“Maurice a encore une marge de manoeuvre fiscale et monétaire, contrairement à l’Europe et aux Etats-Unis”

Interview: Eric Ng Ping Cheun, économiste et directeur de PluriConseil :

“Xavier Duval aura à travailler en concertation avec le Premier ministre dans la préparation du budget…

Les Finances, c’est du 24/7, et non du 9/4. Il y a un travail énorme à abattre”

“Pendant le passage d’un cyclone, on utilise des bougies lors des coupures de courant, mais on les éteint dès que la lumière revient… Savoir se servir des bougies, c’est tout l’art des politiques”.


Notre invité, cette semaine, Eric Ng Ping Cheun, économiste et directeur de PluriConseil, nous donne son opinion sur la manière dont différents secteurs de l’économie considèrent et traitent  la crise économique mondiale. Il explique aussi les différences dans les résultats des sondages. Le rôle du Grand Argentier sera aussi considéré,  étant donné que les préparatifs pour le prochain budget sont déjà bien enclenchés.  


Mauritius Times: Dites-nous d’abord, M. Ng, Maurice se trouve-t-elle présentement dans « l’œil du cyclone », comme l’affirme le leader du MMM, qui reprend l’analyse de Vishnu Lutchmeenaraidoo selon laquelle « la reprise de l’économie mondiale qui semblait s’amorcer en 2008 était très fragile » et que « la crise économique mondiale allait rebondir » ?

Eric Ng: Maurice s’en est bien sortie depuis la crise de 2008 jusqu’à présent. Le pays a senti le choc en 2009 lorsque la croissance mauricienne est tombée à 3,1% avec une contraction du secteur textile (-0,2%) et de l’industrie touristique (-5,9%). Le textile a pris du temps pour se relever, ayant connu la stagnation (zéro croissance) en 2010 avant de se reprendre cette année avec une croissance attendue de 6%. Le tourisme, lui, a vite retrouvé une croissance positive, de 6% en 2010 et de 4% en 2011. Le nombre d’arrivées a, dès l’année dernière, franchi le niveau d’avant la crise, et il sera autour de 980 000 cette année et générera des revenus bruts estimés à Rs 42 milliards. Et, au niveau national, la croissance s’est redressée à 4,3% en 2010 et à 4,5% en 2011.

Maurice n’est pas immunisée contre une nouvelle crise mondiale, tout comme n’importe quel pays qui exporte en Europe et aux Etats-Unis. Aucun gouvernement ne pourrait nous mettre à l’abri d’une nouvelle récession qu’on appelle “double-dip recession”. C’est ce langage de vérité que tout gouvernement responsable doit tenir. Il pourrait toutefois atténuer la sévérité d’une crise avec des mesures appropriées, comme on l’a vu avec les divers plans de relance de fin 2008 à fin 2009 et avec l’assouplissement du taux d’intérêt.

Je pense que l’Europe et les Etats-Unis ont plus à craindre de leur situation économique que Maurice. Eux n’ont plus de marge de manœuvre fiscale et monétaire aujourd’hui : leur déficit budgétaire et leur dette publique ont atteint des sommets tandis que leur taux d’intérêt directeur est très bas, voire proche de zéro. Au contraire, ils adoptent maintenant des politiques d’austérité. La Banque centrale européenne a changé d’orientation monétaire en relevant son taux de refinancement par deux fois. Si la Réserve fédérale américaine a annoncé qu’elle ne modifiera pas son taux directeur jusqu’à mi-2013, elle n’envisage pas non plus un troisième programme d’assouplissement quantitatif.

De notre côté, nous avons encore une marge de manœuvre fiscale et monétaire. Mais nous devons l’utiliser à bon escient, c’est-à-dire en évitant un dérapage des finances publiques et une résurgence de l’inflation. Pendant le passage d’un cyclone, on utilise des bougies lors des coupures de courant, mais on les éteint dès que la lumière revient même si l’on est encore dans l’œil du cyclone… Savoir se servir des bougies, c’est tout l’art des politiques.

* Par ailleurs, le Gouverneur de la Banque de Maurice a exprimé, lors de sa rencontre avec les membres de la Mauritius Exports Association (MEXA) la semaine dernière, son incompréhension à propos du « spectaculaire revirement d’humeur » des opérateurs économiques à la lumière du dernier sondage de PluriConseil alors que la Chambre de Commerce et d’Industrie de Maurice (CCIM) a enregistré une remontée de l’indice de confiance chez ces derniers par rapport à la situation économique. Le pessimisme des opérateurs – probablement lié à la situation économique mondiale – est-il donc totalement injustifié ?

