Autant en emporte la modernisation

La disparition du patrimoine colonial ne vient pas seulement montrer les modifications subies par des sites et bâtiments mais aussi un certain attachement à une époque révolue. Le bâtiment de La School – l’ancien collège Royal de Port Louis – disparaît du paysage ; modernisation oblige !

Patrimoine et menace

On ne compte plus le nombre de ces anciennes écoles qui ont formé une génération de garçons et filles. On pense à La Queen – Ecroignard, Ecole Touchard – Port-Louis-, Ecole Bunel – Curepipe-, Young Mens’ Hindu, Balliol à St Pierre et tant d’autres dans le nord, le sud dont les vieux se rappellent. Faut fouiller les archives pour recenser toutes ces écoles et reconnaître leur contribution pour alphabétiser les enfants des classes défavorisées et pour pousser la formation de ceux qui en avaient plus de moyens.

Des forges comme la Forge de Mon Désir, des gares comme Argy Railway Station, Mahebourg Railway Station, et des ponts dont certains ont gardé leur nom, entre autres Pont Colville, Bain des Négresses Bridge. Autant que ces vestiges, il y avait les moulins – à eau, à vent et à manège – qui ont joué un grand rôle dans l’histoire du pays. Quelques noms qui ont disparu – Moulin de Massilia Aloe Factory, St. Avold Old Mill ou Yemen Aloe Factory. Notre patrimoine culturel a le vent en poupe avec le Morne ou l’Aapravasi Ghat, bien que bon nombre de ruines soient tombées aux oubliettes. Notre patrimoine industriel semble moins valorisé faute de spécialistes dans le domaine.

Recherches et fonds

Des historiens tentent tant bien que mal de divulguer certaines recherches mais la vulgarisation de ce patrimoine fait cruellement défaut. C’est toujours la même rengaine – pas assez d’argent, manque de fonds canalisés ailleurs. A la Réunion les laboratoires de recherche fonctionnent bien mieux. Il suffit de voir le nombre de publications et de suivre le combat des chercheurs qui se démènent pour des fonds. Plusieurs viennent même pendant leurs vacances effectuer des recherches aux archives et sont accueillis à bras ouverts. Nos chercheurs se plaignent par ailleurs de la méfiance de certains responsables à Moka et Coromandel qui ne leur facilitent pas la tâche alors que les chercheurs étrangers sont accordés des privilèges.

Faisons référence à Michèle Marimoutou Oberlé qui a écrit un livre magnifique sur les moulins Kader ; on a reconnu son esprit scientifique et la rigueur de son analyse et son travail a été sponsorisé. Jean-Régis Ramsamy a aussi publié un beau livre sur le Bal tamoul (nalgon) à la Réunion. Blue Penny Museum – de par les expositions – invite à entreprendre un travail de fourmi auprès des seniors et sur des sites pour revivre une certaine époque. Indradhanush Sanskritic Parishad va dans le même sens pour qu’on ne tire pas définitivement un trait sur notre patrimoine et a tout le support des membres.

Moulins Kader

Michèle Marimoutou nous promène dans le chemin du Moulin Cader/Kader ou encore cadère, choka, aloès. Ces moulins sont liés à l’industrie textile. Le choka fait partie du quotidien des gens, surtout à l’époque de la guerre qui a marqué les îles sœurs. Certaines personnes se souviennent avoir mangé du manioc et de la patate douce pour remplacer le riz. Le choka sert à faire des vêtements, des clôtures tout comme on utilisait d’autres fibres pour rembourrer les matelas ou les coussins, pour attacher les boeufs. Aujourd’hui, tout comme le palmiste, le chou de choka est « remis à l’honneur et peut être dégusté dans les gîtes. »

L’enseignante-chercher donne une longue liste des fibres textiles qu’on a sur le sol mauricien également : vétiver de l’Inde, bambou, vacoas, China-grass, passe-rose, affouche, arbre à pain, lin, baobab. Ces fibres servaient et servent encore à fabriquer des paillassons, chapeaux, pâte à papier, nattes, sac à sucre et à café, etc. Quelques-uns sont des emballages qui plaisent aux touristes et donnent une touche exotique à nos produits.

Tout se faisait à la main. Rodrigues est un bel exemple de l’artisanat. Les machines devaient être introduites bien plus tard. Les fileuses – car beaucoup étaient des femmes – ont travaillé au moulin Commins au lieu-dit La Montagne où un chemin de terre témoigne de l’existence de l’ancienne corderie. Une fileuse fait revivre une époque qu’on pourrait appeler lé temps margoze et se souvient d’avoir tout le temps faim et « qu’à force de filer le fil de choka, on avait les mains en sang à la fin de la semaine et on les mettait alors à tremper dans de l’eau salée avec quelques feuillages, pour guérir les plaies avant de recommencer la semaine suivante… »

Le témoignage de Mme Edith Commins citée par Michèle (pp 93-94) donne un aperçu de la fabrication des cordes. Et oh ! ! Combien utiles étaient-elles ! Il fallait se mobiliser pour satisfaire les clients : « Il y avait la corde chinois, qui était une grosse corde mesurant très précisément deux mètres cinquante, utilisée notamment pour attacher les cochons. Il y avait également la corde de 16, qui était la corde ordinaire, servant aussi à attacher les bœufs qu’à fixer les ballots. » D’autres cordages plus tortillés ensemble servaient dans la marine pour amarrer les bateaux dans les ports. En trouve-t-on toujours ces cordes ? Apparemment dans des goddams ou stores, dans certaines baies où les vieux pêcheurs ne peuvent s’en passer. Michèle Marimoutou ajoute que deux sites à la Montagne et à Saint Gilles sont toujours présents dans la mémoire populaire. Son expertise pourrait bien servir à la communauté des chercheurs mauriciens qui souhaitent retrouver ces moulins et leurs restes.

 Shakuntala Boolell

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