les sensibilités politiques et idéologiques confondues.

L’épouse du politicien a insisté pour m’écouter elle-aussi. Je leur ai dit que c’était très simple. Avec le MSM, Bérenger aurait à attendre 4 ans pour être PM, tandis qu’avec le PTr, il le serait pratiquement overnight. Vu son état de santé, les 4 ans d’attente pourraient lui paraître trop longs.

J’ai aussi ajouté qu’avec les Travaillistes, le fils de Bérenger pourrait s’initier à la députation sans problème, tandis qu’avec le MSM cette précipitation d’introduire Emmanuel Bérenger dans l’arène pourrait être mal perçue par SAJ et Pravind Jugnauth.

En fin de compte, l’égalité de tickets ne donne aucun avantage au MMM, car en cas d’une cassure, le transfugisme – nourri par l’ambition du député qui attend son tour, rassure le PM en exercice. Le contrat « lu et approuvé », qui laisse des cavernes de non-dits, ne comporte qu’une valeur morale. F.U.L BRIGHT avait une fois écrit que le seul pays où un contrat signé entre deux partis politiques avait une valeur juridique était la Pologne.

* Mais avant d’en arriver là, faut-il que le tandem Ramgoolam-Bérenger remporte une victoire absolue ou presque. Un 60-0 n’est pas acquis d’avance pour ces derniers, soutiennent actuellement les dirigeants de l’Alliance Lepep, ni même une majorité de trois quarts. Qu’adviendra-t-il, dans ces circonstances, de l’accord politique entre Navin Ramgoolam et Paul Bérenger ? Leur alliance s’écroulera-t-elle et leur gouvernement avec ?

Encore une fois, des non-dits sautent aux yeux. Ce qui est grave à Maurice, c’est que des journalistes ne peuvent pas identifier, dans un temps raisonnable, les failles d’un document ou d’un discours politique. Dans le cas de certains non-dits, ce sont des intervenants aux radios qui ont relevé des lacunes dans le document et qui ont posé des questions. Par exemple, celles-ci :

Primo, dans le cas d’une victoire absolue :Que se passera-t-il si Ramgoolam arrivait à ne plus être de ce monde avant l’élection présidentielle ? Ce problème n’est pas insurmontable, mais des crocs-en-jambe internes et externes aux deux partis sont prévisibles.

Secundo, est-ce que l’alliance rouge-mauve survivra à une victoire à l’arrachée ou tout simplement sans majorité absolue ? Dans ce cas, je pense que Ramgoolam devrait demeurer logiquement à son poste de PM. On serait back to square one. Peut-on souhaiter revoir, cette fois en chair et en os, Bogdanor, etc ?

Tertio, d’autres auditeurs ont évoqué, non sans humour, le cas où, une majorité absolue obtenue, Ramgoolam est battu au scrutin présidentiel à un tour par SAJ. Drôle de … Remake aux multiples détours rouges.

* Au fait, faute d’un référendum en bonne et due forme pour inviter l’électorat à se prononcer sur le projet de réforme électorale en vue d’introduire une dose de représentation proportionnelle dans notre système électoral et la mise en place d’une Deuxième République, c’est Xavier Duval qui a mis en garde sur le fait que les prochaines élections générales auront des allures de référendum compte tenu de la majorité de trois quarts requise pour la concrétisation de la IIe République. A-t-il raison ? C’est-à-dire qu’un vote massif en faveur des propositions fera fonction de référendum ?

Dans les circonstances où l’on a jeté par-dessus bord tous les rapports précédents, dont les coûts ont dû atteindre la centaine de millions, où Sithanen a tout renversé y compris sa propre thèse, qu’il a tournée en roman, pour se tailler un retour dit triomphal à Quatre-Bornes, je crois que la représentation proportionnelle (PR) est renvoyée aux calendes grecques, même dans le cas d’une victoire aux trois quarts, avec les tirs à la courte paille qui s’ensuivront. Le BLS survivra pour un bon bout de temps, car il sera mêlé aux amendements constitutionnels et les négociations politiques sur ces derniers passeront par un nouveau départ.

Permettez-moi de vous dire qu’on ne change pas de Constitution par l’adoption législative d’un document qui doit être voté dans son intégralité. C’est voué à l’échec. Des amendements sont votés par article ou secteur de la Constitution existante.

On ne doit certes pas suivre les Américains, où, vu leurs procédures bi-camérales, elles-mêmes contrôlées ou entravées par les pouvoirs de la Présidence des Etats-Unis, un amendement prend des années pour être voté et promulgué. Sithanen, dont je ne conteste pas la compétence, aurait dû être poliment écarté de toutes les discussions, étant un chasseur de ticket. Xavier Duval assimile le vote final sur le projet de 2e Constitution à un référendum. Je ne vois pas ce projet à l’horizon, même avec mon microscope qui peut zoomer sur Mars, si vous me permettez d’utiliser cette image.

* Si Navin Ramgoolam et Paul Bérenger se disent confiants de remporter une victoire massive lors des prochaines élections générales, des questions se posent en ce qui concerne l’élection à un tour du Président de la République. L’élection de Navin Ramgoolam en tant que Président est-elle, à votre avis, une certitude ?

Ah ! Ça c’est une question très intéressante. Acceptons, pour les besoins des réponses à votre question, que nos deux acteurs se retrouvent ensorcelés, cette fois par un 60-0 sans appel.