Je vous remercie de m’avoir posé cette question, car cela me donne l’occasion d’apporter des précisions utiles. Il est évident qu’il existe des différences de méthodologie entre ces deux sondages.

D’abord une différence fondamentale : il est bien précisé que les participants aux sondages de PluriConseil sont des analystes, c’est-à-dire ceux qui font des analyses, tels les économistes, les trésoriers, les brokers et les gestionnaires de portefeuille, et ils regardent l’économie dans sa globalité. De l’autre côté, les participants aux sondages de la CCIM sont essentiellement des chefs d’entreprise et des managers, soit des gens qui s’intéressent avant tout à leur entreprise et à leur secteur d’activité, et ils n’ont pas nécessairement une compétence de « macro-économiste ».

Ensuite une différence spécifique : les deux sondages respectifs auxquels on fait référence ont été réalisés à des périodes différentes, l’une très éloignée de l’autre. Celui de la CCIM a été fait durant le deuxième trimestre, bien avant que Standard & Poor’s n’ait dégradé la note financière des Etats-Unis et avant qu’on n’ait commencé à envisager sérieusement une “double-dip recession”.

L’enquête de PluriConseil, elle, a eu lieu durant la deuxième semaine d’août juste après que l’annonce de ces deux mauvaises nouvelles. Aussi, entre-temps, la publication MCB Focus anticipait que le taux de chômage dépasserait la barre de 8% cette année, et le Secrétaire financier, dans une circulaire, disait craindre une baisse de notre croissance économique à 4% en 2012. En tenant compte de tous ces nouveaux facteurs, on ne peut quand même pas dire qu’il n’y a rien qui puisse expliquer le pessimisme des analystes.

Par ailleurs, j’aimerais apporter deux autres précisions. D’abord, un sondage n’est qu’une photographie de l’opinion, et celle-ci peut varier d’une semaine à l’autre. Ensuite, les opinions des analystes portent sur des perspectives. L’économie peut avoir bien fait dans un passé récent, mais rien ne dit qu’elle répétera sa performance dans un futur proche.

* Le Secrétaire financier, justement, est du même avis que le Gouverneur – « les signaux ne sont pas alarmants », « il n’y a aucune indication d’effondrement même s’il existe beaucoup de volatilité dans les marchés », a-t-il dit. Les opérateurs s’appuient-ils donc sur la situation économique mondiale pour rechercher davantage des concessions des autorités ?

Chacun est dans son rôle : les autorités s’efforcent toujours d’injecter une dose d’optimisme dans le débat, les opérateurs privés y ajoutent souvent un brin de scepticisme, et les syndicats ne sont jamais satisfaits. Nous vivons, comme l’a dit le Père Arthé lors de la messe de la Saint Louis, dans le “relativisme ambiant” où chacun a sa vérité à lui. En fin de compte, on perd le sens du bien commun. C’est la raison pour laquelle nous devons apprendre à rechercher la vérité objective.

Il convient de faire la distinction entre marchés financiers et marchés économiques. Les premiers sont de nature volatile, et il est vrai qu’ils ne se sont pas effondrés. On peut en dire autant des marchés économiques. Reste qu’il n’existe pas de lien direct entre la bourse et l’économie réelle, surtout à Maurice où les compagnies cotées sur le marché officiel sont assez faiblement représentatives de la production nationale.

Dans les pays développés toutefois, un krach boursier peut avoir un impact négatif sur la consommation dans la mesure où beaucoup de particuliers boursicotent pour espérer engranger des plus-values et, ensuite, les dépenser. Même les retraités mettent leurs économies en bourse ! Ainsi, une chute des cours a un effet « richesse inverse » qui amène les gens à réduire leur consommation, et cela peut se répercuter sur nos exportations.

On n’en est pas encore là, selon moi. Cependant, la croissance économique en Europe et aux Etats-Unis a été révisée à la baisse. Il y a des risques que les commandes textiles et les arrivées touristiques reculent légèrement dans six mois. Les autorités doivent suivre la situation de très près.

* Rundheersing Bheenick soutient que, vue sous divers angles, la performance de Maurice est remarquable : le secteur d’exportation montre sa résilience face à la crise, un taux de chômage en dessous de 8 %, un taux d’inflation à 6 %, rien en termes de ‘credit crunch’, de bulle immobilière, d’austérité budgétaire ni de problème de dette souveraine… En plus, les banques, dit-il, dégagent d’énormes profits. Votre opinion ?

Les chiffres officiels en témoignent : la valeur des exportations a augmenté de 12% au premier semestre de 2011 par rapport à celui de 2010. Le secteur textile et le secteur de l’habillement ont enregistré une hausse supérieure à la moyenne, soit 18% et 15% respectivement. On note aussi une croissance appréciable de nos exportations vers l’Afrique du Sud (44%), la France (12%), les Etats-Unis (10%) et la Grande Bretagne (6%).

Notre économie a créé 10 000 emplois nets en 2010, mais le chômage a augmenté en raison de la hausse du taux d’activité des femmes. En effet, près de 11 000 femmes sont arrivées sur le marché du travail, contre 4 000 hommes. Si le taux de chômage tourne autour de 7,8%, il tend à monter depuis 2009.

Nous n’avons pas de problèmes d’ordre financier du genre que connaissent les pays développés, car nos banques n’ont pas d’actifs toxiques. Néanmoins, un ralentissement de l’activité économique aura un impact négatif sur les produits d’intérêts des banques. Je n’ai pas dit profits, car elles peuvent demeurer très profitables avec leurs commissions de plus en plus élevées. Ce sont autant de frais financiers pour les entreprises.

* Rama Sithanen a-t-il donc réussi à améliorer la résilience de l’économie mauricienne malgré tout, et son successeur a-t-il suivi la même voie, d’après vous ?

Il n’y a pas de doute que notre économie est devenue plus résiliente grâce aux réformes initiées en 2006 : baisse des taux d’imposition de 25% à 15%, facilités d’investissement aux étrangers, meilleure collecte d’impôts par la Mauritius Revenue Authority (MRA) et assainissement des finances publiques. C’est ainsi que le gouvernement a eu suffisamment de “fiscal space” pour relancer l’économie dans un contexte de crise financière. Les nouvelles lois du travail de 2008, qui ont rendu le marché du travail plus flexible, et les programmes de formation ont permis de limiter les pertes d’emplois.

Le successeur de Sithanen n’a pas remis en cause le cadre des réformes. Mais il a ralenti, sinon stoppé, le rythme des réformes alors qu’il fallait plutôt les élargir et les approfondir, en d’autres mots apporter une deuxième génération de réformes. Il s’est contenté de soutenir la restructuration des entreprises endettées. C’était nécessaire, mais il fallait en même temps favoriser la création de nouvelles entreprises.

* La première annonce publique de Xavier Duval concernant les principaux axes de sa stratégie budgétaire – qualifiés de « verbiage insipide et insignifiant » par Paul Bérenger – n’indique pas pour l’instant qu’il souhaite ou puisse imprimer une touche personnelle à la gestion des affaires économiques. Certains au sein du secteur privé disent que la venue de Xavier Duval aux Finances constitue une « bonne nouvelle ». Qu’attendez-vous de lui ? Qu’il suive la même voie tracée par Rama Sithanen ?

Il existe effectivement un a priori favorable à Xavier Duval au sein du secteur privé. C’est un peu naturel vu que le nouveau ministre des Finances est lui-même un professionnel qui a fait ses preuves, étant connu du milieu des affaires. Souvenez-vous du premier gouvernement de Navin Ramgoolam lorsque Xavier Duval avait été nommé ministre après sa victoire lors de la partielle de 1999. Les relations entre lui et les opérateurs économiques étaient à l’avenant, et il régnait une atmosphère de confiance. Je pense qu’il peut créer cette même entente à nouveau.

Les quatre axes de sa stratégie budgétaire sont bien définis dans le contexte actuel : doper la croissance (car elle est plutôt modérée), améliorer le système de protection sociale (qui doit être rendu plus équitable), réformer la fiscalité (pour améliorer la « tax buoyancy ») et faire face aux répercussions de la crise en Europe et aux Etats-Unis (en soutenant nos exportateurs). On peut constater que trois axes sur quatre concernent l’économie, ce qui laisse penser à une prédominance économique dans le prochain budget.

Cependant, on serait curieux de connaître les implications de la réforme fiscale pour les entreprises. Il est à noter que lors de la conférence de la MEXA, le Secrétaire financier a dit vouloir rendre le régime fiscal “fairer and more efficient”. Est-ce que cela veut dire augmenter la part des impôts directs dans les recettes fiscales ? C’est une question qui mérite d’être débattue.

Je souhaite que Xavier Duval continue à introduire des réformes structurelles dans l’économie, tout en apportant une touche personnelle à la gestion des Finances. Il aura à travailler en concertation avec le Premier ministre dans la préparation du budget, comme l’a toujours fait Rama Sithanen. Cette collaboration ne doit pas être vue comme une contrainte mais, au contraire, comme un soutien aux orientations budgétaires. Enfin, les Finances, c’est du 24/7, et non du 9/4. Il y a un travail énorme à faire.