C’est dans ces circonstances que l’élection à un tour du Président de la République prend l’allure d’un référendum. L’élection à un tour sans autres conditions ressemblerait, donc, à un autre système de First Past the Post. Avec l’appui, jusque-là solidaire, du MMM, Navin Ramgoolam peut bien être désigné comme le premier Président de la 2e République, mais à quelques conditions près, dont la principale est que l’Alliance Lépep ait été battue à plate couture à travers le pays.

Mais, il se peut que, malgré sa défaite, SAJ et quelques-uns de ses lieutenants se retrouvent être les dignes représentants de, disons, 40% de la population. Cela ferait de SAJ un candidat avec une chance à l’élection présidentielle d’un tour avec, cependant, des complications qui susciteraient d’autres réponses interminables, si SAJ, Best Loser, par exemple, arrivait à ne plus être de ce monde…

* Si le principe de l’élection du Président de la République à un tour est maintenu, que se passera-t-il, lorsque les candidats à la présidence des deux principaux partis du pays vont s’affronter ?

C’est ce qui est grave pour le parti qui, comme le disait si bien Gaëtan Duval, est « Parti l’Hôtel Gouvernement. » Si Navin Ramgoolam est élu sans anicroches à la première présidentielle à un tour, les autres élections poseront problème.

C’est la personnalisation de la contestation d’une élection pour le poste de Président qui donne à cette élection son caractère référendaire. Comme dans un référendum, par exemple le plus récent en Écosse, le votant est appelé à voter Oui ou Non. Dans le cas d’une élection à la présidentielle, c’est exactement la même chose que fait électeur. Il dit s’il veut d’une personne ou non.

Or, au cours des conférences constitutionnelles à Lancaster House, SSR a combattu tooth and nail toute velléité britannique d’un recours au référendum, pourtant alors répugnante aux traditions électives de la blonde Albion, après avoir tenté de lui refiler le Master Copy de la Constitution guyanaise imprégnée de PR, qui avait condamné Cheddi Jagan à l’opposition pendant trente ans.

Au Réduit, alors qu’il était Gouverneur Général, SSR me confiait, lors d’une de nos incursions dans l’Histoire, que l’une valait l’autre de ces deux mitraillettes anglaises :

« Duval ti envi prend pouvoir avec l’aide banne Anglais. Li fine monte lors zépaules Créoles pour li dire « Anglais Volères » lors la place di Quai. Ça fine arrivé après qui Anglais fine fini détache Diégo are nous.

Mais qui mo pou capave dire contre Duval ? L’oligarchie sucrière ti derrière li, l’Église Catholique aussi. Si pas ti éna Duval, zotte ti pou dresse Rozemont contre nous, si Rozemont pas ti mort, couma zotte ti dresse Burnham contre Jagan pour satisfaire Américains.

C’est ça même Duval ec so banne grand blancs ec so l’Église qui ti donne nous ène grand coup de main pour faire dimoune gagne travail dans Zone Franche et dans tourisme. »

Donc, l’élection de Navin Ramgoolam peut être une certitude dans les circonstances que je vous ai indiquées, mais elle fraie le chemin pour un dénuement du pouvoir travailliste à l’avenir.

* C’est une thèse d’ordre communal que vous nous avancez là, Sonah Ruchpaul ?

Pas du tout. Détrompez-vous. Je ne crois pas en un changement constitutionnel qui abolirait le BLS, qui, à mon avis, a fait ses preuves et continue à donner une certaine sauvegarde à tout le monde. Je ne crois pas non plus aux changements que préconisent le tandem Ramgoolam/Bérenger.

Pour moi, chaque Mauricien – tous les groupes raciaux, castéistes ou religieux confondus – doit pouvoir accéder au poste de PM ou de Président avec ou sans pouvoirs exécutifs. Dans notre société arc-en-ciel, ce Mauricien doit répondre à un critère essentiel pour son succès. Il doit emerge, un mot cher aux Conservateurs anglais jusqu’en 1963.

Et ce Mauricien, quel qu’il soit, doit d’abord être quelqu’un qui n’a jamais insulté ou offensé une section de la population mauricienne. Il doit, ensuite, être perçu comme l’oiseau politique – que j’admets introuvable en ce moment – qui peut convaincre qu’il peut dire NON à sa propre communauté.

Ceci dit, je vais vous surprendre davantage. Dans l’immédiat, nous avons tous besoin d’une assurance contre l’accaparement. Cette assurance pourrait nous provenir de Rodrigues ou de nos Chinois. Car un de nos Chinois ou un de nos compatriotes de Rodrigues, qui sont en si petit nombre, ne peuvent s’accaparer de rien.

Je vous assure que je ne rêve pas, et je ne suis pas non plus dans « l’Utopie » de Sir Thomas More.

* Donc, pas de changements constitutionnels pour la 2e République ?

J’ai des propositions constitutionnelles, uniquement liées aux droits de l’homme, de la femme, des enfants et des travailleurs dans le contexte d’un « sovereign democratic State ». La Constitution de Maurice doit aussi être amendée pour rendre l’État mauricien séculier. Je crois que les forces vives devraient se battre, ne serait-ce que d’une manière piecemeal pour forcer ces amendements.

 

* Published in print edition on 10 October 2014

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