* Mais Xavier Duval souhaite améliorer le système de protection sociale afin « d’offrir aux plus vulnérables une vie décente et la possibilité de sécuriser leur avenir ». Intention louable, mais dispose-t-il des moyens pour la traduire concrètement ? Les syndicalistes soutiennent qu’il dispose d’une « grande marge de manœuvre »…

Les syndicalistes et le Joint Economic Council (JEC) ont pris pour habitude de scruter la marge de manœuvre du grand argentier à chaque consultation pré-budgétaire : cette marge serait toujours grande pour les premiers, mais étroite pour le second. Là n’est pas la question. Ce qu’il faut discuter, c’est : « Que faire de cette marge de manœuvre ? » Doit-on l’utiliser pour accroître indûment les salaires dans la fonction publique, ou protéger les vulnérables en les ciblant, ou soutenir l’activité économique et favoriser la création d’emplois ?

Pour le premier semestre de l’année, les revenus encaissés par le gouvernement semblent être en dessous des prévisions, soit 48% du total attendu. Les droits de douane encaissés se sont élevés à 44% des Rs 1,5 milliards attendus pour l’année, en raison d’une moindre importation liée à un fléchissement de la croissance de l’économie. Les taxes sur les propriétés sont à 36% des Rs 4,5 milliards attendus, ce qui indique un certain attentisme des investisseurs dans l’immobilier au regard de la réintroduction de l’impôt sur les plus-values.

De l’autre côté, les dépenses engagées au budget du développement ne représentent jusqu’ici que 23% des allocations budgétaires. Même si le gouvernement n’arrive pas à dépenser 100% de ce qui a été alloué au Capital Budget avant la fin de l’année, ce n’est pas une raison pour laisser filer les salaires et, par extension les pensions, dans la fonction publique. Le grand argentier ne pourra pas présenter en 2012 un budget de développement inférieur à celui de 2011, ce qui fait qu’on reviendra à la case départ. Il devra savoir réorienter les dépenses de manière productive.

Et puis, il existe une différence capitale entre dépenses courantes et dépenses de développement. Les premières reviennent chaque année et sont incompressibles, et toute hausse entraîne d’autres hausses. Les secondes interviennent une seule fois (one-off) sur un projet particulier, et elles soutiennent la croissance de l’économie. Or il faut moderniser nos infrastructures publiques pour éviter des goulots de production.

* Et que faites-vous des revendications syndicales en prévision des consultations tripartites ? Revendications par rapport à l’adoption du principe d’un salaire minimal de Rs 12 000 par mois, ou celle du principe de rattrapage progressif de la perte du pouvoir d’achat, ou même le paiement d’une compensation intégrale sur un salaire de Rs 12 000 ?

Fixer les salaires par décret ne constitue pas un principe, du moins dans une économie de marché. Nous sommes tous d’accord que les salaires doivent progresser. Pour cela, il faut travailler, et travailler de manière à grossir le gâteau national. En d’autres mots, il faut être productif. Je ne crois pas du tout qu’une compensation intégrale sur un salaire de Rs 12 000 sera dans l’intérêt des travailleurs qui risquent de perdre leur emploi, et encore moins dans celui des chômeurs qui ne trouveront pas un emploi. Or, un emploi créé représente du pouvoir d’achat.

La question du pouvoir d’achat n’est pas seulement liée au salaire, mais aussi à l’inflation. Et nous savons que les causes de l’inflation sont multiples : monétaire, fiscale, structurelle et internationale. La cause ultime demeure un excès de monnaie par rapport à la production de biens et services.

* Le débat sur la valeur de la roupie (qui ne reflèterait pas « our current economic fundamentals », selon les exportateurs) revient sur le tapis en prévision de la prochaine réunion du Comité de politique monétaire. M. Bheenick a déclaré lors de sa rencontre avec la MEXA que la Banque de Maurice ne peut pas prendre en compte seulement les intérêts des exportateurs. Il se pourrait que les secteurs manufacturier et hôtelier éprouvent des difficultés réelles. Qu’en pensez-vous ?

Dire que la valeur d’une monnaie reflète ou ne reflète pas les fondamentaux économiques, c’est un cliché qui n’a pas de sens. Qui peut affirmer que le dollar américain reflète actuellement les fondamentaux de l’économie des Etats-Unis, ou l’euro, ceux de l’économie de la zone euro ? La valeur d’une monnaie par rapport à une autre monnaie est déterminée essentiellement par la confrontation entre l’offre et la demande de ces deux monnaies. Notre économie peut être faible avec trop de devises, ou forte avec une quantité insuffisante de devises sur le marché local.

Une banque centrale doit certainement prendre les intérêts de tous les acteurs économiques. Elle doit être impartiale afin de ne pas nuire aux intérêts des uns et profiter aux autres. Cependant, il est des situations qui font pencher le balancier d’un côté. Sans doute est-il actuellement du côté des exportateurs qui demandent à être soutenus. Mais on doit agir avec doigté plutôt que dans une logique de confrontation.

Il faut dire que ce qui intéresse notre secteur textile, c’est la parité euro/dollar, étant donné qu’il exporte plus en euros et importe beaucoup en dollars. Il est affecté quand l’euro baisse par rapport au dollar. L’hôtellerie, elle, est plutôt concernée par le taux de change roupie/euro, car ses revenus sont largement en euros, et ses dépenses en roupies. Les hôtels souffrent davantage d’une appréciation de la roupie que les usines textiles.

* La question de la libéralisation de l’accès aérien fait actuellement débat. Libéralisation qui pourrait générer quelque 10 400 emplois, entraîner une baisse de 31% des tarifs et dégager un surplus de l’ordre de Rs 2,5 milliards, selon les consultants InterVistas-EU Consulting Inc. Votre opinion ?

Une libéralisation de l’accès aérien augmentera la capacité de sièges-avion, ce qui évidemment fera accroître les arrivées et les recettes touristiques et aidera à créer des emplois directs et indirects dans le tourisme. Cette libéralisation est nécessaire, mais doit être en accord avec notre stratégie d’attirer des touristes de qualité (c’est-à-dire des touristes qui dépensent) et avec notre stratégie de permettre à notre transporteur national de retrouver la profitabilité.

Dans ce contexte, il paraît que Air Mauritius soit susceptible de perdre une partie de ce que gagneront les hôtels. Or l’on ne peut pas dire à ces derniers de payer une compensation à notre transporteur ! Et quid des concurrents d’Air Mauritius sur certaines lignes ? La situation actuelle ne favorise pas une solution optimale de gagnant-gagnant, car les acteurs font face au dilemme du prisonnier. L’Etat peut résoudre ce problème à leur place à condition qu’il joue le rôle d’arbitre, et non d’acteur, dans le secteur du transport aérien.

* Pour revenir aux mesures proposées par Vishnu Lutchmeenaraidoo en vue de faire face à la « crise qui allait resurgir » selon lui, très peu d’économistes du pays se sont aventurés à commenter publiquement celle invitant la Banque de Maurice à investir 50% de ses réserves en or. Valeur refuge qui, de $ 760 en août 2008, a dépassé la barre des $ 1 900 l’once cette semaine, ce qui aurait permis au pays d’accumuler des milliards de profits. Pourquoi cette attitude de réserve des économistes ?

Plusieurs Mauriciens ont des comptes en devises et beaucoup de nos banques commerciales ont des réserves en devises. Je serais curieux de savoir combien d’entre eux ont acheté des produits dérivés en or. Il est pourtant plus facile à des agents privés de faire de la spéculation sur l’or qu’une banque centrale qui, elle, doit être plus conservatrice. Sa mission est surtout de gérer la balance des paiements et de sauvegarder la valeur de la roupie.

Si la Banque de Maurice avait placé la moitié des réserves officielles en or, les gens auraient spéculé contre la roupie, et celle-ci aurait subi une forte dépréciation contre les devises étrangères. Les prix de nos produits importés auraient grimpé en flèche. On aurait alors accusé les autorités de mal gérer la roupie et d’être responsable de l’inflation importée.

Il faut savoir que l’or figure à l’actif du bilan de la banque centrale au même titre que les devises. Il vient en contrepartie du passif, constitué essentiellement des billets. On ne peut donc ajouter l’or (acheté) au bilan qu’en retirant le montant correspondant en devises.

L’or ne rapporte rien – en dehors d’une éventuelle variation en capital, si le prix monte – tandis que les devises peuvent être placées et rapporter un intérêt, qui viendrait gonfler les recettes de la banque centrale et lui permettrait de dégager un bénéfice et de payer un dividende à l’Etat. Enfin, l’or est un investissement cyclique et un actif non liquide, de sorte qu’on ne peut pas récupérer rapidement et à moindre frais les sommes investies. Cela, je le dis sans réserve.


* Published in print edition on 1 September 2011

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